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13/10/1998 | FRANCE | N°96-42584

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 octobre 1998, 96-42584


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° V 96-42.58 et A 96-45.303 formés par la société Le Moulin de la Vierge, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

en cassation de deux arrêts rendus les 14 mars 1996 et 26 septembre 1996 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section C), au profit de M. Henri X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 juin 1998, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien fa

isant fonctions de président, Mme Bourgeot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Brissier, ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° V 96-42.58 et A 96-45.303 formés par la société Le Moulin de la Vierge, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

en cassation de deux arrêts rendus les 14 mars 1996 et 26 septembre 1996 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section C), au profit de M. Henri X..., demeurant ...,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 juin 1998, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Bourgeot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Brissier, Texier, conseillers, M. Soury, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Bourgeot, conseiller référendaire, les observations de Me Bouthors, avocat de la société Le Moulin de la Vierge, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. X..., les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° V 96-42.584 et A 96-45.303 ;

Attendu que M. X..., engagé le 16 janvier 1989, en qualité de tourier-pâtissier, par la société Le moulin de la Vierge, a été victime d'un accident du travail le 10 juin 1992 à la suite duquel il a bénéficié de plusieurs arrêts de travail en rechute de son accident ; qu'il a repris le travail le 4 octobre 1993 au poste de pâtissier aménagé par l'employeur ; qu'il a été victime, le 28 janvier 1994, d'un second accident du travail ; que le salarié, qui a repris le travail le 1er mars 1994, a été déclaré par le médecin du travail, le 2 mars suivant, inapte à son emploi ; que l'inaptitude du salarié a été confirmée le 28 avril 1994 et à la demande de l'employeur le 27 juin 1994 ; que le salarié, prétendant qu'aucune proposition de poste adaptée à son nouvel état de santé ne lui avait été faite par l'employeur qui l'a maintenu sur le poste occupé avant le second accident du travail, a saisi la juridiction prud'homale aux fins de faire constater la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur et obtenir le paiement de diverses indemnités liées à la rupture du contrat et à titre de rappels de salaires ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° V 96-42.584 :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 1996) d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat aux torts exclusifs de l'employeur et d'avoir alloué au salarié une somme à titre de provision à valoir sur les dommages-intérêts qui seront fixés après réouverture des débats, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il résulte de l'article L. 122-32-5 du Code du travail qu'en cas d'inaptitude physique partielle d'un salarié constatée par le médecin du travail, l'employeur doit se conformer à l'avis du médecin du travail en mettant en oeuvre des mesures telles que mutation, transformation de poste ou aménagement du temps de travail ; qu'en l'état de l'aménagement par l'employeur des fonctions assumées par le salarié conformément aux prescriptions du médecin du travail, c'est à tort que la cour d'appel fait peser à la charge de l'employeur une obligation générale de mutation sur un autre poste ; qu'en ignorant ainsi les facultés d'aménagement ouvertes à l'employeur par l'article L. 122-32-5 du Code du travail, la cour d'appel a violé ce texte par fausse interprétation ; d'autre part, qu'en l'état du différend opposant le salarié à son employeur sur la portée de l'aménagement du poste de travail litigieux et de l'absence d'avis négatif tant du médecin du travail que de l'inspecteur du travail consultés, la cour d'appel ne pouvait fonder exclusivement sa décision sur un constat d'huissier dont elle reconnaissait le caractère inopérant, sans priver son arrêt de toute base légale au regard de l'article L. 122-32-5 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté, pour décider que l'employeur avait manqué à l'obligation de reclassement prévue à l'article L. 122-32-5 du Code du travail, que le changement de poste, dont se prévalait l'employeur pour justifier du reclassement du salarié, avait été effectué à la suite du premier accident du travail et que malgré les avis d'inaptitude délivrés par le médecin du travail au poste occupé par le salarié au moment du second accident, l'employeur avait maintenu l'intéressé sur ce poste dont elle a souverainement estimé qu'il n'était pas adapté aux prescriptions non contestées de la médecine du travail ; qu'en l'état de ses constatations, elle a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi n° V 96-42.584 :

Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié des sommes à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires, au titre de congés payés y afférents et à titre de rappel sur l'indemnité de frais professionnels, alors, selon le moyen, que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'au cas présent, la société le Moulin de la Vierge avait fait valoir dans ses conclusions d'appel que la demande de M. X... de rappel d'heures supplémentaires était incontestablement injustifiée, en l'état de la prime mensuelle compensant les rares dépassements horaires du salarié qui bénéficiait par ailleurs d'un coefficient supérieur au regard de ses fonctions et qui était régulièrement absent ou en arrêt maladie ; que la cour d'appel, qui a refusé de s'expliquer sur ce moyen pourtant déterminant pour la solution du litige, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, appréciant les éléments de preuve produits par les parties et répondant par-là même aux conclusions prétendument délaissées, a constaté que le salarié qui avait vu la prime habituellement servie supprimée sans qu'il en ait été au préalable averti, justifiait de l'accomplissement des heures supplémentaires dont il réclamait le paiement ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° A 96-45.303 :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 26 septembre 1996) de l'avoir, au vu du prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail le liant à M. X..., condamné à payer sur le fondement des articles L. 122-32-6 et L. 122-32-7 du Code du travail différentes sommes à titre d'une indemnité compensatrice de préavis, de congés payés, d'indemnité de licenciement et à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, d'une part, que la résiliation judiciaire d'un contrat de travail, lequel conformément à l'article L. 121-1 du Code du travail est soumis aux règles de droit commun, est admise par l'article L. 122-4 du Code du travail ; qu'ainsi, lorsqu'elle est demandée et accordée à un salarié, elle ne peut se traduire que par la cessation de la relation de travail et se doubler éventuellement et conformément à l'article 1184 du Code civil de l'attribution de dommages-intérêts pour réparer le préjudice qui a pu être subi du fait de l'inexécution contractuelle et de la perte de l'emploi ; qu'au cas présent, nonobstant le fait que la résiliation du contrat de travail avait été demandée par M. X... sur le fondement d'une inaptitude physique, la cour d'appel ne pouvait, comme elle l'a fait, appliquer à la résiliation judiciaire accordée à M. X... les règles indemnitaires spécifiques au licenciement pour inaptitude physique prévues par les articles L. 122-32-6 et L. 122-32-7 du Code du travail ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a faussement appliqué ces textes, en violation des articles L. 121-1 et L. 122-4 du Code du travail ; alors, d'autre part, et subsidiairement, qu'à supposer les articles L. 122-32-5 et suivants du Code du travail applicables, il résulte de l'article L. 122-32-7 de ce Code que la condamnation de l'employeur à une indemnité spécifique d'au moins 12 mois de salaire ne peut intervenir que si la réintégration du

salarié proposée par le juge est refusée par ce dernier ; que faute d'avoir procédé à une telle demande envers le salarié, la cour d'appel ne pouvait, sans violer les textes susvisés, prononcer la condamnation de l'employeur à l'indemnité prévue à l'article L. 122-32-7 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que la résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée à l'initiative du salarié et aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel n'est pas tenue de proposer la réintégration du salarié dont le contrat de travail est résilié pour manquement de l'employeur aux dispositions de l'article L. 122-32-5 du Code du travail ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Le Moulin de la Vierge aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Le Moulin de la Vierge à payer à M. X... la somme de 12 000 francs ;

Condamne la société Le Moulin de la Vierge à une amende civile de 5 000 francs envers le Trésor public ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-42584
Date de la décision : 13/10/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Résiliation - Résiliation judiciaire - Mêmes effets qu'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse - Réintégration devant être proposée (non).

CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Accident du travail - Reclassement - Obligations de l'employeur.


Références :

Code civil 1184
Code du travail L122-14-3 et L122-32-5

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (18e chambre, section C) 1996-03-14 1996-09-26


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 oct. 1998, pourvoi n°96-42584


Composition du Tribunal
Président : Président : M. MERLIN conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.42584
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