AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-huit août mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de Y... de MASSIAC, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Laurent , contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de PAU en date du 17 avril 1998, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises des HAUTES-PYRENEES sous l'accusation d'assassinat ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 221-1, 221-3 du Code pénal, 221 et 593 du Code de procédure pénal, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré qu'il existait contre Laurent Z... charges suffisantes d'homicide volontaire, commis avec préméditation ;
"aux motifs que Laurent Z... est la dernière personne à avoir vu Albert X... vivant, que les explications de Laurent Z... ont été changeantes au gré des éléments recueillis dans la procédure ;
qu'il est le seul à avoir mentionné la présence d'une arme sur les lieux ; que c'est lui qui a découvert une douille, ce qui laisse supposer qu'il en connaissait l'existence;
qu'il apparaît évident que c'est lui qui a tué Albert X...;
que la préméditation résulte du fait que Laurent Z... avait pris soin de se munir d'une arme, geste qui indique clairement qu'il avait, à l'avance, prévu de se débarrasser d'Albert X... pour lui voler les 15 kg de haschisch jamais retrouvés ;
"alors, d'une part, que la chambre d'accusation ne peut prononcer une mise en accusation pour un crime dont les éléments constitutifs résultent de simples déductions;
qu'en déduisant "l'évidence" de l'homicide commis par Laurent Z... sur la personne d'Albert X... du seul fait qu'il était la dernière personne à avoir vu la victime vivante, qu'il avait trouvé une douille lors du transport sur les lieux et qu'il avait changé dans ses explications, la chambre d'accusation n'a pas caractérisé des charges suffisantes d'homicide volontaire ;
"alors, d'autre part, qu'aucun élément du dossier n'établit que la déclaration de Laurent Z..., quant à l'existence d'une arme dans le véhicule d'Albert X..., était inexacte, ni que c'est lui qui avait amené l'arme du crime sur les lieux, qu'en déduisant des charges d'homicide volontaire du fait que Laurent Z... avait mentionné la présence d'une arme sur les lieux, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors, enfin, que le seul fait pour Laurent Z... - à supposer établi - de s'être muni d'une arme, au moment d'emmener Albert X... dans un endroit isolé en vue d'une transaction portant sur 15 kg de haschisch, est insuffisant pour établir que Laurent Z... avait, à l'avance, conçu le projet de tuer Albert X... en vue de lui voler la drogue;
qu'en déduisant la préméditation de ce seul élément, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre d'accusation, après avoir exposé les faits, a relevé l'existence de charges suffisantes contre Laurent Z... pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation d'assassinat ;
Que les chambres d'accusation apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction et la Cour de Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier, à supposer ces faits établis, si leur qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle le demandeur a été renvoyé;
que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Milleville conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. de Mordant de Massiac conseiller rapporteur, M. Martin, Mme Simon, M. Mistral conseillers de la chambre, Mme Batut, M. Sassoust conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Amiel ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;