AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller FARGE, les observations de la société civile professionnelle CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- B... Brahim, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 11 février 1998, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises des ALPES-MARITIMES, sous l'accusation d'assassinat et de tentative de ce crime ;
Vu les mémoires ampliatif et personnel produits ;
Sur la recevabilité du mémoire personnel :
Attendu que ce mémoire n'est pas recevable, dès lors que Brahim B..., qui se borne à solliciter sa mise en liberté, ne demande pas la cassation de l'arrêt attaqué ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 69, 201, 205, 591 et 593 du Code de procédure pénale et de l'article 6.2 d de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de base légale ;
"en ce que la chambre d'accusation a dit n'y avoir lieu à supplément d'information ;
"aux motifs que Brahim B... a demandé une nouvelle confrontation avec Saad Y...;
mais que cette confrontation aurait pour effet de prolonger l'instruction au-delà d'une durée raisonnable;
qu'en outre, Saad X... se trouverait actuellement en Algérie, ce qui rend impossible sa comparution;
qu'il ne paraît pas utile de retarder plus avant le jugement de l'affaire pour la réalisation d'un acte voué à l'échec, étant observé qu'il sera toujours possible de procéder à une confrontation lors des débats, si Saad X..., qui s'est constitué partie civile, se présente devant la cour d'assises;
que la demande de reconstitution ne pourrait être utile à la manifestation de la vérité qu'à la condition que toutes les personnes impliquées soient présentes;
qu'il apparaît que Saad X... est en Algérie et qu'il peut y avoir à craindre que Kamel D... et Hafid E..., qui ont bénéficié d'un non-lieu, soient absents;
qu'ainsi, une reconstitution en présence des seuls Brahim B..., Mimoun A..., Ali Z..., Céline C... et Moura Z... risque fort de ne pas apporter des éléments nouveaux déterminants et par contre retarderait là aussi le jugement de l'affaire ;
"alors, d'une part, que Brahim B... demandait, à titre principal, à être confronté à Kamel D..., et demandait, à titre éventuel, une confrontation entre les mis en cause ainsi qu'une autre reconstitution des faits;
qu'en rejetant ses demandes par une motivation concernant essentiellement Saad X... et des difficultés tenant à d'éventuelle reconstitution des faits, la chambre d'accusation a dénaturé des termes du litige ;
"alors, d'autre part, que le détenu à titre provisoire peut solliciter des actes d'instruction supplémentaires, sans que la durée raisonnable de sa détention provisoire puisse lui être opposée;
qu'en rejetant les demandes de confrontation et de reconstitution présentées par Brahim B..., aux motifs que l'instruction excéderait une durée raisonnable quand seul ce dernier pouvait se prévaloir d'une durée excessive de sa détention, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
"alors, enfin, que pour refuser d'ordonner des actes d'instruction concernant Saad X..., la chambre d'accusation a retenu "que ce dernier se trouverait actuellement en Algérie" (arrêt, page 18 2);
que, par ce motif hypothétique, la chambre d'accusation a privé sa décision de motif ;
"alors que, pour refuser d'ordonner des actes d'instruction concernant Kamel D... et Hafid E..., la chambre d'accusation a retenu qu'ils risquaient d'être absents dès lors qu'ils auraient bénéficié d'un non-lieu;
qu'en se déterminant par de tels motifs, sans indiquer pour quelle raison il aurait été impossible de contraindre ces individus à comparaître, la chambre d'accusation a privé sa décision de base légale ;
"alors, qu'enfin, la chambre d'accusation ne s'est nullement expliquée sur le fait que Kamel D... désirait lui-même être entendu afin de "soulager sa conscience" ainsi que cela résultait d'une lettre qu'il avait adressée au président de la chambre d'accusation du 30 décembre 1997 que le demandeur invoquait dans ses écritures;
qu'ainsi l'arrêt manque de motif" ;
Attendu qu'en prononçant par les motifs exactement reproduits au moyen, la chambre d'accusation a souverainement apprécié qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner le supplément d'information sollicité ;
Qu'ainsi, le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente et qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle Brahim B... a été renvoyé;
que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pinsseau conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Farge conseiller rapporteur, MM. Roman, Joly, Mme Mazars conseillers de la chambre, M. Poisot conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Lucas ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;