La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/07/1998 | FRANCE | N°97-82077

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 juillet 1998, 97-82077


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROMAN, les observations de Me Le PRADO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- de G... Claude,

- X... Christian,

- Z... Jean-Philippe,

- A... Jean-Pierre,

- B... Robert,

- C... Yves,

- E... Jean-Marie,>
- F... Jacky, prévenus,

- Y... Gérard,

- LA SOCIETE A... FRERES,

- LA SOCIETE CHUPIN ET COMPAGNIE,

- LA SOCIE...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROMAN, les observations de Me Le PRADO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- de G... Claude,

- X... Christian,

- Z... Jean-Philippe,

- A... Jean-Pierre,

- B... Robert,

- C... Yves,

- E... Jean-Marie,

- F... Jacky, prévenus,

- Y... Gérard,

- LA SOCIETE A... FRERES,

- LA SOCIETE CHUPIN ET COMPAGNIE,

- LA SOCIETE ETABLISSEMENTS MARTINEAU-AUBIN,

- LA SOCIETE C... PERE ET FILS,

- LA SOCIETE E... JEAN-MARIE,

- LA SOCIETE CHAUDRONNAISE DU BETAIL,

- LA SOCIETE D'EXPLOITATION ANDRE Z... ET FILS, parties civiles, contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en date du 13 mars 1997, qui a condamné, pour vol, Christian X..., Jean-Philippe Z..., Jean-Pierre A..., Robert B..., Yves C..., Jean-Marie E..., Jacky F..., chacun, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, et pour escroquerie et banqueroute Claude de G... à 18 mois d'emprisonnement avec sursis, a prononcé sur les intérêts civils relativement à ces infractions et a débouté les parties civiles de leurs demandes contre Yvonne D... après relaxe des chefs de complicité et recel d'escroquerie, banqueroute, usage d'un faux nom patronymique, tentative d'obtention indue d'une décision de justice, faux, usage de faux et complicité ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur le pourvoi des prévenus Christian X..., Jean-Philippe Z..., Jean-Pierre A..., Robert B..., Yves C..., Jean-Marie E..., Jacky H... et des parties civiles :

Attendu qu'aucun moyen de cassation n'est produit ;

II - Sur le pourvoi de Claude de G... :

Vu les mémoires ampliatif et additionnel produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 405 ancien du Code pénal, 313-1, 313-7 et 313-8 du nouveau Code pénal et 485 et 593 du Code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Claude de G... coupable d'escroquerie ;

"aux motifs qu'il est constant que Claude de G... a pris sa retraite le 1er avril 1991;

qu'il a indiqué que, malgré l'absence d'un gérant officiel, il voulait que l'activité de la SARL de G... se prolonge jusqu'à la fin de l'année 1991;

que la banque, ayant appris cette contradiction, avait restreint ses concours;

que, notamment, les autorisations d'escompte et d'ouverture de crédits avaient été suspendues, ce qui avait précipité le dépôt de bilan;

que le prévenu a traité avec les éleveurs en tant que représentant de la personne morale, au moins apparent, ce qui suffisait à engager celle-ci, laquelle n'aurait pu opposer aux vendeurs la démission de son gérant, pas plus que l'incompatibilité entre l'attribution d'une pension de vieillesse et le maintien d'un lien professionnel avec l'employeur, ces circonstances n'ayant pas ou n'ayant pu être connues des co-contractants;

qu'il ressort des documents comptables versés aux débats et des renseignements fournis par le comptable de l'entreprise, le mandataire liquidateur et Claude de G... que la SARL de G..., créée en 1985 au capital social de 50 000 francs, était déficitaire depuis 1989 en raison de faibles marges bénéficiaires, que son état de cessation des paiements était virtuel, qu'au 31 décembre 1990 elle accusait un résultat négatif de 404 800 francs;

que les difficultés de trésorerie se sont aggravées à partir du 1er avril 1991, la banque ayant refusé de continuer son soutien en l'absence d'un gérant officiel, aux dires mêmes du prévenu;

que, malgré la conscience par lui de cette situation obérée, Claude de G... a traité avec les vendeurs de bétail pour plus de 770 000 francs en l'espace d'un mois et demi;

que, pour faire face à ses engagements, il ne disposait ni de liquidités suffisantes sur le compte courant de la société - créditeur de seulement 60 871 francs au 14 avril 1991 -, des rejets de chèques ayant été par ailleurs portés à sa connaissance, ni de l'assurance qu'il pouvait rentrer des fonds nécessaires dans les délais de règlement que les éleveurs lui avaient accordés;

qu'aussi bien, le rapprochement de factures et de bulletins d'achats effectués par l'abattoir montre que, dans le courant du mois d'avril 1991, il revendait de nombreuses bêtes avec une perte d'un à plusieurs francs par kilogramme selon les cas, en dépit d'un déséquilibre chronique entre les marges de bénéfice et les frais généraux;

que le redressement, puis la liquidation judiciaire de la SARL, intervenaient très peu de temps après ces diverses opérations, le passif déclaré étant constitué pour l'essentiel par les créances des éleveurs;

que Claude de G... s'est acharné - ce qu'il admettait du reste - à vouloir prolonger à tort l'activité de l'entreprise, alors que cette dernière était réduite à une façade au mois d'avril 1991, ses promesses de règlement, dénuées de caractère sérieux, et sa tentative d'acquérir dix bêtes à un prix nettement supérieur au cours normal, ainsi qu'il était indiqué par l'un des vendeurs, corroborant son intention frauduleuse;

qu'en conséquence, il est établi, par la procédure et les débats, que le prévenu a commis le délit d'escroquerie par fausse entreprise ayant déterminé au préjudice de tiers la remise de biens, au sens des articles 405 et 313-1 de l'ancien et du nouveau Code pénal ;

"alors que le délit d'escroquerie est caractérisé par l'usage de manoeuvres frauduleuses ayant déterminé la remise de la chose ;

"alors, d'une part, qu'en retenant que Claude de G... avait commis le délit d'escroquerie par fausse entreprise, bien qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la SARL de G... avait une existence légale et qu'elle n'a été mise en liquidation judiciaire que le 31 mai 1991, la cour d'appel a entaché sa décision de contradiction ;

"alors, d'autre part, et en tout état de cause, que, même si l'on admettait que Claude de G... se soit présenté comme le représentant légal de la société, ce que l'arrêt ne constate pas, il ne se serait agi que d'un simple mensonge non susceptible de caractériser une manoeuvre frauduleuse;

qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision de culpabilité ;

"alors, encore, que le fait que Claude de G... se soit présenté comme le représentant apparent de la société ne saurait constituer l'usage d'une fausse qualité, dès lors qu'effectivement le prévenu agissait en qualité de gérant de fait de la société;

que la cour d'appel ne pouvait, en conséquence, considérer que le prévenu avait usé de fausse qualité ;

"alors, enfin, qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt que le comportement de Claude de G... a été déterminant de la remise de la chose, puisqu'au contraire, les vendeurs avaient bien conscience de ce qu'ils traitaient avec la SARL de G..." ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 196, 197-1, 198 et 200 de la loi du 25 janvier 1985, 485 et 593 du Code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Claude de G... coupable du délit de banqueroute ;

"aux motifs que Claude de G... a reconnu avoir vendu des bovins à perte, notamment dans la période ayant précédé le redressement judiciaire, ajoutant :".... j'ai sans doute eu tort de vouloir poursuivre mon activité, de m'être acharné, mais je voulais terminer, comme je me l'étais fixé, à la fin de l'année 1991...";

qu'il soutient, au vu d'une attestation d'un directeur d'abattoir, que le prix des animaux réglé à la SARL de G... se faisait en fonction de la "grille EUROPA" ;

que le classement et le prix de chaque bovin était déterminé par le responsable des achats;

que le prévenu, rompu au négoce du bétail depuis 1975 et parfaitement avisé de la valeur d'une bête à l'achat et à la vente, était en mesure de discuter le prix, alors qu'en la matière il n'existait aucune obligation et qu'il avait le loisir de s'adresser à des acheteurs autres que celui ayant attesté, l'existence d'un monopole ou d'une relation d'exclusivité n'étant ni démontrée, ni même alléguée ;

qu'il est établi que l'intéressé a employé sciemment un moyen ruineux pour se procurer des fonds en vue d'éviter ou de retarder l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, d'autant que, même à un cours normal, les marges bénéficiaires produites par les opérations de revente étaient trop faibles ;

"alors qu'est coupable de banqueroute la personne qui, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, a employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds;

qu'ayant constaté qu'un directeur d'abattoir avait attesté que le prix des animaux réglé à la SARL de G... se faisait en fonction de la "grille EUROPA" et que le classement des animaux était déterminé par le responsable des achats, d'où il s'évince que Claude de G... n'était pas libre de fixer le prix des animaux vendus, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, juger que le prévenu avait sciemment vendu à perte des animaux;

qu'elle a, en conséquence, violé les textes visés au moyen" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, les délits d'escroquerie et de banqueroute dont elle a déclaré le prévenu coupable, et ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice découlant de ces infractions ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pinsseau conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Roman conseiller rapporteur, MM. Joly, Farge, Mme Mazars conseillers de la chambre, M. Poisot conseiller référendaire ;

Avocat général : M. Lucas ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-82077
Date de la décision : 21/07/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre, 13 mars 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 jui. 1998, pourvoi n°97-82077


Composition du Tribunal
Président : Président : M. PINSSEAU conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.82077
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award