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15/07/1998 | FRANCE | N°96-40877

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 juillet 1998, 96-40877


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Félix X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 9 novembre 1995 par la cour d'appel d'Amiens (5ème chambre sociale), au profit de la société Château de Bellinglise, société anonyme, dont le siège est : 60157 Elincourt-Sainte-Marguerite, défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 3 juin 1998, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Brissier, conseiller r

apporteur, Mme Lemoine-Jeanjean, conseiller, M. Besson, conseiller référendaire, M...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Félix X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 9 novembre 1995 par la cour d'appel d'Amiens (5ème chambre sociale), au profit de la société Château de Bellinglise, société anonyme, dont le siège est : 60157 Elincourt-Sainte-Marguerite, défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 3 juin 1998, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Brissier, conseiller rapporteur, Mme Lemoine-Jeanjean, conseiller, M. Besson, conseiller référendaire, M. Martin, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Brissier, conseiller, les observations de Me Blondel, avocat de la société Château de Bellinglise, les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche et le second moyen réunis :

Vu les articles 2044 du Code civil et L. 122-14, L. 122-14-7 et L. 122-14-2 du Code du travail ;

Attendu que, selon l'arrêt attaqué, M. X... a été engagé en qualité de maître d'hôtel le 18 décembre 1990 par la société Chateau de Bellinglise;

que, par lettre du 16 juin 1993, il a été convoqué pour un entretien préalable en vue d'un licenciement;

que le salarié a remis le 22 juin 1993 une lettre à son employeur ainsi rédigé : "Je ne ferai aucun recours vis-à-vis du Chateau de Bellinglise devant la cour des prud'hommes et de justice. J'accepte à ce jour le solde de tout compte pour le motif de licenciement pour faute grave avec valeur transactionnelle".;

que le salarié a été licencié par lettre du 24 juin 1993 pour faute grave;

que le reçu pour solde de tout compte adressé le 30 juin 1993 au salarié fait mention du paiement d'une "indemnité transactionnelle" de 12 000 francs;

que le salarié a saisi le conseil de prud'hommes pour obtenir notamment le paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;

Attendu que pour rejeter les demandes du salarié, l'arrêt énonce que ce dernier a écrit de sa main, signé et remis à son employeur le 22 juin 1993 la lettre précitée;

que ce document signé à un moment où le principe de la rupture du contrat de travail était acquis entre les parties, a pour objet de mettre fin à un litige en relation avec les griefs reprochés et leurs conséquences et contient une volonté affirmée de transiger et des concessions réciproques;

qu'il apparaît, en effet, que, d'une part, M. X... a accepté son licenciement et les griefs s'y référant et, d'autre part, que l'employeur a renoncé à se prévaloir du motif précis du licenciement "harcèlement sexuel" pour ne faire état que d'un licenciement pour faute grave;

que cet engagement de l'employeur a d'ailleurs été respecté lors de l'envoi de la lettre de licenciement;

que cette renonciation constituait de la part de l'employeur une véritable concession alors qu'il est constant qu'une lettre de licenciement insuffisamment motivée expose son auteur aux conséquences légales liées à la violation de l'article L. 122-14-2 du Code du travail;

qu'il s'avère de plus que les parties ont discuté le solde de tout compte puisque M. X... l'a accepté dans la lettre susvisée et que l'employeur a, en conséquence, régulièrement fait mention, dans le solde de tout compte remis le 30 juin 1993, d'une indemnité transactionnelle de 12 000 francs;

qu'il apparaît, au vu de l'ensemble de ces éléments, qu'une transaction est bien intervenue entre les parties afin de mettre un terme au litige résultant de la rupture du contrat de travail par l'employeur ;

qu'une telle transaction a autorité de chose jugée entre les parties et qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de M. X...;

qu'en tout état de cause, ce dernier ne pourrait valablement arguer de l'insuffisante motivation de la lettre de licenciement, alors qu'il est constant que cette imprécision correspondait exclusivement à la volonté expresse de M. X... de ne pas voir mentionner dans cette lettre un motif plus compromettant;

que les attestations produites par l'employeur émanant de salariées (Mmes Y..., Colin, Sikon) corroborent par ailleurs le "comportement injurieux" de M. X... à l'égard de certaines employées le trouble grave en résultent rendant impossible la continuation du contrat de travail pendant la durée du préavis ;

Attendu, cependant, d'abord, qu'une transaction ne peut être valablement conclue qu'une fois la rupture du contrat de travail devenue définitive par la réception, par le salarié, de la lettre de licenciement dans les conditions requises par l'article L. 122-14-1 du Code du travail, en sorte qu'est nul l'acte du 22 juin 1993, par lequel, selon les constatations de la cour d'appel, le salarié a reconnu le bien-fondé de son licenciement pour faute grave avant que celui-ci n'ait été prononcé par lettre du 24 juin 1993 ;

Attendu, ensuite, que le reçu pour solde de tout compte, établi en exécution d'une transaction nulle, est privé d'effet libératoire ;

Attendu, enfin, qu'en l'absence de motif énoncé dans la lettre de licenciement, ce dernier est sans cause réelle et sérieuse ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième branches du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;

Condamne la société Château de Bellinglise aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-40877
Date de la décision : 15/07/1998
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Rupture par les parties - Transaction - Acte antérieur au licenciement - Nullité.


Références :

Code du travail L122-14-1 et L122-14-2

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens (5ème chambre sociale), 09 novembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 jui. 1998, pourvoi n°96-40877


Composition du Tribunal
Président : Président : M. MERLIN conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.40877
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