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08/07/1998 | FRANCE | N°96-17709

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 08 juillet 1998, 96-17709


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Odilon A...,

2°/ Mme Martine A..., demeurant ensemble ..., en cassation d'un arrêt rendu le 2 mai 1996 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre, section C), au profit :

1°/ de Mme Françoise Y... épouse Z..., domiciliée ...,

2°/ de la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes (MATMUT), dont le siège est ...,

3°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Montpellier, dont le siège

est ..., défenderesses à la cassation ;

La MATMUT a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;
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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Odilon A...,

2°/ Mme Martine A..., demeurant ensemble ..., en cassation d'un arrêt rendu le 2 mai 1996 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre, section C), au profit :

1°/ de Mme Françoise Y... épouse Z..., domiciliée ...,

2°/ de la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes (MATMUT), dont le siège est ...,

3°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Montpellier, dont le siège est ..., défenderesses à la cassation ;

La MATMUT a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi principal, invoquent à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi provoqué, invoque à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 10 juin 1998, où étaient présents : M. Chevreau, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Dorly, conseiller rapporteur, M. Guerder, conseiller faisant fonctions de doyen, M. Kessous, avocat général, Mme Guénée-Sourie, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Dorly, conseiller, les observations de SCP Tiffreau, avocat des époux A..., de la SCP Boré et Xavier, avocat de la MATMUT, de Me de Nervo, avocat de Mme Z..., les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 2 mai 1996), que Mme Z..., qui s'était suspendue à une barre de traction fixée à une porte au domicile des époux A..., est tombée et s'est blessée;

qu'elle a demandé réparation de son préjudice aux époux A... et à leur assureur, la MATMUT ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le premier moyen du pourvoi provoqué réunis :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable et fondée la demande contre les époux A..., alors, selon le moyen, que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention;

que tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt, qu'outre, qu'elle a effectué de son propre chef deux déclarations inexactes à son propre assureur, Mme Z... a effectué d'un commun accord avec Mme A... une déclaration inexacte à l'assureur de celle-ci, ce qui a entraîné la déchéance de la garantie, laissant ainsi à la seule charge des époux A... l'entière réparation du dommage;

qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 31 du nouveau Code de procédure civile, que, le fait de la chose postule que celle-ci ait été l'instrument du dommage, ce qu'exclut son rôle purement passif;

qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations opérées par la cour d'appel que la barre de traction, installée normalement, ne serait pas tombée, si la porte qui en retenait la fixation n'avait pas été l'objet d'une "ouverture inexpliquée" (v. arrêt infirmatif attaqué, p. 13, al. 6) ;

que par suite, les circonstances exactes étaient demeurées inconnues;

que dès lors, en retenant la responsabilité des époux A..., la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil;

que l'attribution de la garde de la chose, dont est allégué le rôle causal dans la survenance du dommage invoqué, postule l'exercice sur celle-ci des pouvoirs d'usage, de direction et de contrôle;

que tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la barre de traction avait été installée par son propriétaire devant ceux qui souhaitaient en user, dont Mme Z..., qui avait eu le pouvoir de ne pas y procéder mais en avait usé à sa propre demande et librement, sans s'être assurée par elle-même ou le propriétaire, que la solidité de la barre de traction était telle qu'elle pouvait s'y suspendre sans danger;

qu'en décidant le contraire, au motif erroné et au surplus inopérant "qu'aucun des utilisateurs n'avait, compte tenu du mode d'utilisation l'un après l'autre, la possibilité de prévenir la survenance du dommage par toute vérification appropriée ou anticipation sur le comportement de l'ensemble formé par la porte et la barre qui constituait la chose", la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil;

que, au surplus, celui qui se livre à une activité ludique, dont il connaît les risques, est réputé avoir renoncé à invoquer la responsabilité de plein droit du fait des choses;

que, dès lors qu'elle constatait que Mme Z... avait demandé à se prêter à cette activité ludique de se suspendre à une barre de traction prêtée à usage par le propriétaire de celle-ci, la cour d'appel aurait dû rechercher si l'usagère n'avait pas connu et accepté les risques y afférents;

que, par suite, en omettant de procéder à cette recherche, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 1er du code civil;

que la responsabilité du gardien de la chose ne peut être engagée qu'autant que celle-ci a été la cause directe et exclusive du dommage invoqué;

qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu l'existence d'un tel lien au vu du seul rapport du confrère et expert médical officieux de Mme Z..., le docteur X... Mollet;

qu'outre, que la cour d'appel a déclaré que ce rapport "n'est pas opposable aux époux A..." (arrêt infirmatif attaqué, p. 14, in fine), l'expert officieux a relevé que le radiologue Claret consulté le lendemain de la chute avait constaté l'absence "d'anomalie post-traumatique" et la présence d'une "discopathie antérieure témoignant de contraintes mécaniques pré-existantes";

que Mme Z... avait la charge de prouver, sans estimer nécessaire une expertise médicale judiciaire contradictoire, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Mais attendu que, les époux A... n'ayant pas soutenu que Mme Z... avait accepté des risques, le grief visé à la quatrième branche du moyen est nouveau et, mélangé de fait et de droit ;

Et attendu qu'après avoir énoncé à bon droit que la règle nemo auditur ne s'applique pas en matière délictuelle l'arrêt retient que le 2 janvier 1991 M. A... a permis à chacun de ses invités d'essayer à tour de rôle la barre de traction qu'il avait fixée à une porte par des lanières, qu'aucun des utilisateurs n'avait la possibilité de procéder à des vérifications sur l'installation, et que la porte s'est ouverte d'une manière inexpliquée, provoquant la chute de Mme Z..., dont les jambes étaient à l'équerre, et un traumatisme dans les régions lombo-fessière et vertébrale ;

Que, de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a décidé à bon droit que Mme Z... n'était pas privée d'intérêt légitime à agir, et justifiant légalement sa décision, a pu déduire que les époux A... étaient restés gardien de l'installation et devaient réparation du préjudice subi par Mme Z... ;

D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen du pourvoi provoqué :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande, alors, selon le moyen, que l'usager de la chose commet une faute en négligeant de veiller à sa propre sécurité, exonérant ainsi partiellement le gardien de la chose de la présomption de responsabilité qui pèse sur lui;

en° condamnant le gardien de la chose sans rechercher si Mme Z... qui a usé à sa propre demande et librement de la barre de traction n'avait pas commis de faute en s'abstenant de s'assurer que la solidité de ce matériel était telle qu'elle pourrait s'y suspendre sans danger, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 du Code civil ;

Mais attendu que, la MATMUT n'ayant pas soutenu que la victime avait commis une faute, le grief est nouveau, que, mélangé de fait et de droit, il est, partant irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et provoqué ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme Z... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 96-17709
Date de la décision : 08/07/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

(Sur le pourvoi principal) RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI-DELICTUELLE - Choses dont on a la garde - Garde - Gardien - Installateur d'une barre de traction fixée à une porte - Barre permettant d'effectuer des mouvements de gymnastique - Chute d'un utilisateur qui s'est blessé.


Références :

Code civil 1384 al. 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier (1re chambre, section C), 02 mai 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 08 jui. 1998, pourvoi n°96-17709


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CHEVREAU conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.17709
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