AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Diffusal, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., en cassation d'un jugement rendu le 14 décembre 1995 par le conseil de prud'hommes de Strasbourg (section activités diverses), au profit de M. Hossein Y...
X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 mai 1998, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Lanquetin, conseiller rapporteur, M. Texier, conseiller, Mme Bourgeot, M. Richard de la Tour, Mme Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. Terrail, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Lanquetin, conseiller, les observations de la SCP Lesourd, avocat de la société Diffusal, les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. Sabet X..., embauché en 1987 comme distributeur de journaux par la société Diffusal, a été mis à pied puis licencié pour faute grave par lettre du 4 octobre 1994;
qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que la société fait grief au jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Strasbourg, 14 décembre 1995) d'avoir décidé que les faits reprochés à M. Sabet X..., à l'appui de son licenciement, constituaient une cause réelle et sérieuse mais non une faute grave, et d'avoir, en conséquence, condamné la société Diffusal à payer des indemnités de préavis et de licenciement, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en s'abstenant de préciser les faits invoqués dans la lettre de licenciement à l'appui de celui-ci et de les examiner, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail;
alors, d'autre part, que le fait pour un salarié d'avoir sciemment enfreint des instructions formelles de son employeur et de s'être fait remplacer dans ses fonctions par une personne extérieure à l'entreprise sans l'en avertir, l'exposant à des condamnations pénales pour travail clandestin, constitue en lui-même une faute grave, rendant impossible la poursuite du contrat de travail pendant la durée du préavis, peu important l'ancienneté du salarié et l'absence de tout reproche antérieur;
qu'en énonçant que le fait que M. Sabet X... ait régulièrement travaillé pendant sept ans pour la société Diffusal sans avertissement atténuait la faute commise, excluant que la qualification de faute grave fût retenue, le conseil de prud'hommes a violé les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail ;
Mais attendu que le conseil de prud'hommes, qui a constaté que M. Sabet X... était un salarié ancien qui n'avait jamais été sanctionné, a pu décider que son comportement n'était pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis et ne constituait pas une faute grave;
que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Diffusal aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.