Reçoit La Poste en son intervention à l'appui des prétentions de la compagnie nationale Air France ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 5 avril 1991, M. Y..., M. X... et le bureau d'études techniques Atelier 3 (les expéditeurs), candidats à un concours d'architecture organisé par le territoire des îles Wallis et Futuna, ont chargé La Poste d'acheminer par voie aérienne un colis contenant des documents destinés au jury de ce concours ; que ce colis, qui devait être livré le 16 avril 1991 au plus tard, a été confié, le 9 avril 1991, par La Poste à la compagnie UTA, aux droits de laquelle se trouve la compagnie nationale Air France ; que la livraison n'étant intervenue que le 23 avril 1991, les expéditeurs dont la candidature n'a pu de ce fait être examinée, ont demandé la réparation de leur préjudice au transporteur aérien ; que celui-ci a invoqué l'exonération de responsabilité prévue par l'article L. 13 du Code des postes et télécommunications ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 13 du Code des postes et télécommunications ;
Attendu que les dispositions exonératoires de responsabilité prévues par ce texte ne s'imposent que dans le cas où La Poste, ou le transporteur que celle-ci s'est substitué, n'a commis aucune faute lourde dans l'exécution de sa mission ;
Attendu que, pour exonérer le transporteur de toute responsabilité, l'arrêt retient, qu'à supposer qu'il ait commis une faute lourde à l'origine du retard à la livraison du colis, une telle faute n'est pas de nature à faire échec à l'exonération de responsabilité prévue par l'article L. 13 du Code des postes et télécommunications ;
Attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1150 du Code civil, ensemble l'article L. 13 du Code des postes et télécommunications ;
Attendu que l'arrêt retient que la cause du non-embarquement du colis sur le vol UTA 566 du 10 avril 1991 demeurant indéterminée, il ne peut être reproché au transporteur d'avoir commis une faute lourde dans l'exécution du transport dont il s'était chargé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le colis avant d'être expédié avait été conservé 12 jours par la compagnie aérienne qui n'a pu expliquer les causes de ce retard, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 décembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.
MOYEN ANNEXE
Moyen produit par M. Blanc, avocat aux Conseils pour MM. Y... et X... et la société Bureau d'études techniques Atelier 3.
MOYEN DE CASSATION :
IL EST REPROCHÉ à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. Y..., M. X... et le bureau d'études Atelier 3 de leur demande d'indemnisation du préjudice que leur a fait subir la compagnie UTA, aux droits de laquelle se trouve la compagnie Air France, en gardant sans l'acheminer pendant 10 jours le colis contenant les plans pour un concours d'architecture, à l'origine de leur échec à ce concours ;
AUX MOTIFS QUE la responsabilité du transporteur que La Poste s'était substitué pour l'exécution du service public ne pouvait être recherchée que sur le fondement de la réglementation postale ; qu'en vertu de l'article L. 13 du Code des postes et télécommunications l'administration postale n'encourait aucune responsabilité en cas de retard dans la distribution des colis qui lui étaient confiés ; que l'erreur d'acheminement à l'origine du retard, commise au cours de la phase concédée à la compagnie UTA, consistait en l'inobservation par celle-ci des instructions données par les services postaux ; que l'exonération légale dont bénéficiait le transporteur substitué n'était pas exclue par la commission par celui-ci d'une faute lourde, la cause du non-embarquement du colis sur le vol UTA 566 demeurant indéterminée ; qu'une telle faute, à la supposer établie, ne serait pas de nature à faire échec à l'exonération de responsabilité ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'exonération légale de responsabilité dont bénéficie La Poste en cas de retard dans l'acheminement des colis est exclue en cas de faute lourde ; qu'en considérant que le transporteur que l'administration postale s'est substitué pour l'acheminement du courrier n'encourait aucune responsabilité, même en cas de faute lourde, la cour d'appel a violé l'article L. 13 du Code des postes et télécommunications ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'est constitutive d'une faute lourde la négligence d'une particulière gravité du transporteur qui dénote son inaptitude à accomplir la mission dont il était chargé ; qu'en considérant que la compagnie UTA, qui avait conservé pendant plus de 10 jours le colis à elle confié sans l'expédier, n'avait pas commis de faute lourde, après avoir elle-même constaté que la compagnie aérienne n'avait pas observé les instructions que lui avaient données les services postaux, la cour d'appel a violé l'article 1150 du Code civil.