Attendu, selon l'arrêt déféré (Reims, 8 mars 1995), que la société Sogécomi, aux droits de laquelle se trouve la société Généfim, s'est engagée à donner en location à la société d'exploitation hôtelière
Y...
(la société) un ensemble immobilier à usage hôtelier en état de futur achèvement, acheté à la société Fimotel ; que MM. Charles et Robert Y... se sont portés, envers le crédit-bailleur, cautions solidaires des obligations de la société, à concurrence de 4 500 000 francs ; que le contrat de crédit-bail ayant été résilié et la société mise en liquidation judiciaire, la société Généfim a assigné les cautions en exécution de leurs engagements ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la société Généfim reproche à l'arrêt de l'avoir déboutée de son action contre M. Charles Y... alors, selon le pourvoi, d'une part, que, lorsque la caution est le dirigeant de la société cautionnée, elle a, sauf circonstances particulières, une parfaite connaissance de la situation de l'entreprise au moment où elle s'en porte caution ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que M. Charles Y... était cogérant et co-associé de la société cautionnée ; qu'en décidant toutefois que la société crédit-bailleresse était tenue d'informer la caution, laquelle n'a invoqué aucune circonstance particulière de nature à justifier une telle obligation, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; alors, d'autre part, que le crédit-bail n'est pas une opération de crédit destinée à l'acquisition d'un immeuble mais une location ; qu'en assimilant l'obligation d'information du crédit-bailleur à l'égard de la caution à celle d'un établissement de crédit, tandis qu'il résultait des documents contractuels que le montage financier de l'opération avait été assuré par le franchiseur, auteur d'une étude remise à la société franchisée dont les gérants étaient cautions, la cour d'appel a méconnu l'économie du contrat de crédit-bail, en violation de l'article 1134 du Code civil ; et alors, enfin que, pour décider que le projet cautionné par MM. Y... n'était pas viable, ce que la société Généfim ne pouvait ignorer, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur le rapport d'expertise de M. X..., pourtant inopposable à la crédit-bailleresse, qui n'était pas partie aux opérations d'expertise diligentées à l'occasion d'une autre instance ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions signifiées le 4 novembre 1994, dans lesquelles la société Généfim faisait valoir que le montage financier du projet n'avait pas été réalisé par ses services mais lui avait été présenté par MM. Y... qui en étaient les initiateurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'investissement immobilier nécessaire à la réalisation de l'hôtel, soit plus de 21 500 000 francs, a été financé intégralement au moyen du crédit-bail litigieux, dont les charges de remboursement représentaient 43 % du chiffre d'affaires HT pour les années d'exploitation 1989 et 1990 et qu'en l'absence d'apport par MM. Y... de fonds propres suffisants, le versement des loyers dus à la société Généfim générait nécessairement un déficit chronique très important, de sorte que l'opération cautionnée n'était économiquement pas viable, la société étant dès l'origine en état de cessation des paiements ; qu'il retient encore que la société Généfim est une société spécialisée et disposait de tous les paramètres d'appréciation nécessaires à l'évaluation de l'opération financée tandis que MM. Y... n'étaient des professionnels ni de la finance, ni de l'hôtellerie ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu estimer, peu important l'auteur du montage financier, que la société Généfim, qui ne pouvait ignorer l'absence totale de viabilité de l'opération, a commis une faute en sollicitant le cautionnement de MM. Y... et en les incitant à se méprendre sur les risques réels de leur engagement ; qu'ainsi la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Généfim reproche encore à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande dirigée contre le mandataire-liquidateur de la liquidation judiciaire de M. Robert Y..., alors, selon le pourvoi, que constitue une faute de nature à engager sa responsabilité, la dissimulation volontaire de son état de liquidation judiciaire par une caution, survenu lors de l'instance introduite par le crédit-bailleur en exécution de l'engagement de caution ; que la cour d'appel a constaté que, par son comportement fautif, qui a consisté à dissimuler à la société Généfim la procédure de liquidation judiciaire dont il était l'objet, M. Robert Y... avait empêché cette société de déclarer sa créance et d'agir en relevé de forclusion, de sorte que la créance était éteinte ; qu'en refusant toutefois de retenir sa responsabilité à l'égard du créancier, la société Généfim, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu, dès lors que les jugements ouvrant une procédure collective sont publiés, que M. Robert Y..., mis en liquidation judiciaire en cours d'instance, n'avait pas l'obligation d'en informer la société Généfim ; que c'est donc à bon droit que l'arrêt retient que les allégations de la société Généfim ne sauraient remettre en question les conséquences de l'extinction de la créance ; que le moyen est sans fondement ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.