AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Alice Y..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 12 mai 1995 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale), au profit de la société SAGEC, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 mai 1998, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Soury, conseiller référendaire rapporteur, M. Brissier, Mme Lemoine-Jeanjean, conseillers, Mmes Bourgeot, Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. Joinet, premier avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Soury, conseiller référendaire, les observations de Me Hennuyer, avocat de Mme Y..., les conclusions de M. Joinet, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 122-17 du Code du travail ;
Attendu que Mme X... a été engagée par la Société Aquitaine de gestion et de commercialisation (SAGEC) le 17 mai 1991 en qualité d'attachée commerciale;
qu'elle a été licenciée pour insuffisance de résultat par lettre recommandée du 4 novembre 1991;
qu'elle a signé, le 4 décembre suivant un reçu pour solde de tout compte;
qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande, l'arrêt attaqué, après avoir retenu que celle-ci ne se trouvait plus sous la dépendance de son employeur au moment de la signature du reçu pour solde de tout compte, énonce qu'en signant ce reçu d'une certaine somme en paiement des salaires, accessoires de salaires, remboursement de frais et de toutes indemnités, quelle qu'en soit la nature, dus au titre de l'exécution et de la cessation du contrat de travail, la salariée avait nécessairement envisagé les dommages-intérêts auxquels aurait pu lui donner droit la rupture de son contrat;
que le reçu, établi dans les formes prescrites par l'article L. 122-17 du Code du travail, n'a pas été dénoncé dans le délai de 2 mois prévu par ce texte ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le soutenait la salariée dans ses conclusions demeurées sans réponse, son employeur lui avait versé des sommes postérieurement à la signature du reçu pour solde de tout compte, ce qui aurait fait perdre à celui-ci, qui était rédigé en termes généraux, tout effet libératoire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 mai 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau ;
Condamne la société SAGEC aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.