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16/06/1998 | FRANCE | N°96-30175

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 juin 1998, 96-30175


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. André Y..., domicilié ... et exerçant son activité professionnelle au ..., en cassation d'une ordonnance rendue le 24 juin 1996 par le président du tribunal de grande instance de Bobigny, au profit du directeur général des Impôts, domicilié ..., défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publiq

ue du 5 mai 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Mouillard, conseiller ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. André Y..., domicilié ... et exerçant son activité professionnelle au ..., en cassation d'une ordonnance rendue le 24 juin 1996 par le président du tribunal de grande instance de Bobigny, au profit du directeur général des Impôts, domicilié ..., défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 5 mai 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Mouillard, conseiller référendaire rapporteur, MM. Nicot, Vigneron, Leclercq, Dumas, Léonnet, Poullain, Métivet, conseillers, MM. Huglo, Ponsot, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Mouillard, conseiller référendaire, les observations de Me Roger, avocat de M. Y..., de Me Foussard, avocat du directeur général des Impôts, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que, par ordonnance du 24 juin 1996, le président du tribunal de grande instance de Bobigny a autorisé des agents de l'administration des Impôts, en vertu de l'article L.16B du Livre des procédures fiscales, à effectuer une visite et des saisies des documents dans les locaux professionnels de M. André Y..., ..., Le Blanc Mesnil, en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de ce dernier ;

Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :

Attendu que la déclaration de pourvoi a été formalisée par "M. X..., avocat au barreau de Bobigny, agissant pour la SCP Charrière-Bournazel-Champetier de Ribes-Spitzer, avocats, qui, au nom de M. André Y...... a déclaré se pourvoir en cassation..." ;

Attendu que le directeur général des Impôts fait valoir que, faute par M. X... d'avoir annexé à cette déclaration le mandat donné par M. Y... à la SCP Charrière-Bournazel-Champetier de Ribes-Spitzer, qui aurait permis de déterminer les pouvoirs conférés à cette dernière, le pourvoi est irrecevable ;

Mais attendu que répond aux exigences de l'article 576 du Code de procédure pénale la déclaration de pourvoi faite par un avocat du barreau du Tribunal, ayant autorisé la visite et saisie domiciliaires, sans que le pouvoir donné par ailleurs à un autre avocat puisse lui retirer sa qualité de mandataire dispensé de produire un pouvoir spécial;

que le pourvoi est recevable ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. André Y... fait grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite domiciliaire alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'article L.16 B du Livre des procédures fiscales dispose que l'autorité judiciaire est saisie par l'administration Fiscale et que le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée;

qu'en l'absence de toute requête dans le dossier de procédure, la Cour de Cassation n'est pas mise en mesure de vérifier si le magistrat a été saisi dans les conditions prévues par l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales;

alors, d'autre part, que l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales dispose que l'autorité judiciaire peut autoriser les agents des Impôts à effectuer des visites et saisies;

que l'ordonnance les autorisant doit être conforme également aux exigences des articles 494 et 495 du nouveau Code de procédure civile;

qu'en s'abstenant de joindre le texte de la requête qu'il se borne à viser en tête de l'ordonnance, le magistrat n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer le contrôle de légalité ;

Mais attendu que l'ordonnance autorisant des visites ou des saisies doit faire preuve par elle-même de sa régularité;

qu'il s'ensuit que les griefs pris de l'absence prétendue de requête au dossier sont inopérants;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Y... fait aussi grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite sollicitée alors, selon le pourvoi, que le magistrat, qui a retenu pour fonder l'existence des présomptions des documents relatifs à des périodes ou à des exercices manifestement prescrits, a violé les articles L. 613 et L. 170 du Livre des procédures fiscales qui garantissent le droit à la prescription ;

Mais attendu que si les textes visés au moyen ne permettent pas au juge d'autoriser une visite domiciliaire en vue de rapporter la preuve d'agissements couverts par la prescription, ils ne lui interdisent pas de retenir, comme éléments de présomption de faits non prescrits, des documents datant de plus de trois ans;

que le moyen est inopérant ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. Y... fait aussi grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite alors, selon le pourvoi, qu'en se fondant sur des copies de documents obtenus au moyen de visites et saisies, ayant pour objet la recherche et la preuve d'agissements distincts de ceux visés dans la demande sur laquelle il statuait, sans fournir des indications suffisantes permettant de s'assurer qu'ils avaient été régulièrement saisis comme se rapportant aux agissements retenus dans les ordonnances antérieures, et sans indiquer au moyen de quelle procédure l'administration avait distrait les copies de documents des précédentes saisies pour les présenter à l'appui de sa requête, le président du Tribunal n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et n'a pas satisfait aux exigences de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu qu'ayant relevé que certains des documents présentés à l'appui de la requête étaient des copies de pièces obtenues au cours de visites domiciliaires précédemment effectuées chez des tiers, le président du Tribunal a vérifié que ces pièces avaient été régulièrement saisies, comme se rapportant aux agissements visés par la précédente ordonnance, qu'il a détaillés;

qu'en se déterminant ainsi, et dès lors que l'administration des Impôts peut mettre en oeuvre l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscale, en se fondant sur des éléments tirés d'une procédure concernant un autre contribuable, le président du Tribunal a procédé au contrôle qui lui incombait;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que M. Y... reproche à l'ordonnance d'avoir statué comme elle a fait alors, selon le pourvoi, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, les ingérences d'une autorité publique dans la vie privée et la correspondance d'une personne, doivent être prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique pour atteindre l'un des buts légitimes mentionnés par l'article 8, alinéa 2, de la Convention;

que les dispositions relatives au droit de communication n'autorisent pas de telles ingérences dont le but n'a pas été indiqué et qui sont, de toute manière, excessives dans une société démocratique;

qu'en se fondant ses présomptions sur des informations entachées d'une telle irrégularité, le magistrat a méconnu les exigences des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 16 B, L. 81, L. 83 et L. 85 du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu qu'en retenant que certaines des pièces produites par l'administration Fiscale à l'appui de sa requête, obtenues par elle dans l'exercice de son droit de communication auprès de France Telecom, étaient détenues de manière apparemment licite, le président du Tribunal a satisfait aux exigences de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, toute autre contestation relevant du contentieux dont peuvent être saisies les juridictions du fond;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Y... fait au surplus grief à l'ordonnance d'avoir ainsi statué alors, selon le pourvoi, d'une part, que nul ne peut être témoin dans sa propre cause;

que les copies dont les originaux n'ont pas été produits ont été certifiés conformes par un inspecteur des Impôts représentant d'une partie au litige;

qu'en fondant ses présomptions sur une attestation établie unilatéralement dans une procédure de surcroît non contradictoire, le magistrat n'a satisfait aux exigences ni de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, ni des principes de l'égalité des parties et du respect du contradictoire;

et alors, d'autre part, que par l'établissement d'une copie conforme, son auteur affirme que la copie reproduit exactement l'original;

qu'en fondant ses présomptions sur des copies certifiées conformes à une date où leur auteur ne disposait pas des originaux, le magistrat n'a pas satisfait aux exigences de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu que les agents des Impôts habilités tiennent de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales le pouvoir de certifier conformes aux originaux les copies des pièces appréhendées au cours d'une visite domiciliaire;

que les constatations de ces agents valant, selon l'article L. 238 du même Livre, jusqu'à la preuve du contraire, qu'il appartient au demandeur de rapporter, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, le moyen ne peut qu'être écarté ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-30175
Date de la décision : 16/06/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Ordonnance autorisant la visite - Eléments d'information - Documents datant de plus de trois ans - Pièces provenant d'une visite chez un tiers - Pièces obtenues de France Télécom - Copies certifiées conformes.


Références :

LPF L16 B

Décision attaquée : Président du tribunal de grande instance de Bobigny, 24 juin 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 jui. 1998, pourvoi n°96-30175


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.30175
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