AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ la société anonyme Axa assurances, qui se substitue aux droits et obligations de la compagnie MACL, dont le siège social est parc technologique du Canal, ...,
2°/ M. Patrice Y..., demeurant ..., Résidence Omahas, appartement 115, 34130 Carnon, en cassation d'un arrêt rendu le 2 novembre 1995 par la cour d'appel de Montpellier (1e chambre, section C), au profit :
1°/ de Mlle Elisabeth X..., demeurant ..., La Plagette, 34200 Sete, prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale de son fils mineur Roman Z...,
2°/ de l'Etablissement national des invalides de la marine (ENIM), dont le siège social est ..., défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 avril 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, Mme Guilguet-Pauthe, conseiller référendaire rapporteur, MM. Favard, Gougé, Ollier, Thavaud, Mme Ramoff, conseillers, MM. Petit, Liffran, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Guilguet-Pauthe, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de la société Axa assurances et de M. Y..., de la SCP Vincent et Ohl, avocat de Mlle X..., de la SCP Delaporte et Briard, avocat de l'ENIM, les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les juges du fond, que Raymond Z..., officier mécanicien de la marine marchande, est décédé dans un accident de la circulation le 4 décembre 1990;
que l'Etablissement national des invalides de la marine (ENIM), qui gère le régime de sécurité sociale des marins en administrant la caisse de retraite des marins et la caisse générale de prévoyance, a réclamé à M. Y... et à son assureur, la société Axa assurances, déclarés tenus de réparer intégralement les conséquences dommageables de l'accident, le remboursement de la somme de 712 380,75 francs représentant les arrérages échus et le capital représentatif des arrérages à échoir des rentes d'orphelin versées par ces deux caisses au fils mineur de la victime;
que l'arrêt attaqué (Montpellier, 2 novembre 1995), confirmant de ce chef la décision du tribunal, a accueilli sa demande ;
Attendu que la société Axa assurances et M. Y... font grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d'une part, que le droit des tiers payeurs au remboursement des prestations est limité au montant de l'indemnité mise à la charge du tiers responsable et préalablement fixé selon les règles du droit commun;
qu'en les condamnant à payer à l'ENIM l'intégralité des prestations servies par cet organisme, tout en s'abstenant de fixer l'indemnité mise à la charge du tiers responsable selon les règles de droit commun, la cour d'appel a violé les articles L. 376-1 du Code de la sécurité sociale et 29 et suivants de la loi du 5 juillet 1985 ;
et alors, d'autre part, que la cour d'appel ne pouvait statuer comme elle l'a fait sans répondre à leurs conclusions faisant valoir que le préjudice économique de l'enfant Roman Z... ne pouvait être confondu avec la rente versée par l'ENIM;
qu'ainsi, l'arrêt est entaché d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que les juges du fond ont, dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation, évalué le préjudice subi par le fils de la victime, mis à la charge du tiers responsable, à une somme égale au montant de la créance de l'ENIM;
qu'ils ont ainsi, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié leur décision ;
D'où il suit qu'en aucune de ses branches le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Axa assurances et M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'ENIM ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.