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04/06/1998 | FRANCE | N°95-42547

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 juin 1998, 95-42547


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mlle Peggy X...
Y..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 7 avril 1995 par la cour d'appel de Paris (22e chambre, section C), au profit de la société Céline, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 7 avril 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Desjardins, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Merlin, Brissier, Finance, Texier, Lanquetin, Mme Lemoine-Jeanjean, c

onseillers, M. Boinot, Mmes Bourgeot, Trassoudaine-Verger, MM. Richard de la Tour,...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mlle Peggy X...
Y..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 7 avril 1995 par la cour d'appel de Paris (22e chambre, section C), au profit de la société Céline, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 7 avril 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Desjardins, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Merlin, Brissier, Finance, Texier, Lanquetin, Mme Lemoine-Jeanjean, conseillers, M. Boinot, Mmes Bourgeot, Trassoudaine-Verger, MM. Richard de la Tour, Soury, Besson, Mme Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Desjardins, conseiller, les observations de Me Capron, avocat de Mlle Huynh Y..., de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Céline, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mlle Huynh Y... a été engagée à compter du 1er octobre 1987 par la société Céline en qualité de responsable artistique, puis de directrice artistique;

que le contrat stipulait que les parties ne pourraient le résilier "que pour le 15 octobre ou le 15 avril de chaque année, sous réserve d'observer un préavis d'au moins 3 mois" et, en son article 11, que la société Céline contribuerait à faire connaître à la presse et au public la participation de Mlle Huynh Y... à l'élaboration des collections;

que, licenciée par une lettre du 8 avril 1992, la dispensant d'exécuter son préavis et fixant la date de la rupture au 15 avril 1992, Mlle Huynh Y... a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Mlle Huynh Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de l'action qu'elle formait contre la société Céline afin d'obtenir le paiement d'une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, d'une part, que, lorsque le salarié refuse la modification substantielle que l'employeur entend apporter au contrat de travail, il appartient à l'employeur de prendre l'initiative de la procédure de licenciement;

que la seule exécution du contrat de travail modifié ne suffit pas à établir que le salarié a accepté tacitement la modification;

qu'en s'abstenant de rechercher si la modification qui est intervenue en mai 1989 portait sur un élément substantiel du contrat de travail et si Mlle Huynh Y... n'a pas, quand elle a contesté de façon permanente la gestion de Mme Z..., entendu manifester qu'elle refusait cette modification, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil;

et alors, d'autre part, que le licenciement n'est justifié que s'il repose sur une cause réelle et sérieuse ;

qu'en se bornant à relever que la société Céline n'a pas commis d'abus de pouvoir ou n'a pas agi avec l'intention de causer un préjudice à sa salariée lorsqu'elle a pris la décision de modifier le contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-4 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a relevé que Mlle Huynh Y... ne soutenait pas que son contrat de travail avait été modifié;

qu'elle n'avait donc pas à procéder à la recherche invoquée ;

Et attendu, ensuite, qu'ayant constaté la réalité des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, à savoir les divergences de vue sur la conception des structures de création et sur le style des collections, la mésentente avec le personnel et la persistance d'un climat conflictuel préjudiciable au fonctionnement de l'entreprise, elle a décidé, par une décision motivée, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L.122-14-3 du Code du travail, que le licenciement procédait d'une cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que Mlle Huynh Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de l'action qu'elle formait contre la société Céline afin d'obtenir réparation du préjudice qu'elle a subi du fait que celle-ci n'a pas exécuté l'obligation de promotion que définit l'article 11 de son contrat de travail, alors, selon le moyen, premièrement, que c'est au débiteur de l'obligation de promotion qu'il revient de prouver que, si la promotion promise n'a pas eu lieu, c'est sans sa faute;

qu'en imposant à Mlle Huynh Y... la charge de prouver que la situation qui s'est fait jour dans la presse, à partir de juin 1990, est imputable à la faute de la société Céline, la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1147 du Code civil;

alors, deuxièmement, que la cour d'appel, qui constate, d'une part, qu'à partir de juin 1990, il est moins fréquemment qu'auparavant question de Mlle Huynh Y... dans la presse, alors que le contrat de travail obligeait la société Céline à faire connaître à la presse et au public la participation de celle-ci à l'élaboration de ses collections, et qui énonce, d'autre part, que Mlle Huynh Y... n'a subi aucun préjudice, s'est contredite dans ses motifs;

qu'elle en a privé sa décision ;

et alors, troisièmement, que le dommage moral est réparable au même titre que le dommage matériel;

qu'en relevant, pour considérer que Mlle Huynh Y... ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle prétend avoir subi, qu'elle a rapidement retrouvé une situation compatible avec ses compétences et sa réputation, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la convention des parties ne définissait pas de manière précise l'importance et la fréquence des communications destinées aux professionnels et au public, la cour d'appel a constaté, sans se contredire, qu'il n'était pas établi que l'employeur ait manqué à l'un de ses engagements et qu'aucune atteinte n'avait été portée à l'image de marque et à la réputation de Mlle Huynh Y...;

qu'elle a, par ces seuls motifs, justifié sa décision;

que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande formée par Mlle Huynh Y... tendant au paiement d'une indemnité correspondant à trois mois de salaire, l'arrêt énonce que cette demande est fondée sur une prétendue obligation contractuelle d'observer, avant de procéder au licenciement, un délai de prévenance de 3 mois avant soit le 15 avril soit le 15 octobre ;

qu'interpréter ainsi les termes clairs du contrat serait en dénaturer le sens, alors que rien n'établit que l'intention commune des parties ait été d'instituer un délai de prévenance avant de procéder à la résiliation, qui, prononcée le 8 avril 1992 mais ne devant prendre effet que le 15 avril suivant, respectait la date convenue ;

Attendu, cependant, qu'il résultait de la clause figurant à l'article 3 du contrat de travail que le droit de chacune des parties d'en prononcer la résiliation unilatéralement ne pouvait être exercé qu'à deux moments précis de l'année, le 15 octobre ou le 15 avril, et ce, sous la condition que soit respecté un préavis d'au moins trois mois ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le licenciement, ayant été notifié le 8 avril 1992, ne pouvait produire effet que le 15 octobre 1992, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis du contrat, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement dans ses dispositions relatives à la demande en paiement d'une somme correspondant à trois mois de salaire, l'arrêt rendu le 7 avril 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mlle Huynh Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 95-42547
Date de la décision : 04/06/1998
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (22e chambre, section C), 07 avril 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 jui. 1998, pourvoi n°95-42547


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GELINEAU-LARRIVET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.42547
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