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03/06/1998 | FRANCE | N°96-41031

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 juin 1998, 96-41031


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Yves X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 1er décembre 1995 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre B), au profit de la société Thuasne, société anonyme, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 8 avril 1998, où étaient présents : M. Desjardins, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Boinot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Texier, Lanquetin,

conseillers, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

S...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Yves X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 1er décembre 1995 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre B), au profit de la société Thuasne, société anonyme, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 8 avril 1998, où étaient présents : M. Desjardins, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Boinot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Texier, Lanquetin, conseillers, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Boinot, conseiller référendaire, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé en qualité d'agent de service Promotion par la société Thuasne, a été licencié le 2 décembre 1992;

qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement de rappel de salaires, d'indemnité de repas et de frais de déplacement basés sur la qualification de visiteur médical, alors, selon le moyen, que c'est à tort que la cour d'appel croit devoir appliquer à M. X... la Convention collective des industries textiles;

qu'il apparaît en effet que la société Thuasne qui est tant le fabricant que le distributeur de ces produits, a manifestement des activités différenciées et autonomes ;

que, si l'activité de fabrication à partir de produits textiles ou élastiques relève de l'industrie textile, l'activité de M. X..., complètement distincte de la fabrication tenait essentiellement, quelle que soit la qualification retenue par son contrat, à celle de visiteur médical;

que cette activité relève nécessairement de la convention collective des industries pharmaceutiques ;

que, si l'entreprise poursuit plusieurs activités et si chacune de ces activités se trouve nettement différenciées et constitue un secteur d'activité nettement individualisé, il est nécessaire alors d'appliquer à chacune de ces activités la convention dont elle relève en raison de sa nature;

qu'il appartenait aux premiers juges et à la cour d'appel de rechercher d'une part s'il existait à la société Thuasne des activités différenciées de fabrication comme de commercialisation, d'autre part, si, ces secteurs se trouvant différenciés, M. X..., nonobstant les termes de son contrat, poursuivait ou non l'activité de visiteur médical dès lors qu'il n'avait d'autre fonction que de se rendre en milieu hospitalier ou auprès des cabinets médicaux pour y faire valoir les qualités des produits qu'il représentait ;

Mais attendu que la convention collective applicable aux salariés d'une entreprise est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur, peu important les fonctions assumées, et qu'il n'en est autrement que dans l'hypothèse où les salariés travaillent dans un centre d'activité autonome ayant une autre activité ;

Et attendu qu'ayant relevé que la société Thuasne fabriquait et commercialisait une gamme de produits spécialisés dans la contention élastique auprès des centres hospitaliers, pharmaciens d'officine, bandagistes et orthopédistes, qu'il s'agissait de matériaux et de produits n'entrant pas dans la catégorie des médicaments dont la vente est réservée aux pharmaciens d'officine, la cour d'appel a exactement décidé que l'activité principale de la société Thuasne ne relevait pas du secteur des industries pharmaceutiques mais de celles des industries textiles;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que la cour d'appel n'a pas répondu aux moyens soulevés devant les juges du fond par le salarié qui démontrait que, dans le même temps où lui était imposé un secteur nouveau avec une clientèle nouvelle, se trouvaient recrutés des salariés par la société Thuasne et ce, pour visiter le secteur qui était auparavant le sien;

que cette première indication qui n'a pas été reprise par la cour d'appel devait nécessairement amener celle-ci à considérer la modification unilatérale imposée au salarié comme relevant d'une volonté arbitraire de déplacer M. X... sinon de le déstabiliser et non d'une réelle nécessité ou une meilleure organisation de l'entreprise ;

que M. X... pouvait, de la même manière, devant les juges du fond démontrer que, outre cette modification substantielle imposée, il s'était vu progressivement priver par l'employeur des prérogatives qui étaient les siennes, ne recevant plus les échantillons qu'il lui appartenait de proposer aux médecins visités, n'étant plus, par ailleurs, convié à participer aux séminaires organisés par les services commerciaux auxquels il participait jusqu'alors régulièrement, cette participation se trouvant nécessaire à son activité professionnelle;

que M. X... pouvait légitimement en déduire qu'il y avait de la part de l'employeur une volonté délibérée de vider son contrat de ses éléments substantiels à telle fin que la rupture devienne inévitable et qu'elle lui soit imputable, et qu'il a précisément démontré le caractère fautif du comportement de l'employeur à l'origine du licenciement, sans que la cour d'appel réponde de ce chef ;

Mais attendu que, sous couvert du grief non fondé de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de Cassation les éléments de fait et de preuve souverainement appréciés par les juges du fond;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'une prime d'activité, alors, selon le moyen, qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est contredite dès lors qu'elle avait immédiatement auparavant constaté que cette prime se trouvait régulièrement versée depuis janvier 1988 pour avoir été supprimée au mois d'octobre 1990 ;

Mais attendu que c'est sans contradiction qu'après avoir constaté que M. X... sollicitait 26 700 francs au titre de la prime d'activité au motif que cette prime qui existait depuis janvier 1988 avait été diminuée de 100 francs en avril 1990 puis supprimée à partir d'octobre de la même année et qu'il prétendait que, s'agissant d'un accessoire du salaire, l'employeur ne pouvait l'en priver, la cour d'appel a relevé qu'il ne résultait d'aucune des pièces du dossier de M. X..., pas plus que de celles de la société Thuasne, que le paiement de cette prime remplissait les caractères de constance, de fixité et de généralité nécessaires pour lui conférer la nature d'accessoire du salaire et qu'en l'espèce en effet cette prime était irrégulièrement et discrétionnairement versée à certains salariés;

que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article L. 212-1-1 du Code du travail ;

Attendu que, pour débouter M. X... de sa demande en paiement de rappels de rémunération pour visites et heures supplémentaires, la cour d'appel énonce que M. X... prétend avoir effectué un nombre de visites "bien supérieur" à celui fixé par l'employeur soit 120 visites, que le document intitulé "dispositions particulières pour les agents de service Promotion" que M. X... verse lui-même aux débats, dont il a eu connaissance dès l'embauche, prévoit que chaque agent devait effectuer en moyenne 123 visites par mois, que M. X..., en dehors du décompte qu'il a lui-même établi, ne verse aucune pièce ni document susceptible d'étayer le bien-fondé de cette demande, en conséquence, à juste titre, rejetée par les premiers juges et que la même absence d'éléments probatoires les a pertinemment conduits par un même raisonnement, à débouter M. X... de sa demande en paiement d'un rappel de 4 806 francs pour heures supplémentaires ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte du texte susvisé que la preuve des heures supplémentaires n'incombe spécialement à aucune des parties et que le juge ne peut, pour rejeter une demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié;

qu'il doit examiner aussi les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ;

D'où il suit qu'en se déterminant au vu des seuls éléments fournis par le salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne le paiement de rappels de rémunération pour visites et heures supplémentaires, l'arrêt rendu le 1er décembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-41031
Date de la décision : 03/06/1998
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION - Durée du travail - Heures supplémentaires - Preuve - Charge.

CONVENTIONS COLLECTIVES - Industries textiles - Domaine d'application - Produits de contention élastique.


Références :

Code du travail L212-1-1
Convention collective nationale des industries textiles

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (5e chambre B), 01 décembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 jui. 1998, pourvoi n°96-41031


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DESJARDINS conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.41031
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