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28/05/1998 | FRANCE | N°96-19639

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mai 1998, 96-19639


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Samu Auchan, dont le siège est ..., en cassation d'une décision rendue le 11 avril 1996 par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification, au profit :

1°/ de Mme Patricia X... épouse Y..., demeurant ...,

2°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Strasbourg, dont le siège est ..., ... défenderesses à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation anne

xés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 26 mars 1998, où étaient présent...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Samu Auchan, dont le siège est ..., en cassation d'une décision rendue le 11 avril 1996 par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification, au profit :

1°/ de Mme Patricia X... épouse Y..., demeurant ...,

2°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Strasbourg, dont le siège est ..., ... défenderesses à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 26 mars 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Gougé, conseiller rapporteur, MM. Favard, Ollier, Thavaud, Mme Ramoff, M. Dupuis, conseillers, MM. Petit, Liffran, Mme Guilguet-Pauthe, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Gougé, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Samu Auchan, de Me Blanc, avocat de Mme Platz, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que la société Samu Auchan a contesté la décision de la Caisse primaire d'assurance maladie fixant à 15 % le taux de l'incapacité permanente partielle applicable aux séquelles de l'accident du travail dont un des salariés de la société a été victime;

que la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification des accidents du travail (11 avril 1996) a rejeté le recours de la société contre cette décision ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société critique la composition de la Cour nationale, en ce que la décision a été rendue par une juridiction où siégeaient, en application des articles R. 143-15 et R. 143-16 du Code de la sécurité sociale, des fonctionnaires du ministère chargé de la sécurité sociale, lesquels exercent, selon l'article L. 151-2 du même Code, un pouvoir de contrôle et de tutelle sur les décisions des Caisses primaires et régionales, ainsi que des magistrats et assesseurs, tous nommés par le ministre de tutelle, alors, selon le moyen, que devant une juridiction ainsi composée, l'employeur qui conteste le bien-fondé d'une décision d'une Caisse primaire, laquelle a fait l'objet d'un contrôle par l'autorité de tutelle qui nomme également les membres de la Cour nationale de l'incapacité, est privé de la garantie d'accès à un tribunal indépendant et impartial, en violation de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme;

qu'il en va d'autant plus ainsi que le secrétaire général de la Cour nationale de l'incapacité, en charge du respect de la procédure, est également, selon l'article R. 143-20 du Code de la sécurité sociale, un fonctionnaire du ministère de la sécurité sociale, organe de tutelle des Caisses ;

Mais attendu que, dans l'exercice de leurs attributions juridictionnelles, auxquelles sont étrangères les fonctions du secrétaire général, les président et assesseurs composant la Cour nationale constituent un tribunal indépendant et impartial ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu que la société SAMU Auchan fait encore grief à la Cour nationale d'avoir statué comme elle l'a fait, alors, selon le moyen, d'une première part, que nul ne peut se voir imposer une obligation à caractère civil sans avoir été à même d'en discuter le bien-fondé au terme d'une procédure équitable et contradictoire, en sorte qu'en affirmant que le taux d'incapacité permanente partielle, dont dépend le montant des cotisations mises à la charge de l'employeur au titre des accidents du travail en application de l'article L. 242-5 du Code de la sécurité sociale, n'avait pas, en l'état actuel des textes, à être fixé de manière contradictoire par la Caisse, la Cour nationale de l'incapacité a violé les articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile;

qu'il en va d'autant plus ainsi que la procédure subséquente de contestation, si elle est susceptible de faire intervenir un médecin expert devant le tribunal de l'incapacité et un médecin désigné devant la Cour nationale de l'incapacité, n'organise pas davantage une procédure contradictoire à l'égard de l'employeur;

que le salarié peut en outre refuser de se soumettre à l'expertise, en sorte que l'employeur demeure donc dans l'incapacité de contester utilement le taux d'incapacité de la victime;

et alors, d'une deuxième part, qu'il appartient à la Caisse primaire d'assurance maladie, qui fixe le taux d'incapacité de la victime d'un accident du travail, de rapporter la preuve, en cas de contestation, du bien-fondé de ce taux, de sorte qu'en énonçant que l'employeur doit prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, la Cour nationale de l'incapacité a inversé la charge de la preuve et violé les articles 9 du nouveau Code de procédure civile et 1315 du Code civil;

et alors, d'une troisième part, que le barème d'invalidité prévu par l'article R. 434-35 du Code de la sécurité sociale est purement indicatif, de sorte que la Cour nationale, qui se détermine en fonction des conclusions de son expert, aux seuls motifs que le taux fixé par la Caisse primaire pour ce type de trouble correspondait à l'évaluation donnée par le barème, sans rechercher si le taux n'avait pas été fixé en fonction d'un trouble qui ne résultait pas de l'accident du travail, prive sa décision de base légale au regard du texte précité;

et alors, d'une dernière part, que l'avis du médecin qualifié désigné par la Cour nationale ne lie pas cette dernière, en sorte que doit être censurée la décision qui déboute un employeur de sa contestation portant sur le montant du taux d'incapacité reconnu à un salarié victime d'un accident du travail en se bornant à reproduire le rapport écrit du médecin qualifié, sans réfuter, par une motivation propre, les moyens et arguments soulevés par la société;

qu'en statuant ainsi, la Cour nationale a commis un excès de pouvoir et violé les articles R. 143-28, R. 143-29 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1353 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que si la Caisse se prononce sur l'existence d'une incapacité et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci, au vu des seuls renseignements qu'elle a recueillis, l'employeur, qui reçoit un double de la décision, bénéficie d'un recours et peut, avec l'assistance du médecin de son choix, faire valoir ses droits dans le cadre d'un débat contradictoire devant les juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale conformément aux exigences de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Et attendu, d'autre part, qu'appréciant souverainement les conclusions de son médecin qualifié ainsi que les justifications médicales et socio-professionnelles qu'elle a relevées, la Cour nationale a estimé, sans inverser la charge de la preuve, et par une décision motivée, que le taux d'incapacité reconnu au salarié par la Caisse devait être maintenu ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Samu Auchan aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Samu Auchan à payer à Mme Platz la somme de 12 060 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-19639
Date de la décision : 28/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX - Contentieux spéciaux - Contentieux de l'incapacité - Cour nationale de l'incapacité - Composition - Procédure - Compatibilité avec les droits de l'homme.


Références :

Code de la sécurité sociale L151-2, R143-15, R143-16 et R143-20

Décision attaquée : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification, 11 avril 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mai. 1998, pourvoi n°96-19639


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GELINEAU-LARRIVET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.19639
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