AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Nicole Z..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 11 décembre 1995 par la cour d'appel de Paris (6e chambre, section C), au profit de Mme X..., née Eugénia Y... Miguel, demeurant 10, place du Poilu, 59186 Anor, défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 avril 1998, où étaient présents : M. Beauvois, président, Mme Stéphan, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Boscheron, Toitot, Mme Di Marino, MM. Bourrelly, Peyrat, Guerrini, Philippot, conseillers, Mme Fossaert-Sabatier, conseiller référendaire, M. Weber, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Stéphan, conseiller, les observations de Me Jacoupy, avocat de Mme Z..., les conclusions de M. Weber, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 décembre 1995), que Mme X... a donné à bail à Mme Z... des locaux à usage commercial lui appartenant, situés dans un immeuble faisant l'objet d'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique;
que se fondant sur l'existence de cette procédure d'expropriation, Mme Z... a assigné la bailleresse pour obtenir paiement de dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;
Attendu que, pour débouter Mme Z... de sa demande, l'arrêt retient que le bail a été conclu après l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique et avant l'ordonnance d'expropriation, chaque partie ayant été ainsi en mesure de savoir, avant la conclusion du bail, que le local à louer faisait l'objet d'un projet d'expulsion ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à Mme X... d'informer avant la conclusion du bail Mme Z... de l'existence de la procédure d'expropriation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme Z... de sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 11 décembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.