Joint les pourvois nos 96-19.819 et 96-17.919 ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 96-19.819 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mai 1996), que la société civile immobilière Schaeffer Erard (SCI) a donné à bail à la société MCE le 14 septembre 1984, des locaux à usage commercial à compter du 1er septembre 1984 ; que la SCI a donné congé par acte extrajudiciaire du 28 février 1991, sans offre de renouvellement à la société MCE ; que cette dernière a assigné la SCI en paiement d'une indemnité d'éviction ;
Attendu que la société MCE fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes et de fixer l'indemnité d'éviction à une certaine somme, alors, selon le moyen, 1° qu'il résulte de l'article 160 du nouveau Code de procédure civile que si le rapport définitif de l'expert modifie les conclusions du pré-rapport communiquées aux parties, celles-ci doivent nécessairement être convoquées par l'expert ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que le montant des indemnités résultant du rapport définitif est nettement inférieur à celui des indemnités proposées dans le pré-rapport ; que par suite, en entérinant le rapport de l'expert qui s'était abstenu de convoquer les parties avant le rapport définitif modifiant substantiellement le pré-rapport, la cour d'appel a violé le principe du contradictoire et l'article 160 du nouveau Code de procédure civile ; 2° que viciant son arrêt d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel s'est abstenue de répondre au moyen soulevé par la société MCE dans ses conclusions d'appel pris de l'absence d'éléments nouveaux de nature à entraîner la modification des conclusions expertales entre le dernier rendez-vous contradictoire et la rédaction du rapport définitif ; 3° qu'il résulte de l'article 238 du nouveau Code de procédure civile qu'il est interdit à l'expert de porter des appréciations d'ordre juridique ; qu'il était constant en l'espèce, ainsi que le soulignait la société MCE dans ses conclusions d'appel, que l'expert avait contesté la décision avant dire droit rendue par la cour d'appel ainsi que la réformation du jugement entrepris ; que par suite, en entérinant le rapport expertal, la cour d'appel a violé l'article 238 du nouveau Code de procédure civile ; 4° que viciant son arrêt d'une nouvelle violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel s'est totalement abstenue de répondre au moyen soulevé par la société MCE dans ses conclusions d'appel pris de l'impossibilité de transfert du fonds eu égard à la qualité de l'emplacement des locaux attestée par le plan de localisation des clients, de la perte définitive de la clientèle, de la chute brutale du chiffre d'affaires, lesquels ont entraîné la perte du fonds, la MCE partageant désormais un bureau de dix mètres carrés dans le 4e arrondissement de Paris ; 5° qu'il résulte de l'article 8 du décret du 30 septembre 1953 que l'indemnité principale d'éviction doit correspondre à la valeur marchande du fonds telle qu'elle est définie par les usages de la profession ; qu'en négligeant totalement les usages de la profession de formation, la cour d'appel a violé l'article 8 du décret du 30 septembre 1953 ; 6° que la cour d'appel a omis de répondre au moyen péremptoire des conclusions d'appel de la société MCE pris précisément de ce que l'indemnité doit correspondre à la valeur marchande du fonds telle qu'elle est définie par les usages professionnels, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 7° qu'il résulte de l'article 8 du décret du 30 septembre 1953, que le montant de l'indemnité d'éviction doit s'apprécier à la date la plus proche de l'éviction ;
qu'en entérinant par suite le rapport de l'expert qui a, à la fois, pris en compte les chiffres d'affaires postérieurs à l'éviction pour minorer la valeur de la société MCE et considéré le contexte du marché plusieurs années avant l'éviction pour minorer la valeur du droit au bail, la cour d'appel a violé l'article 8 du décret du 30 septembre 1953 ; 8° que viciant à nouveau son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions de plusieurs chefs et partant d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel a omis de répondre aux conclusions d'appel de la société MCE à la fois du chef du taux de remploi admis par les juridictions de Paris, du chef des frais administratifs, du chef du dernier bilan 1990 faisant état d'agencement non amortis pour 16 160 francs, du chef du manque à gagner et des pressions exercées ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant retenu qu'après avoir donné connaissance aux parties, le 13 décembre 1994, de ses premières estimations chiffrées, l'expert avait sollicité les dires de chaque partie au vu desquelles il avait établi son rapport définitif du 9 mai 1995, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que le principe de la contradiction avait été respecté ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que la société MCE ne pouvait reprocher à l'expert d'avoir porté des appréciations d'ordre juridique sans indiquer les passages précis tombant sous le coup de ce grief, que l'avis de l'expert concluant à une indemnité de déplacement devait être entériné, que cette indemnité devait être appréciée à la date du 1er septembre 1991, jour du départ de la société évincée, et ayant apprécié souverainement le montant de l'indemnité d'éviction à la date exactement retenue, la cour d'appel, répondant aux conclusions, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a, sans violer le principe de contradiction, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° 96-17.919 : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.