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19/05/1998 | FRANCE | N°97-82393

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 mai 1998, 97-82393


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- DECARPIGNY Gérard,

- la Société BSM, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI,

6ème chambre, en date du 11 mars 1997, qui, pour homicide involontaire et infraction à la...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- DECARPIGNY Gérard,

- la Société BSM, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 6ème chambre, en date du 11 mars 1997, qui, pour homicide involontaire et infraction à la réglementation relative à la sécurité des travailleurs, a condamné le premier à 2 mois d'emprisonnement et à 30 000 francs d'amende, a ordonné l'affichage et la publication de la condamnation et a prononcé sur l'action civile ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 121-2, 221-6 du Code pénal, L. 263-2 du Code du travail, 22, 23 du décret 65-48 du 8 janvier 1965, 388, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué, statuant sur l'action publique, a retenu Gérard Decarpigny dans les liens de la prévention et l'a condamné à 2 mois d'emprisonnement et 30 000 francs d'amende ;

"aux motifs propres et adoptés que, postérieurement à l'accident, il a été constaté que l'échafaudage s'était écarté du mur d'environ 1 mètre 50;

qu'il en a été conclu que Fernando Y... avait exercé sur le mur une force qui avait provoqué le déplacement de l'échafaudage à roues;

que l'inspecteur du travail a constaté, s'agissant dudit échafaudage, que celui-ci était muni de trois goupilles au lieu de quatre, qu'un seul frein fonctionnait et que, malgré la mise en place des freins, l'échafaudage se déplaçait aisément;

que les faits constituaient une infraction à l'article 129 du décret du 8 janvier 1965 qui dispose que les échafaudages à roues doivent être fixés et calés pour ne pouvoir ni basculer, ni se déplacer, et une infraction à l'article 22 du même décret qui impose qu'avant leur mise ou remise en service, les installations soient examinées en vue de la vérification de leur conformité, examen auquel il n'a pas été procédé lors de la remise en service de l'échafaudage sur le chantier (cf. arrêt attaqué, pages 4 et 5);

qu'il résulte des éléments du dossier et des débats que les faits poursuivis ne sont pas suffisamment établis à l'encontre de Thierry X... et que les éléments constitutifs de l'infraction ne sont pas réunis;

que ces mêmes faits sont en revanche établis dans leur matérialité et imputables au prévenu Gérard Decarpigny (cf. jugement confirmé, page 3);

qu'il y a lieu de confirmer le jugement sur les déclarations de culpabilité;

que, dans la présente procédure, l'inspecteur du travail a noté que le plan d'hygiène et de sécurité était imprécis, qu'il était mal diffusé auprès des exécutants et que la victime n'avait pas reçu de formation à la sécurité en méconnaissance des articles L. 231-3-1 et R. 231-36 du Code du travail;

que la multiplicité des défaillances constatées et les antécédents du prévenu justifient le prononcé d'une peine d'emprisonnement de courte durée (cf. arrêt attaqué, page 4) ;

"alors, d'une part, qu'en se bornant à énumérer les faits faisant l'objet des poursuites engagées contre Thierry X... et Gérard Decarpigny, pour affirmer ensuite, de façon contradictoire, d'une part, que ces faits ne seraient pas suffisamment établis et que les éléments constitutifs des infractions ne seraient pas réunis à l'égard de Thierry X..., et, d'autre part, que ces mêmes faits seraient établis dans leur matérialité et imputables à Gérard Decarpigny, la cour d'appel, qui n'a relevé aucun élément précis susceptible de mettre les faits poursuivis à la charge de l'un plutôt que l'autre des prévenus, n'a pas caractérisé la faute personnelle de Gérard Decarpigny susceptible d'engager sa responsabilité pénale et a violé les textes et principes visés au moyen ;

"alors, d'autre part, qu'il résultait des éléments du dossier et des pièces de l'instruction (cf. notamment procès-verbal de transport sur les lieux du 10 janvier 1995;

procès-verbal d'audition de Gérard Decarpigny du 13 février 1995) que Thierry X..., chef d'équipe responsable du chantier, était titulaire au moment des faits d'une délégation de pouvoirs en matière de sécurité;

qu'ainsi, en statuant sans égard à cette circonstance de nature à exonérer Gérard Decarpigny, chef d'entreprise, de sa responsabilité pénale, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et a violé les textes et principes visés au moyen ;

"alors, enfin, que, sauf accord exprès du prévenu, les juges correctionnels ne peuvent légalement statuer que sur les faits relevés par l'ordonnance ou par la citation qui les a saisis;

qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est fondée sur l'imprécision et l'insuffisance de diffusion du plan d'hygiène et de sécurité ainsi que sur le défaut de formation à la sécurité de la victime, faits non visés à la prévention et sur lesquels Gérard Decarpigny n'avait pas accepté d'être jugé;

qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a excédé les limites de sa saisine et violé les textes et principes visés au moyen" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'un salarié de la société BSM a fait une chute mortelle d'une hauteur de 4 mètres après que l'échafaudage roulant, sur lequel il était occupé à préparer la pose d'une charpente, se fut écarté du mur;

qu'à la suite de ces faits, Gérard Decarpigny, président de la société, et Thierry X..., chef d'équipe, ont été poursuivis pour homicide involontaire et infraction aux articles 22 et 129 du décret du 8 janvier 1965;

que le tribunal correctionnel a retenu la culpabilité du premier et relaxé le second ;

Attendu que, pour confirmer la déclaration de culpabilité de Gérard Decarpigny, seule discutée devant elle, la cour d'appel se prononce par les motifs propres reproduits au moyen et retient que le décès de la victime trouve sa cause dans une infraction aux dispositions de l'article 129 du décret du 8 janvier 1965 dont il appartenait au chef d'entreprise d'assurer le respect ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction, la cour d'appel, qui, sans excéder sa saisine, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs les infractions reprochées au prévenu, a justifié sa décision ;

Qu'il ne résulte d'aucune énonciation de l'arrêt attaqué, ni d'aucunes conclusions régulièrement déposées que Gérard Decarpigny ait soutenu devant les juges du second degré qu'il avait délégué ses pouvoirs en matière de sécurité ;

D'où il suit que le moyen, nouveau et mélangé de fait en sa deuxième branche, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Milleville conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Desportes conseiller rapporteur, M. Pinsseau, Mmes Simon, Chanet, Anzani conseillers de la chambre, Mmes Batut, Karsenty conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Amiel ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-82393
Date de la décision : 19/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Hygiène et sécurité des travailleurs - Responsabilité pénale - Chef d'entreprise - Exonération - Cas - Délégation de pouvoirs - Condition - Exception invoquée pour la première fois en cassation (non).


Références :

Code du travail L263-2
Code pénal 121-1 et 221-6
Décret 65-48 du 08 janvier 1965 art. 22 et 23

Décision attaquée : Cour d'appel de DOUAI, 6ème chambre, 11 mars 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 mai. 1998, pourvoi n°97-82393


Composition du Tribunal
Président : Président : M. MILLEVILLE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.82393
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