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19/05/1998 | FRANCE | N°96-40735

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 mai 1998, 96-40735


Attendu que, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 29 septembre 1995), M. X..., employé par la société Ein Wydauw, a été licencié le 15 novembre 1989 ; qu'il a signé le 15 janvier 1990, un document intitulé " reçu pour solde de tout compte ", rédigé en ces termes : " Je soussigné Jean-Claude X... reconnaît avoir reçu de la SA Etablissements Wydauw... la somme de francs = 31 543,83 (trente et un mille cinq cent quarante trois francs, quatre vingt trois centimes) pour solde de tout compte " ; que M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;

Sur le p

remier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir ...

Attendu que, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 29 septembre 1995), M. X..., employé par la société Ein Wydauw, a été licencié le 15 novembre 1989 ; qu'il a signé le 15 janvier 1990, un document intitulé " reçu pour solde de tout compte ", rédigé en ces termes : " Je soussigné Jean-Claude X... reconnaît avoir reçu de la SA Etablissements Wydauw... la somme de francs = 31 543,83 (trente et un mille cinq cent quarante trois francs, quatre vingt trois centimes) pour solde de tout compte " ; que M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que le document précité ne pouvait être considéré que comme un reçu de la somme qui y était indiquée et ne faisait pas obstacle aux demandes du salarié alors, selon le moyen, que, premièrement, la jurisprudence fait la distinction entre les soldes de tout compte rédigés en termes généraux et ceux qui ne le sont pas ; que, dès lors, que le reçu est rédigé en termes généraux, il n'y a pas lieu de s'attacher à ce que représente la somme versée qui comprend en principe tous les éléments de rémunération dus au salarié, et notamment les indemnités de préavis et de licenciement non versées à un salarié licencié pour faute lourde ; qu'en effet, lorsque le reçu est rédigé en termes généraux et comporte une somme globale, il n'est pas possible pour le salarié (sauf en cas de dénonciation régulière) de réclamer le paiement d'une indemnité en raison des circonstances prétendument abusives de la rupture, laquelle a été normalement envisagée lors de l'apurement total du compte ; que dans ce cas, c'est au salarié auquel le reçu est opposé qu'il appartient d'apporter la preuve que ces sommes portent sur des éléments, dont le paiement n'a pas été envisagé lors de la délivrance du reçu, qu'en cas de rédaction du solde de tout compte en termes généraux les sommes versées sont réputées l'être au titre de toutes sommes dues au salarié ; qu'inversement, si le solde de tout compte n'a pas été rédigé en termes généraux, l'effet libératoire ne joue que pour les sommes dont le versement a été expressément envisagé et il est possible de réclamer, au-delà du délai de deux mois, le versement de sommes qui n'auraient pas été envisagées dans ce solde de tout compte ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le solde de tout compte n'était pas rédigé en termes généraux et a donc conclu qu'il était possible d'ajouter des demandes lors de la saisine du conseil de prud'hommes ; que, toutefois, la cour d'appel n'a pas précisé quel était le décompte de la somme de 31 543,83 francs (ce que le solde de tout compte ne précise pas lui-même) ; qu'ainsi en accueillant la demande et en confirmant la décision rendue par le conseil de prud'hommes, la cour d'appel a considéré que la somme de 31 543,83 francs versée, ne comprenait pas l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors que celle-ci a, " peut-être ", été envisagée par les parties lors du versement de cette somme ; que la décision de la cour d'appel est, dès lors, entachée d'un défaut de motivation ; qu'en effet c'est au salarié auquel est opposé le reçu de prouver que ses demandes portent sur des éléments dont le paiement n'a pas été envisagé ; que la cour d'appel devait donc motiver sa décision en s'expliquant sur le détail des sommes reçues, avant de considérer que les 31 543,83 francs, versés, ne prenaient pas en compte les indemnités réclamées ; alors que, deuxièmement, le reçu pour solde de tout compte n'a rien précisé, de sorte qu'en dépit de la qualification donnée par la cour d'appel, il présentait un caractère général ; que la cour d'appel ne pouvait pas considérer le solde de tout compte comme n'étant pas rédigé en termes généraux, sans préciser les éléments sur lesquels porte la somme versée ; que force est de constater que le solde de tout compte ne précise pas le détail des sommes sur lesquelles il porte, puisqu'il comporte le versement d'une somme globale ;

qu'en pareille hypothèse le salarié ne peut réclamer le paiement d'une indemnité en raison des circonstances prétendument abusives de la rupture, laquelle avait été normalement envisagée par les parties au moment de l'apurement total de leurs comptes ; que, dès lors, la cour d'appel a dénaturé le reçu pour solde de tout compte et a violé l'article L. 122-17 du Code du travail " au regard de l'effet libératoire du solde de tout compte " ; alors que, troisièmement, la dénonciation du reçu pour solde de tout compte n'a jamais fait état des indemnités de rupture qui n'auraient pas été versées ; que la dénonciation n'ayant pas été motivée au regard des indemnités de rupture, la cour d'appel était mal fondée à accueillir la demande aux fins d'obtenir des dommages-intérêts pour rupture abusive (si tant est qu'elle n'ait pas été prise en compte dans le versement de la somme remise) ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article L. 122-17 du Code du travail " au regard de la motivation de la dénonciation du reçu pour solde de tout compte " ; alors que, quatrièmement, la cour d'appel a rappelé que la dénonciation n'a été faite que pour le repos compensateur ; qu'elle en conclut néanmoins que le salarié peut ajouter d'autres demandes lors de la saisine du conseil de prud'hommes ; qu'ainsi la cour d'appel s'est contredite sur ce point et a violé une nouvelle fois l'article L. 122-17 du Code du travail " au regard des éléments sur lesquels porte la dénonciation " ; qu'en effet, si le salarié n'a pas dénoncé le solde de tout compte pour un motif autre que celui intéressant le repos compensateur, la cour d'appel ne pouvait accueillir les autres demandes sauf à se contredire ;

Mais attendu, qu'ayant constaté que le document intitulé " reçu pour solde de tout compte " portait sur une somme dont, en l'absence de toute précision, il était impossible, lors de sa signature, de déterminer les éléments de rémunération ou d'indemnisation qu'elle concernait, c'est à bon droit que la cour d'appel, hors toute dénaturation et par une décision motivée, a décidé que ce document constituait, non pas un reçu pour solde de tout compte au sens de l'article L. 122-17 du Code du travail, mais un simple reçu de la somme qui y figure et qu'en conséquence il ne faisait pas obstacle à la recevabilité de la demande du salarié en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que, par ce seul motif, sa décision se trouve légalement justifiée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-40735
Date de la décision : 19/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Reçu pour solde de tout compte - Portée - Eléments envisagés lors du règlement de compte - Sommes détaillées - Défaut - Effet .

Ayant constaté que le document intitulé " reçu pour solde de tout compte " portait sur une somme dont, en l'absence de toute précision, il était impossible, lors de sa signature, de déterminer les éléments de rémunération ou d'indemnisation qu'elle concernait, c'est à bon droit qu'une cour d'appel a décidé que ce document constituait, non pas un reçu pour solde de tout compte au sens de l'article L. 122-17 du Code du travail, mais un simple reçu de la somme qui y figure et qu'en conséquence il ne faisait pas obstacle à la recevabilité de la demande du salarié en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.


Références :

Code du travail L122-17

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 29 septembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 mai. 1998, pourvoi n°96-40735, Bull. civ. 1998 V N° 268 p. 204
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 V N° 268 p. 204

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gélineau-Larrivet .
Avocat général : Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Brissier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.40735
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