AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Georges et Gaston X..., dont le siège social est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 18 juin 1996 par la cour d'appel de Paris (16e chambre, section A), au profit de M. Alain de Y..., demeurant 17, place d'Armes, 77300 Fontainebleau, défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 mars 1998, où étaient présents : M. Beauvois, président, Mme Stéphan, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Boscheron, Toitot, Mme Di Marino, MM. Bourrelly, Peyrat, Guerrini, Dupertuys, Philippot, conseillers, M. Pronier, Mme Fossaert-Sabatier, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Stéphan, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Georges et Gaston X..., de la SCP Célice et Blancpain, avocat de M. de Y..., les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles 690 et 693 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la notification destinée à une personne morale de droit privé est faite au lieu de son établissement, et ce à peine de nullité ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 juin 1996), que M. de Y..., propriétaire de locaux à usage commercial, et la société Georges et Gaston X... (société X...), preneur à bail de ces locaux, sont convenus de résilier amiablement le bail à compter du 1er janvier 1987, moyennant le payement par le bailleur d'une indemnité de résiliation d'un montant de 60 000 francs;
qu'un chèque de ce montant, émis le 14 mai 1987, n'a été présenté à l'encaissement que le 31 mai 1990 et a fait l'objet d'un rejet pour cause de péremption;
qu'après avoir fait délivrer, en vain, à M. de Y... un commandement de lui payer la somme de 60 000 francs, la société X... l'a assigné pour obtenir payement de cette somme avec intérêts ;
Attendu que, pour débouter la société X... de sa demande, l'arrêt retient que, si le chèque du 14 mai 1987 et la lettre l'accompagnant valaient reconnaissance de dette de la part de M. de Y..., celle-ci se trouvait dépourvue de cause par suite de l'inexécution par la société X... de son obligation de quitter les lieux le 1er janvier 1987, ainsi que cela se déduisait du jugement réputé contradictoire rendu à son encontre le 27 février 1990, qui a constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et l'a condamnée à payer au bailleur une certaine somme au titre des loyers échus d'octobre 1986 à octobre 1989 et que cette décision est opposable à la société X... et définitive, dès lors que cette société, qui prétend que les actes de procédure ont été signifiés non au siège social mais à l'adresse des lieux loués, n'a pas engagé de procédure en inscription de faux contre ces actes ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les actes avaient été notifiés au siège social ou au principal établissement de la société
X...
, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande reconventionnelle de M. de Y..., l'arrêt rendu le 18 juin 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. de Y... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.