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07/05/1998 | FRANCE | N°96-42311

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 mai 1998, 96-42311


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ l'Electricté de France (EDF), service national, dont le siège est ...,

2°/ le Gaz de France (GDF), établissement public, dont le siège est Courcellor I, ..., ayant une unité commune dénommée Centre de Corse, dont le siège est BP 406,avenue D... Eugénie, 20184 Ajaccio, en cassation d'un arrêt rendu le 23 janvier 1996 par la cour d'appel de Bastia (chambre sociale), au profit :

1°/ de M. Pierre, Louis, Hubert N..., demeurant .

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2°/ de M. Sylvestre M..., demeurant résidence La Pinède, bâtiment F, ...,

3°/ de M. Jo...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ l'Electricté de France (EDF), service national, dont le siège est ...,

2°/ le Gaz de France (GDF), établissement public, dont le siège est Courcellor I, ..., ayant une unité commune dénommée Centre de Corse, dont le siège est BP 406,avenue D... Eugénie, 20184 Ajaccio, en cassation d'un arrêt rendu le 23 janvier 1996 par la cour d'appel de Bastia (chambre sociale), au profit :

1°/ de M. Pierre, Louis, Hubert N..., demeurant ...,

2°/ de M. Sylvestre M..., demeurant résidence La Pinède, bâtiment F, ...,

3°/ de M. Joseph Marie L..., demeurant résidence Les Lacs Le Creno, ...,

4°/ de M. Simon Paul Y..., demeurant résidence Amazonia, bâtiment A, ...,

5°/ de M. Gérard C..., demeurant ...,

6°/ de M. François I..., demeurant Collines d'Aspretto, immeuble Panorama 2, bâtiment C, 20090 Ajaccio,

7°/ de M. Maurice E...
Z..., demeurant villa 113, lotissement 4, domaine Suartelo, 20167 Mezzavia,

8°/ de M. Philippe O..., demeurant ...,

9°/ de M. Jean-Noël F..., demeurant ...,

10°/ de M. Charles Q..., demeurant villa 137, Domaine de Suartello, 20167 Mezzavia,

11°/ de M. Laurent G..., demeurant ...,

12°/ de M. Alexandre J..., demeurant Porte CE, Le Pingouin, ...,

13°/ de M. Jean-Jacques A..., demeurant ...,

14°/ de M. Jean-Louis B..., demeurant ...,

15°/ de M. Pierre H..., demeurant ...,

16°/ de M. Lucien X..., demeurant ...,

17°/ de M. Jean-Pierre P..., demeurant ...,

18°/ de M. Jean-Martin K..., demeurant Vignola, ..., défendeurs à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 11 mars 1998, où étaient présents : M. Desjardins, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, M. Lanquetin, Mme Lemoine-Jeanjean, conseillers, MM. Boinot, Richard de la Tour, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Desjardins, conseiller, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de l'Electricité de France et du Gaz de France, les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. N... et 17 autres agents du centre de Corse d'EDF-GDF, ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un complément d'indemnités de congés payés pour les années non couvertes par la prescription, en soutenant que les sommes qui leur avaient été versées à ce titre étaient inférieures à celles auxquelles l'article L. 223-11 leur ouvrait droit ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'EDF-GDF font grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception préjudicielle tirée du principe de la séparation des pouvoirs et de l'incompétence du juge judiciaire, pour apprécier la légalité du statut du statut du personnel des industries électriques et gazières, alors, selon le moyen, qu'en vertu des dispositions combinées de l'article L. 134-1 du Code du travail et des articles 47 et 48 de la loi du 8 avril 1946, sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, les conditions d'emploi et de travail du personnel d'EDF-GDF sont déterminées, non par des conventions et accords collectifs de travail, mais par un statut approuvé par décret du 22 juin 1946, qui, constituant un élément du service public exploité par ces établissements publics, a le caractère d'un règlement administratif;

que les dispositions litigieuses du titre IV du statut, intitulé "travail-repos-congés", sont elles-mêmes un élément de ce statut réglementaire et constituent un ensemble indivisible de dispositions, qui résultent des nécessités particulières des services publics exploités par EDF et GDF, et notamment, des exigences, propres à ce service, du principe de continuité;

que le juge judiciaire ne saurait donc en écarter l'application au profit de dispositions du Code du travail étrangères, aux nécessités du service public, sans se faire nécessairement juge de la légalité des dispositions statutaires et des nécessités du service public;

qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, ensemble l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III, ainsi que les dispositions susvisées des articles 15 à 19 du titre IV du statut national du personnel des industries électriques et gazières ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'en présence de règles statutaires différentes de celles prévues par le Code du travail, le litige portait sur la détermination de celle qui était applicable aux salariés, la cour d'appel, devant laquelle aucune illégalité d'une disposition particulière du statut, propre au personnel d'EDF-GDF n'était invoquée, a exactement décidé, conformément aux dispositions de l'article L. 511-1 du Code du travail, qu'il appartenait aux juridictions judiciaires de se prononcer sur un litige opposant EDF-GDF à certains de leurs agents;

que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles L. 200-1 et L. 223-11 du Code du travail et les articles 15 à 19 du statut national du personnel des industries électriques et gazières, approuvé par le décret n 46-1541 du 22 juin 1946 ;

Vu le principe fondamental en droit du travail, selon lequel, en cas de conflit de normes, c'est la plus favorable aux salariés qui doit recevoir application ;

Attendu que, pour accueillir, en son principe, la demande des 18 salariés et dire que les dispositions de l'article L. 223-11 du Code du travail leur sont applicables, lorsqu'elles sont plus favorables que les règles du statut qui les régit, l'arrêt énonce que l'indemnité prévue par l'article L. 223-11, alinéa 1er, du Code du travail, et le salaire maintenu en application du statut du personnel d'EDF, sont destinés à rémunérer le salarié pendant la durée du congé annuel et répondent à la même finalité ;

que si le régime de rémunération du temps travaillé et du temps non travaillé, forment un tout dans le statut du personnel, le salaire maintenu pendant le congé annuel n'est pas fondu dans la masse de la rémunération annuelle et peut être isolé et calculé séparément;

que si le régime statutaire de la durée du travail, du service continu, des heures supplémentaires, des jours fériés, des congés annuels et des congés spéciaux d'ordre familial, peut être considéré comme globalement plus favorable que le régime défini par le Code du travail, il n'apparaît pas que l'équilibre économique de ce régime puisse être rompu par l'application de l'article L. 223-11, qui lorsqu'il est plus favorable, n'entraîne qu'une majoration très modeste de la somme revenant à l'intéressé;

que les salariés sont donc fondés à demander l'indemnité prévue au 1er alinéa de ce texte, pourvu que son montant soit plus élevé que celui du salaire maintenu en application du statut et des circulaires ;

Attendu, cependant, qu'il résulte des termes de l'article 200-1 du Code du travail, que sont soumis aux dispositions du livre II de ce Code les établissements industriels et commerciaux, qu'ils soient publics ou privés;

que les dispositions du livre II et spécialement celles des articles L. 223-1 et suivants, relatives aux congés annuels, sont donc, en principe, applicables aux agents d'EDF-GDF ;

Attendu que ces agents sont, en outre, soumis aux dispositions d'un statut prévu par le décret n 46-1541 du 22 juin 1946, qui comporte diverses règles spécifiques relatives aux congés payés, concernant à la fois les conditions de leur attribution, leur durée et leur rémunération ;

Attendu qu'en vertu du principe fondamental en droit du travail, selon lequel la situation des salariés doit être régie, en cas de conflit de normes, par celle qui leur est la plus favorable, il convient de déterminer si les dispositions du statut concernant les congés payés sont plus favorables que celles résultant du régime légal;

que cette appréciation doit, dès l'instant qu'aucune illégalité d'une disposition particulière du statut propre à EDF-GDF n'est invoquée, être globale à raison du caractère indivisible de ce régime de congés payés institué, en tenant compte des nécessités du service public;

que cette comparaison n'implique aucune appréciation sur la légalité du décret précité, puisqu'il s'agit seulement de choisir entre deux textes, également applicables, le plus avantageux pour les salariés ;

Et attendu qu'il apparaît que, même si en ce qui concerne les bases de calcul de l'indemnité de congés payés, le statut du personnel des industries électriques et gazières prévoit une disposition moins favorable, l'ensemble du régime des congés payés, prévu par ce statut accorde aux agents des avantages supérieurs à ceux qui résulteraient de l'application du Code du travail ;

D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés ;

Et attendu que la Cour de Cassation étant en mesure de mettre fin au litige, en appliquant la règle de droit appropriée, la cassation encourue sera prononcée sans renvoi, par application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 janvier 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déboute les 18 salariés de leurs demandes ;

Condamne les défendeurs aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-42311
Date de la décision : 07/05/1998
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

ELECTRICITE - Electricité de France - Personnel - Contrat de travail - Règles statutaires - Compétence du juge judiciaire.

ELECTRICITE - Electricité de France - Personnel - Congés payés - Application du régime le plus favorable.

TRAVAIL REGLEMENTATION - Durée du travail - Congés payés - Personnel de EDF-GDF.

SEPARATION DES POUVOIRS - Services et établissements publics à caractère industriel et commercial - Gaz et électricité de France - Litige concernant les contrats de travail.


Références :

Code du travail L134-1, L200-1 et L223-11
Décret 16 fructidor an III
Décret 46-1541 du 22 juin 1946
Loi du 16 août 1790 art. 13
Loi du 24 août 1790 art. 13
Loi du 08 avril 1946 art. 47 et 48
Statut national du personnel des industries électriques et gazières art. 15 à 19

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia (chambre sociale), 23 janvier 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 mai. 1998, pourvoi n°96-42311


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DESJARDINS conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.42311
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