AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 24 octobre 1995 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), au profit de M. Hubert X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 mars 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Merlin, Desjardins, Brissier, Finance, Texier, Lanquetin, Mme Lemoine-Jeanjean, conseillers, M. Boinot, Mme Bourgeot, MM. Richard de la Tour, Soury, Besson, Mme Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, les observations de Me Odent, avocat de la SNCF, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les lois des 21 juillet 1909 et 11 juillet 1953, les décrets des 1er juin 1950, 9 août 1953, 9 janvier 1954 et la loi du 30 juillet 1987 ;
Attendu que la loi du 30 juillet 1987 n'est pas applicable aux agents SNCF, dont la rupture du contrat pour mise à la retraite est régie par le statut des relations collectives, entre la SNCF et son personnel, élaboré conformément au décret du 1er juin 1950, et prononcé dans les conditions prévues par le décret du 9 janvier 1954, pris pour l'application du décret du 9 août 1953 relatif au régime des personnels de l'état et des services publics, lequel est intervenu pour l'application des lois du 11 juillet 1953, portant redressement économique et financier, et du 21 juillet 1909 relative aux conditions de retraite des personnels des grands réseaux de chemins de fer d'intérêt général ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 1er juillet 1959, a été mis à la retraite d'office à compter du 16 août 1993, à l'âge de 55 ans, alors qu'il totalisait 33 ans et demi d'ancienneté;
que revendiquant l'application de l'article L. 122-14-13 du Code du travail, il a saisi le conseil de prud'hommes de demandes en paiement d'une indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour accueillir la demande du salarié, la cour d'appel a énoncé qu'en matière de mise à la retraite, aucune disposition législative n'exclut de son champ d'application les établissements publics, industriels et commerciaux;
que bien plus, les dispositions de l'article L. 122-14-13 du Code du travail n'introduisent aucune distinction et ne définissent pas de champ particulier pour les salariés des entreprises sous statut, et qu'elles ont ainsi entendu rendre applicables à ces dernières les dispositions fixant le régime des mises à la retraite;
que les missions de service public confiées à la SNCF, si elles justifient l'existence d'un pouvoir règlementaire propre, ne peuvent justifier un régime spécifique des retraites dont les règles sont sans incidence sur le fonctionnement du service public ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... s'est borné, devant les juges du fond, à se prévaloir de l'application de la loi du 30 juillet 1987, sans discuter la régularité de sa mise à la retraite au regard du statut des relations collectives applicables aux agents de la SNCF, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 octobre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.