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07/04/1998 | FRANCE | N°94-17026

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 avril 1998, 94-17026


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Gorgeu-Perquel, Krucker, société anonyme, dont le siège est ... Paris, en cassation de deux arrêts rendus les 25 novembre 1991 et 2 mai 1994 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section A), au profit :

1°/ de M. Alain de Z... d'Héritot, demeurant Ferme de l'Hôpital, 78350 Les Loges-en-Josas,

2°/ de la société Gerbaudières, dont le siège est ...,

3°/ de M. François de Z... d'Hérito

t, demeurant ...,

4°/ de Mme Caroline de Z... d'Héritot, demeurant Ferme de l'Hôpital, 78350 Le...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Gorgeu-Perquel, Krucker, société anonyme, dont le siège est ... Paris, en cassation de deux arrêts rendus les 25 novembre 1991 et 2 mai 1994 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section A), au profit :

1°/ de M. Alain de Z... d'Héritot, demeurant Ferme de l'Hôpital, 78350 Les Loges-en-Josas,

2°/ de la société Gerbaudières, dont le siège est ...,

3°/ de M. François de Z... d'Héritot, demeurant ...,

4°/ de Mme Caroline de Z... d'Héritot, demeurant Ferme de l'Hôpital, 78350 Les Loges-en-Josac,

5°/ de M. Michel A..., demeurant ...Université, 75007 Paris,

6°/ de la société Dean Witter Reynolds international, dont le siège est ..., défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 25 février 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Dumas, conseiller rapporteur, MM. Nicot, Vigneron, Leclercq, Gomez, Léonnet, Poullain, Métivet, conseillers, M. Huglo, Mme Mouillard, M. Ponsot, Mme Graff, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Dumas, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société Gorgeu-Perquel-Krucker, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Dean Witter Reynolds international, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur la demande de mise hors de cause de la société Dean Witter Reynolds international :

Attendu que la société GPK ne formule aucune critique contre les chefs de l'arrêt qui ont dit irrecevable l'assignation en intervention forcée en cause d'appel de la société Dean Witter Reynolds international SA et l'ont condamnée à payer à celle-ci la somme de 30 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

qu'il y a donc lieu d'accueillir la demande de cette dernière à être maintenue hors de cause ;

Attendu, selon l'arrêt critiqué et l'arrêt avant-dire droit auquel le premier d'entr'eux se réfère expressément, que, démarché par Rémi X..., directeur général de la société Dean Witter Reynolds international (DWRI), filiale française de la société américaine Dean Witter Reynolds Inc. (DWR Inc), Alain de Z... d'Héritot a ouvert un compte à la société de bourse Gorgeu Perkel Krucker (société GPK), devenue la société CLC Bourse en vue d'effectuer des opérations sur le marché financier américain;

qu'ultérieurement, Caroline Y..., épouse d'Alain de Z... d'Héritot, Michel A..., François de Z... d'Héritot et la société Gerbaudières, dont ce dernier était le gérant, ont également ouvert des comptes dans les livres de la société GPK et consenti des délégations de pouvoir à Alain de Z... d'Héritot;

que les ordres que celui-ci passait, tant pour lui-même que pour ses mandants, étaient transmis par l'intermédiaire de la société DWR SA à la société DWR Inc., laquelle les exécutait aux Etats-Unis;

que, pour satisfaire aux exigences de la réglementation en vigueur, la banque Société générale avait été désignée en qualité d'intermédiaire agréé pour les opérations de change à l'étranger ;

que les avis d'opéré, libellés en dollars, étaient adressés par la société DWR Inc. à Rémi X..., lesquels les transmettaient aux donneurs d'ordes;

qu'ensuite, la société GPK, destinataire des avis d'opérations de bourse à l'étranger, envoyait à ses clients les avis d'opéré et les relevés mensuels libellés en francs;

que, le 12 février 1988, la société DWR SA a informé la société GPK de ce que les comptes de ses clients avaient été liquidés d'office, faute de couverture nécessaire;

qu'à la fin du même mois, la société GPK a réclamé aux titulaires des cinq comptes ouverts chez elle, les montants de leurs soldes débiteurs;

que ceux-ci se sont opposés à ces demandes, ont, en outre, contesté le montant des commissions prélevées par la société GPK et demandé reconventionnellement que celle-ci soit condamnée à leur payer des dommages-intérêts;

que, par arrêt avant-dire droit du 25 novembre 1991, la cour d'appel a désigné un expert aux fins, notamment, de décrire le rôle des divers intermédiaires, leurs rapports contractuels respectifs, et le montant des courtages et commissions perçues par chacun d'eux, et de se faire, en outre, remettre tous documents de nature à établir le solde de chacun des comptes et le montant total des commissions perçues sur chacun d'eux par la société GPK;

qu'elle a, en outre, appelé le président de la commission des opérations de bourse à déposer des conclusions, ce que celui-ci a fait;

que, statuant au fond par l'arrêt frappé de pourvoi, la cour d'appel a, d'une part, dit irrecevable l'assignation en intervention forcée en cause d'appel de la société DWR SA, d'autre part, confirmé le jugement en ce qu'il avait débouté la société GPK de l'ensemble de ses demandes, les consorts de Z... d'Héritot et la société Gerbaudières de leurs demandes de dommages-intérêts pour ingérence dans la gestion de leurs comptes et pour procédure abusive, et Michel A... de ses demandes de dommages-intérêts et de paiement, par la société GPK, du prétendu solde créditeur de son compte, enfin réformé le jugement pour le surplus et dit que la société GPK serait tenue au remboursement de l'intégralité des commissions payées par les intimés au titre du fonctionnement de leurs comptes ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande de paiement des soldes débiteurs des comptes, l'arrêt retient "que les opérations de débits sur les comptes des intimés, dont il apparaît qu'ils étaient fortement débiteurs au 31 décembre 1987, c'est-à-dire antérieurement aux opérations de liquidation critiquées, correspondaient à des sommes débitées par la Société générale à la société GPK et non à des "avances consenties par la société GPK à ses clients" ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors que la société GPK demandait le paiement des soldes débiteurs des comptes ouverts dans ses livres par les intimés et non le remboursement de crédits qu'elle leur aurait consentis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche :

Attendu que la société GPK reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à restituer les commissions qu'elle avait perçues à l'occasion du fonctionnement de comptes que les consorts de Z... d'Héritot, M. A... et la société Gerbaudières avaient ouverts dans ses livres, afin que soient comptabilisées les opérations boursières spéculatives auxquelles ils se livraient à l'étranger, alors, selon le pourvoi, qu'en ne recherchant pas si l'intervention de la société GPK n'avait pas entraîné, pour ses clients, une minoration des frais de courtage que la Société générale aurait perçus s'ils avaient directement traité avec cette dernière, et si cette intervention ne leur avait pas, en outre, évité de supporter des agios débiteurs, par le jeu des dates de valeur que la Société générale leur aurait imposées dans une telle hypothèse, de sorte que les commissions perçues par elle, en rémunération de son intervention, ne fussent pas dépourvues de cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer des recherches à partir de simples suppositions;

que le moyen ne peut être accueilli en sa première branche ;

Mais sur la seconde branche du moyen :

Vu l'article 1131 du Code civil ;

Attendu que, pour décider que la société GPK sera tenue au remboursement de l'intégralité des commissions payées par les intimés au titre du fonctionnement de leurs comptes, l'arrêt retient que cette société, qui n'avait pas qualité de donneur d'ordres, n'avait apporté aucune justification quant à la nécessité ou à l'opportunité de son intervention en qualité de teneur de compte aux côtés de la Société générale ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'ayant relevé par ailleurs que ce rôle de teneur de compte n'était pas incompatible avec celui tenu par la Société générale, l'arrêt constate que la société GPK a effectivement ouvert des comptes aux noms des intimés, qu'à cette occasion, il n'a pu lui être reproché un manquement à son devoir d'information et de conseil, qu'elle a assuré la tenue de ces comptes, que, sur la base des informations fournies par la société DWR SA et la Société générale, elle a affecté le solde de chaque opération au compte de chacun de ses cinq clients et leur a adressé les avis d'opéré correspondants et les situations mensuelles récapitulatives;

qu'en l'état de ces constatations, dont il résulte que la société GPK avait effectué des prestations au profit des intimés, la cour d'appel, même si elle a relevé des erreurs affectant les avis et relevés de comptes, sans s'expliquer au demeurant sur l'importance de ces erreurs, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard du texte susvisé, en privant la société GPK de toute rémunération au titre de la tenue des comptes litigieux ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société de bourse Gorgeu Perquel Krucker de ses demandes en paiement des soldes débiteurs définitifs des comptes ouverts dans ses livres par Alain, Caroline et François de Z... d'Héritot, Michel A... et la société Gerbaudières, et en ce qu'il a dit que la société de bourse Gorgeu Perquel Krucker sera tenue au remboursement de l'intégralité des commissions payées par les intimés au titre du fonctionnement de leurs comptes, l'arrêt rendu le 2 mai 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Paris;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne les consorts de Z... d'Héritot, M. A... et la société Gerbaudières aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société de bourse Gorgeu Perquel Krucker à payer la somme de 3 000 francs à la société Dean Witter Reynolds international ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 94-17026
Date de la décision : 07/04/1998
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (1re chambre, section A) 1991-11-25 1994-05-02


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 avr. 1998, pourvoi n°94-17026


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:94.17026
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