AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Moulinex, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 décembre 1995 par la cour d'appel de Paris (4e chambre, section B), au profit de la société Harco Handelsges (MBB), société de droit autrichien, dont le siège est 1120 Vienne, Assmayer 54 (Autriche), défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 février 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Grimaldi, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Grimaldi, conseiller, les observations de Me X..., avocat la société Moulinex, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que, le 16 mai 1988, la société Moulinex a conclu avec la société Harco un contrat d'agent commercial devant s'appliquer en Tchécoslovaquie, stipulé d'une durée d'une année renouvelable par tacite reconduction et soumis au droit français;
que, le 14 février 1991, la société Moulinex a fait connaître à la société Harco qu'elle ne renouvellerait pas le contrat à l'échéance du 16 mai 1991;
que la société Harco a assigné la société Moulinex en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive de contrat et, subsidiairement, pour refus abusif de renouvellement de contrat ;
Attendu que, pour dire abusif le refus de renouvellement de la société Moulinex et condamner celle-ci à verser une "indemnité compensatrice" à la société Harco, l'arrêt, qui relève que ne sont pas démontrées les "dépenses considérables" alléguées par la société Harco "pour promouvoir la marque Moulinex", retient, d'un côté, que la lettre du 14 février 1991 faisait suite à une lettre par laquelle la société Moulinex proposait à la société Harco l'instauration de nouvelles relations tenant compte de la nouvelle situation économique de la Tchécoslovaquie et lui offrait son "intégration à un réseau de grossistes rattachés à la filiale autrichienne de Moulinex" et, d'un autre côté, que la société Harco avait pris, le 30 novembre 1990, l'engagement, "excédant les obligations découlant strictement du contrat", de se porter ducroire pour les marchandises commandées par une société cliente tchèque, d'un montant de 900 000 francs ;
Attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, impropres à caractériser l'abus dans le refus de renouvellement du contrat, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne la société Harco aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Moulinex ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.