Attendu que M. X..., au service de la société Redland granulats, a vu ses fonctions modifiées unilatéralement par l'employeur à la fin de l'année 1992, et qu'il a mis alors à deux reprises et pour la dernière fois le 28 avril 1993, son employeur en demeure de le rétablir dans sa situation antérieure sous peine de rompre le contrat de travail, ce qu'il a fait par notification du 13 mai 1993 ; que la société l'a ensuite licencié le 27 mai 1993 pour faute grave commise le 10 mai précédent ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Lyon, 23 mai 1995), d'avoir décidé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que l'employeur est fondé à procéder à un licenciement pour faute grave, dès lors que cette dernière a été commise à un moment où le contrat de travail se poursuivait, sans qu'il importe que postérieurement à cette faute le salarié ait cru devoir prendre acte d'une rupture de son contrat pour modification substantielle ; qu'en refusant de tenir compte de la lettre de licenciement de l'employeur fondé sur la faute grave imputée au salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6, L. 122-9 et L. 122-14-2 du Code du travail ; et alors, qu'en tout état de cause et subsidiairement, l'employeur ne pouvait être condamné au paiement d'indemnité de préavis, dès lors que la faute grave commise avant que le salarié ait pris acte de la rupture de son contrat, n'a été révélée à l'employeur que postérieurement à cette rupture ; que la cour d'appel, en condamnant la société Redland granulats-GIE au paiement de l'indemnité de préavis, a violé l'article L. 122-6 du Code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a retenu que l'employeur ayant modifié unilatéralement le contrat de travail, la rupture était intervenue dès le 13 mai et s'analysait en un licenciement, et en a déduit exactement que le licenciement prononcé le 27 mai 1993 était dépourvu de tout effet ;
Et attendu ensuite que l'indemnité de préavis était due à la suite du licenciement intervenu le 13 mai 1993, peu important la faute grave ultérieurement invoquée après la rupture ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Attendu que le salarié fait de son côté grief à l'arrêt d'avoir limité à 350 000 francs la somme que la société était condamnée à lui payer à titre d'indemnité de licenciement, alors, selon le moyen, qu'en ne précisant pas en quoi l'indemnité résultant de l'application de la clause contractuelle de doublement avait un caractère manifestement excessif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du Code civil ;
Mais attendu que l'indemnité de licenciement, lorsqu'elle est prévue par le contrat de travail a le caractère d'une clause pénale et peut être réduite par le juge si elle présente un caractère manifestement excessif ;
Et attendu que la cour d'appel a motivé sa décision de réduire la clause pénale et en a souverainement apprécié le montant ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident.