AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. René A..., demeurant ... de Bretagne, en cassation d'un arrêt rendu le 9 novembre 1995 par la cour d'appel de Caen (1ère chambre, section civile et commerciale), au profit :
1°/ de M. Gérard Y..., pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société Biscuiterie du Cotentin, demeurant en ladite qualité ...,
2°/ de Mme Monique Z..., mandataire liquidateur, prise en sa qualité de représentant des créanciers du redressement judiciaire de la société Biscuiterie du Cotentin, demeurant en ladite qualité 3, Place de la Croute, 50200 Coutances, défendeurs à la cassation ;
EN PRESENCE DE : M. Jacques X..., pris en sa qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la société Biscuit Holding Bischo, dont le siège est 15, boulevard du Sud-Est à Nanterre, demeurant en ladite qualité ..., Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 3 février 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Lassalle, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, MM. Grimaldi, Apollis, Tricot, Badi, Mme Aubert, M. Armand-Prevost, Mme Vigneron, conseillers, Mme Geerssen, M. Rémery, Mme Graff, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Lassalle, conseiller, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de M. A..., de Me Foussard, avocat de M. Y..., ès qualités et de Mme Z..., ès qualités, de Me Le Prado, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Met hors de cause, sur sa demande, M. X..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Biscuit Holding Rischo à qui le pourvoi ne peut ni profiter, ni nuire ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que pour condamner M. A..., administrateur de la société Biscuiterie du Cotentin, mise le 31 octobre 1990 en redressement judiciaire au paiement de partie des dettes sociales, l'arrêt retient que celui-ci avait fait adopter en octobre 1989, compte tenu d'une perte très importante apparue le 31 août 1989, révélatrice d'une situation très alarmante sinon définitivement compromise, des mesures illusoires du regard de la gravité de la situation, au lieu de proposer d'effectuer la déclaration de l'état de cessation des paiements de la société ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, après avoir relevé que M. A... avait démissionné de ses fonctions d'administrateur le 31 mars 1990 et que la date de cessation des paiements avait été fixée par le jugement d'ouverture de la procédure collective au 29 octobre 1990, sans constater l'impossibilité pour la société au plus tard à la date de la démission, de faire face à son passif exigible avec l'actif disponible, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur la seconde branche :
Vu l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que pour condamner M. A..., l'arrêt retient aussi que celui-ci n'avait pas préconisé de mesures de redressement adaptées, telle que des apports de capitaux ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs impropres, par leur imprécision, à caractériser l'existence d'une faute de M. A... ayant contribué à l'insuffisance d'actif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Condamne M. Y... et Mme Z..., ès qualités aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.