AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Patrick X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 novembre 1995 par la cour d'appel de Paris (22e chambre A), au profit de la société Credinfor, société anonyme, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 janvier 1998, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Texier, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseiller, Mme Bourgeot, M. Besson, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Texier, conseiller, les observations de Me Hemery, avocat de M. X..., de Me Le Prado, avocat de la société Credinfor, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-6 et L. 122-8 du Code du travail ;
Attendu que M. X... a été embauché par la société Credinfor le 24 janvier 1991 en qualité de directeur commercial;
qu'il a été licencié pour faute grave par lettre recommandée du 3 juin 1992;
qu'il a saisi la juridiction prud'homale en paiement de diverses sommes ;
Attendu que, pour déclarer justifié le licenciement pour faute grave, la cour d'appel relève que la note sur la sécurité du 29 janvier 1991 rappelait qu'il était indispensable de respecter les consignes d'accès aux locaux et sur la circulation des tiers dans l'entreprise;
qu'en introduisant un tiers dans l'entreprise et en le faisant accéder à la salle d'exploitation, le salarié a commis un manquement à ses obligations empêchant son maintien au travail durant le temps du préavis, peu important que ledit tiers ait attesté être un ami d'enfance du salarié, ni qu'en sa qualité de cadre celui-ci ait été habilité à laisser entrer des visiteurs dans les bureaux, ni qu'enfin, aucun préjudice n'ait été consécutif à l'introduction de ce tiers ;
Qu'en statuant ainsi, sans préciser le contenu des consignes de sécurité et du contrat de travail et sans constater que la faute était d'une gravité telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 novembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Credinfor aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Credinfor à payer à M. X... la somme de 12 000 francs ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.