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10/03/1998 | FRANCE | N°95-20163

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 mars 1998, 95-20163


Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches ;

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance d'Evry, 24 avril 1995) que, par convention de mise en pension du 4 juillet 1990, la société MR X... s'est engagée à céder des actions Sagem-ADP pour un prix de 55 800 000 francs à la société Autodistribution, laquelle s'engageait à les rétrocéder pour le prix de 54 425 000 francs ; que le règlement et la livraison par la société MR X... ont eu lieu le lendemain et qu'à ce même jour, Autodistribution a encaissé le coupon attaché aux actions, soit 3 300 000 f

rancs, auquel était lié un avoir fiscal de 1 665 000 francs ; que l'admi...

Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches ;

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance d'Evry, 24 avril 1995) que, par convention de mise en pension du 4 juillet 1990, la société MR X... s'est engagée à céder des actions Sagem-ADP pour un prix de 55 800 000 francs à la société Autodistribution, laquelle s'engageait à les rétrocéder pour le prix de 54 425 000 francs ; que le règlement et la livraison par la société MR X... ont eu lieu le lendemain et qu'à ce même jour, Autodistribution a encaissé le coupon attaché aux actions, soit 3 300 000 francs, auquel était lié un avoir fiscal de 1 665 000 francs ; que l'administration des Impôts a prétendu soumettre les deux opérations d'achat et de rétrocession aux droits de mutation prévus par l'article 726 du Code général des impôts et que la société Autodistribution a demandé l'annulation de la décision de rejet de sa réclamation contre le redressement ;

Attendu que la société Autodistribution reproche au jugement d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la convention type dite de place relative aux opérations de pensions de titres, élaborée par la Banque de France, est sans portée juridique en ce qui concerne la nature d'une opération à finalité d'abord économique et financière ; qu'en se fondant néanmoins sur ladite convention type, reprise mot pour mot comme en convient le Tribunal, dans les conditions générales de la convention à l'origine des redressements en cause, le Tribunal méconnaît son office et, partant, viole l'article 12 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que le juge est tenu de donner aux situations soumises à son examen leur exacte qualification lorsque de celles-ci dépend tel ou tel effet juridique, spécialement sur le plan fiscal et ce, sans pouvoir se contenter de se référer à la lettre des conditions générales d'une convention reprenant mot pour mot une convention-type, cependant que la convention type de pension de titres génère des droits et obligations spécifiques ne pouvant pour l'essentiel s'analyser et surtout se réduire en une double vente entrant dans le champ d'application de l'article 726 du Code général des impôts ; alors, encore, qu'en toute hypothèse, la pension de titres constitue un instrument de transfert temporaire d'actions constituant d'abord un instrument de trésorerie permettant à un détenteur de titres de se procurer un financement et à un détenteur de liquidités de réaliser un placement ou encore d'obtenir un avantage fiscal et ce, contre remise temporaire de titres ; qu'une telle opération ne peut se réduire à une double vente entraînant un double transfert de propriété et donc la perception d'autant de droits d'enregistrement au sens de l'article 726 susvisé ; qu'il est constant qu'en l'espèce, l'opération de pension ne peut s'analyser en une double vente ; qu'en refusant de rechercher le contenu même de la commune volonté des parties par rapport aux objectifs recherchés et en affirmant qu'il n'était pas nécessaire de même mot pour mot la convention type de place relative aux opérations de pension établie par la Banque de France et applicable le 1er juillet 1990, le Tribunal ne justifie pas légalement son jugement au regard du texte précité du Code général des impôts, ensemble l'article 1134 du Code civil ; alors, ensuite, qu'elle insistait sur le fait qu'il résultait des conditions particulières de la convention que le bénéficiaire de la remise en pension s'engageait à les restituer dans un très bref délai, deux jours ; que cet engagement faisait clairement ressortir que le cédant n'entendait pas laisser à l'acquéreur la libre disposition des actions remises seulement en pension ; qu'en affirmant de façon générale et abstraite, sans s'expliquer concrètement sur le contenu et les stipulations antinomiques avec une double vente au sens technique du terme, le Tribunal ne justifie pas davantage son jugement au regard de l'article 726 du Code général des impôts ;

et alors, enfin, que, par le canal de conclusions responsives, elle se prévalait de la circonstance que la pension de titres se rapprochait d'un double prêt à la consommation et ne pouvait être réduite à une double vente, la pension de titres impliquant par essence un prêt de titres, un prêt d'espèces, puisque celui qui met les titres en pension les prête et emprunte de l'argent, cependant, que celui qui les reçoit en pension prête de l'argent et emprunte les titres ; qu'en ne consacrant aucun motif pertinent pour répondre à la démonstration quant à cette position ruinant la thèse de la double vente, le Tribunal ne justifie pas davantage son jugement au regard du texte cité au précédent élément de moyen ;

Mais attendu que le Tribunal, qui n'a pas fondé sa décision sur la convention type de la Banque de France mais sur la convention litigieuse, dont il a apprécié concrètement, au vu de ses termes et de la commune volonté des parties, le sens et la portée juridique, relève que cette convention ne constituait pas un prêt, mais une cession de la propriété des titres ; qu'ayant ainsi juridiquement qualifié la convention litigieuse, il en a justement tiré les conséquences fiscales telles que définies par l'article 726 du Code général des impôts lequel, en sa rédaction applicable à l'espèce, ne contenait aucune disposition particulière et dérogatoire applicable aux opérations de pensions de titres ; qu'il a ainsi justifié sa décision ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-20163
Date de la décision : 10/03/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Mutation à titre onéreux de meubles - Cession de droits sociaux - Champ d'application - Pension conclue en 1990 .

Justifie légalement sa décision de soumettre une convention de mise en pension conclue en 1990 aux droits de mutation prévus par l'article 726 du Code général des impôts en sa rédaction applicable à l'espèce ne contenant aucune disposition dérogatoire, le Tribunal qui, appréciant concrètement au vu des termes de la convention et de la commune intention des parties, le sens et la portée juridique de celle-ci sans se fonder sur la convention type de la Banque de France, relève que cette convention ne constituait pas un prêt mais une cession de la propriété des titres.


Références :

CGI 726

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Evry, 24 avril 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 mar. 1998, pourvoi n°95-20163, Bull. civ. 1998 IV N° 96 p. 78
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 IV N° 96 p. 78

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Lafortune.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Vigneron.
Avocat(s) : Avocats : M. Blondel, Mme Thouin-Palat.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.20163
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