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24/02/1998 | FRANCE | N°95-30197

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 février 1998, 95-30197


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I- Sur le pourvoi n° K 95-30.197 formé par :

1°/ M. Malcolm X...,

2°/ Mme Margaret Y..., épouse X..., demeurant ensemble ...,

3°/ la société Laboratoires Roche Nicholas, société anonyme, dont le siège est ..., II- Sur le pourvoi n° M 95-30.198 formé par :

1°/ la société "Laboratoires Roche Nicholas", société anonyme, dont le siège est ...,

2°/ M. Malcolm X...,

3°/ Mme Margaret Y..., épouse X..., e

n cassation d'une ordonnance rendue le 14 septembre 1995 par le président du tribunal de grande instance de Bonneville...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I- Sur le pourvoi n° K 95-30.197 formé par :

1°/ M. Malcolm X...,

2°/ Mme Margaret Y..., épouse X..., demeurant ensemble ...,

3°/ la société Laboratoires Roche Nicholas, société anonyme, dont le siège est ..., II- Sur le pourvoi n° M 95-30.198 formé par :

1°/ la société "Laboratoires Roche Nicholas", société anonyme, dont le siège est ...,

2°/ M. Malcolm X...,

3°/ Mme Margaret Y..., épouse X..., en cassation d'une ordonnance rendue le 14 septembre 1995 par le président du tribunal de grande instance de Bonneville, au profit du directeur général des Impôts, domicilié ..., défendeur à la cassation ;

Les demandeurs aux pourvois invoquent, à l'appui de leurs recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 janvier 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Ponsot, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneron, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat M. X... et de la société Laboratoires Roche Nicholas, de Me Foussard, avocat du directeur général des Impôts, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Joint les pourvois n°s K 95-30.197 et M. 95-30.198 qui font état de moyens identiques ;

Attendu que par une ordonnance du 14 septembre 1995 le président du tribunal de grande instance de Bonneville a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales à effectuer une visite et une saisie de documents au domicile de M. et Mme X... 15 résidence du Château à Peillonnex (Haute-Savoie), en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de la société Laboratoires Roche Nicholas dont M. Malcolm X... est le directeur financier ;

Sur la recevabilité du pourvoi formé par Mme Malcom X..., contestée par la défense :

Attendu que le directeur général des Impôts relève qu'aucun moyen n'est déposé au nom de Mme X... ;

Attendu que cette fin de non-recevoir est fondée, le mémoire ampliatif n'ayant pas été fait au nom de Mme X..., celle-ci est donc irrecevable en son pourvoi, faute de moyens développés en son nom ;

Sur le pourvoi formé par M. X... et la SA Laboratoires Roche Nicholas :

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. X... et la société Laboratoires Roche Nicholas font grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuse alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il ressort tant des termes de la requête présentée par l'administration des impôts que des propres constatations du président du tribunal de grande instance que l'autorisation d'effectuer des visites et saisies a été demandée en vue de l'application à la société Laboratoires Roche Nicholas SA des dispositions de l'article 57 du Code général des Impôts qui permettent à l'administration d'incorporer dans les résultats d'une entreprise qui transfère indirectement ses bénéfices à une entreprise située hors de France, notamment par voie de diminution de ses prix de vente, les bénéfices ainsi transférés;

que la présomption qu'une entreprise se soustrait au paiement de l'impôt dû en France en transférant à l'étranger une partie de ses bénéfices n'est pas au nombre de celles qui permettent d'autoriser les agents de l'administration à rechercher la preuve de ces agissements en faisant des visites et en procédant à des saisies ;

qu'en autorisant néanmoins des visites et saisies sur le fondement d'une telle présomption, le magistrat a violé par fausse application l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales;

alors, d'autre part, que le transfert présumé de bénéfices à l'étranger, seul objet des recherches entreprises par l'administration, n'implique aucune omission ou inexactitude des documents comptables de l'entreprise;

que seul est contesté le niveau des prix pratiqués par celle-ci, sans que soit mise en cause leur exactitude ;

qu'aucune investigation n'est donc nécessaire en dehors de celles auxquelles peut procéder l'administration dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de vérification;

qu'en l'espèce la mention incidente dans l'ordonnance attaquée de la passation d'écritures inexactes ou fictives ne s'appuie sur aucune de ses abondantes constatations et qu'elle n'a été ajoutée que pour donner une apparence de fondement légale à une autorisation qui n'a été demandée et accordée que pour permettre l'application des dispositions de l'article 57 du Code général des impôts, en violation de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales;

alors, enfin, qu'en autorisant les agents de l'administration des impôts à effectuer des visites et saisies sans avoir relevé aucune circonstance qui justifie la présomption alléguée de passation d'écritures inexactes ou fictives dans les documents comptables, le président du tribunal de grande instance a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l'article L. 16 B du Livre des procédures civiles ;

Mais attendu que l'article 57 du Code général des impôts qui a trait à l'impôt sur le revenu dû par les entreprises sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France entre dans les prévisions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales;

que le juge s'est référé en les analysant aux éléments fournis par l'administration requérante et a relevé les faits fondant son appréciation suivant laquelle il existe des présomptions d'agissements visés par la loi justifiant la mesure ordonnée;

qu'il a ainsi satisfait aux exigences du texte susvisé;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que les demandeurs font aussi grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses alors, selon le pourvoi, d'une part, que le juge est réputé s'appuyer sur tous les documents qu'il vise et donc sur tous les éléments du dossier que lui a remis l'administration fiscale;

qu'en retenant ce dossier dans son ensemble et avec lui des documents obtenus des autorités fiscales espagnoles, allemandes et belges, ou des documents remis par les services des douanes, sans en faire pour chacun l'analyse, le Tribunal n'a pas satisfait aux exigences de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales;

et alors, d'autre part, que le juge autorisant une visite domiciliaire ne peut se référer qu'aux documents produits par l'administration demanderesse et détenus par elle de manière apparemment licite;

qu'en visant au nombre des documents analysés en l'espèce divers dossiers fiscaux provenant d'autorités fiscales étrangères et des dossiers en douane comportant des procès-verbaux et autres pièces, sans préciser comment ces pièces ont pu entrer en possession des autorités et services considérés et être ainsi transmises à l'administration, le Tribunal n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'origine licite desdites pièces;

qu'ainsi l'ordonnance attaquée est dépourvue de toute base légale au regard de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu que l'ordonnance a dressé la liste des pièces sur lesquelles elle s'appuie et a mentionné leur origine et les a analysées;

que la preuve contraire à cette apparence de licéité ne peut être apportée que dans une procédure engagée devant la juridiction compétente sur les résultats de la mesure autorisée;

que le juge a également analysé succinctement ces pièces;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les demandeurs font encore grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuse alors, selon le pourvoi, que des visites et saisies ne peuvent être autorisées en des lieux privés que si l'utilité en est justifiée par des motifs précis;

qu'en ordonnant en l'espèce une visite au domicile privé de M. et Mme X..., sans relever que des pièces et documents se rapportant aux agissements soupçonnés étaient susceptibles d'y être détenus, le juge a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu qu'en mentionnant la qualité de directeur financier de M. X..., le président du tribunal a fait ressortir la nécessité de rechercher la preuve de la fraude fiscale présumée de la société Laboratoires Roche Nicholas SA au domicile de ce dirigeant;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que les demandeurs font enfin grief à l'ordonnance d'avoir autorisé les visites et saisies litigieuses alors, selon le pourvoi, que le juge est tenu de vérifier d'office la qualité d'officier de police judiciaire, justifiée par un service actif et la compétence territoriale du gendarme ou de l'officier de police désigné;

qu'en s'abstenant de toute recherche à cet égard, le Tribunal a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu qu'en désignant pour un lieu situé dans son ressort un adjudant de gendarmerie et/ou un maréchal des logis, en constatant et mentionnant leur qualité d'officiers de police judiciaire, et en précisant leur affectation territoriale à la brigade de recherche de Bonneville, le président du tribunal a satisfait aux exigences de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales;

que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi de Mme X... ;

REJETTE les pourvois de M. X... et de la société Laboratoires Roche Nicholas ;

Condamne les demandeurs aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre février mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-30197
Date de la décision : 24/02/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Champ d'application - Impôts sur le revenu pour contrôle d'entreprises hors de France.

IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Ordonnance autorisant la visite - Pièces visées - Licéité apparente - Domicile indiqué.

IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Officier de police judiciaire désigné.


Références :

Livre des procédures fiscales L16 B

Décision attaquée : Président du tribunal de grande instance de Bonneville, 14 septembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 fév. 1998, pourvoi n°95-30197


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.30197
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