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24/02/1998 | FRANCE | N°95-21730

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 février 1998, 95-21730


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Garonnaise de Viandes, société anonyme, dont le siège est ... de Bordeaux,

2°/ M. Philippe X..., demeurant ... de Bordeaux, en cassation d'un arrêt rendu le 2 octobre 1995 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre), au profit de la société Boucherie Sovian, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appu

i de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Garonnaise de Viandes, société anonyme, dont le siège est ... de Bordeaux,

2°/ M. Philippe X..., demeurant ... de Bordeaux, en cassation d'un arrêt rendu le 2 octobre 1995 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre), au profit de la société Boucherie Sovian, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 janvier 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Léonnet, conseiller rapporteur, M. Vigneron, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Léonnet, conseiller, les observations de la SCP Richard et Mandelkern, avocat de la société Garonnaise de Viandes et de M. X..., de Me Luc-Thaler, avocat de la société Boucherie Sovian, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Bordeaux, 2 octobre 1995), que la société Sovian dont l'objet est le négoce de la viande a pour associés MM. X..., Y... et Z...;

qu'après en avoir été le gérant jusqu'au 30 septembre 1987, M. X... en est devenu le directeur commercial, emploi qu'il a occupé jusqu'à la survenance des évènements qui l'ont amené à présenter par lettre du 30 décembre 1991 une proposition de démission et qui ont conduit la société Sovian à le licencier pour faute lourde par lettre du 9 janvier 1992;

que cette entreprise estimant que M. X... avait commis des actes de concurrence déloyale à son égard en constituant la société Garonnaise de viandes (société Garonnaise), ayant le même objet social et dont l'activité commerciale avait commencé courant janvier 1992 en émettant 90 factures concernant toutes d'anciens clients de la société Sovian l'a assigné en dommages et intérêts ainsi que la société Garonnaise devant le tribunal de commerce ;

Attendu que M. X... et la société Garonnaise font grief à l'arrêt de les avoir condamnés in solidum au paiement de dommages et intérêts, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la renonciation, par une partie, à son droit d'interjeter appel d'une ordonnance de référé n'emporte pas acquiescement, au fond, à cette décision;

qu'en décidant, néanmoins, qu'en se désistant de son appel, dirigé contre l'ordonnance de référé lui ayant fait interdiction d'utiliser le sigle "SOGAVIAN", la société Garonnaise de viandes avait admis que l'usage de ce sigle risquait d'entraîner une confusion entre son entreprise et celle exploitée par la société Sovian, la cour d'appel a violé l'article 409 du nouveau Code de procédure civile ;

alors, d'autre part, qu'en décidant, que la société Garonnaise de viandes avait engagé sa responsabilité à l'égard de la société Sovian, en utilisant un sigle présentant un risque de confusion propres à tromper "la clientèle", sans constater que cette utilisation avait effectivement provoqué un déplacement de clientèle et, ainsi, causé un préjudice à la société Sovian, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil;

alors, en outre, que l'action en concurrence déloyale a pour fondement non une présomption de responsabilité, mais les principes régissant la responsabilité pour faute ;

qu'il appartient en conséquence à celui qui se prétend victime d'une concurrence déloyale, de rapporter la preuve que le déplacement de clientèle qu'il invoque au soutien de sa demande a pour cause des agissements fautifs commis par son concurrent, et non à celui-ci de démontrer son absence de faute;

qu'en décidant, néanmoins que, à défaut pour M. X... et pour la société Garonaise de viandes de démontrer que le déplacement de clientèle dont celle-ci a bénéficier a été "spontané", il convenait de "présumer que la captation de clientèle" avait été provoqué par des actes de concurrence déloyale, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant par là-même l'article 1315 du Code civil, ensemble les articles 1382 et 1383 du même Code;

et alors, enfin, que l'ancien salarié peut mettre en oeuvre, dans sa nouvelle activité, les connaissances acquises lors de son dernier emploi, qui ne font pas l'objet d'une protection légale ou conventionnelle;

qu'en décidant, néanmoins, que la seule connaissance que M. X... avait acquise de la clientèle de la société Sovian, qu'elle a d'ailleurs présumée, était, même en l'abence de toute manoeuvre, constitutive d'un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que si la cour d'appel a relevé que la société Garonnaise s'était désistée de l'ordonnance de référé lui faisant défense d'utiliser le sigle SOGAVIAN qui comportait un risque de confusion avec le nom de la société Sovian elle n'en a tiré aucune conséquence juridique et n'a pas déduit de cette circonstance que la société Garonnaise avait acquiescé au fond à cette décision et que la responsabilité de la société Garonnaise était engagée à l'égard de la société Sovian pour cette confusion de noms qui aurait provoqué un déplacement de la clientèle;

que le moyen pris en ses deux premières branches manque en fait ;

Attendu, en second lieu, que la cour d'appel, après avoir relevé que, bien que M. X... n'ait été, tant par les statuts de la société Sovian dont il était porteur de 33 % des parts, que par son contrat de directeur commercial, lié par aucune clause de non-concurrence, a énoncé, à bon droit, qu'il était tenu d'exécuter de bonne foi le pacte social à l'égard de ses deux autres associés "avec lesquels il avait exercé une activité complémentaire";

qu'appréciant les éléments de fait permettant de définir le comportement de M. X..., la cour d'appel a constaté que ce dernier, après avoir obtenu un permis de construire pour édifier "une salle de découpe" de boucherie en gros et après avoir créé la société Garonnaise, a traité "dans le mois qui a suivi le commencement d'exploitation de la société .... 90 affaires avec d'anciens clients de la société Sovian" à l'exclusion de tous autres, cette circonstance "ne pouvant trouver d'explication suffisante dans la liberté des agents économiques de choisir leur fournisseur" et n'ayant été "possible que par l'utilisation faite sans droit par M. X... de la connaissance qu'en sa qualité de directeur commercial il avait acquis de la clientèle de cette société et démontre que la constitution de la SCI, la construction de la salle de découpe et la création de la société Garonnaise de viandes n'étaient en réalité que les actes préparatoires nécessaires à cette captation";

qu'en l'état de ces constatations et énonciations, sans inverser la charge de la preuve et abstraction faite de l'utilisation erronée mais surabondante du terme de "présumer", la cour d'appel a caractérisé la faute constitutive de concurrence déloyale commise par M. X... et la société Garonnaise;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Garonnaise de viandes et M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Boucherie Sovian ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre février mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-21730
Date de la décision : 24/02/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux (2e chambre), 02 octobre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 fév. 1998, pourvoi n°95-21730


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.21730
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