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24/02/1998 | FRANCE | N°95-20264

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 février 1998, 95-20264


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Noorgate jeunes, société à responsabilité limitée, dont le siège est 137, rue maréchal Leclerc, 97400 Saint-Denis la Réunion, en cassation d'un arrêt rendu le 18 juillet 1995 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre civile), au profit :

1°/ de la société Modules, société à responsabilité limitée, dont le siège est ... de la Réunion,

2°/ de la société Sloane and co, don

t le siège est ... de la Réunion, défenderesses à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'app...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Noorgate jeunes, société à responsabilité limitée, dont le siège est 137, rue maréchal Leclerc, 97400 Saint-Denis la Réunion, en cassation d'un arrêt rendu le 18 juillet 1995 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre civile), au profit :

1°/ de la société Modules, société à responsabilité limitée, dont le siège est ... de la Réunion,

2°/ de la société Sloane and co, dont le siège est ... de la Réunion, défenderesses à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 janvier 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Gomez, conseiller rapporteur, M. Vigneron, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Gomez, conseiller, les observations de Me Choucroy, avocat de la société Noorgate jeunes, de Me Guinard, avocat de la société Modules et de la société Sloane and co, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 18 juillet 1995), que les sociétés Sloane and co (société Sloane) et Modules ont assigné la société Noorgate jeunes (société Noorgate) en lui reprochant de contrefaire des modèles de lingerie féminine et d'être responsable de concurrence déloyale ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Noorgate fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel a constaté que la saisie-contrefaçon a été autorisée sur le fondement de la loi du 14 juillet 1909, dont les dispositions étaient inapplicables en l'absence de dépôt;

qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ces constatations d'où résultait la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon en date des 29 et 30 juin 1992, la cour d'appel a violé l'article 12 de la loi du 14 juillet 1909, devenu l'article L. 521-1 du Code de la propriété intellectuelle;

alors, d'autre part, qu'il résulte de l'article 10 de la loi du 12 mars 1952, applicable en l'espèce, que la saisie cesse d'avoir effet si le saisissant n'a pas assigné au fond dans un délai de 30 jours à compter de l'autorisation de saisie;

qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé la disposition susvisée;

et alors, enfin, que la cour d'appel a relevé que la constatation de la contrefaçon et la saisie avaient été autorisées "au visa des lois du 14 juillet 1909 et du 12 mars 1952";

qu'en affirmant, dès lors, que la saisine de la juridiction du fond dans un délai de 30 jours à compter de la saisie était conforme aux dispositions de la loi du 11 mars 1957, pour valider le procès-verbal de saisie-contrefaçon en date des 29 et 30 juin 1992 dressé en application de l'autorisation susvisée, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 68 de la loi du 11 mars 1957, devenu l'article L. 332-3 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel a, sans encourir le grief du moyen, décidé que le procès-verbal de saisie-contrefaçon était valable dès lors que l'autorisation de cette mesure avait été faite sur le fondement de la loi du 12 mars 1952, peu important que la loi du 14 juillet 1909 ait été également visée dans ladite autorisation ;

Et attendu, en second lieu, qu'en décidant que la saisine au fond de la juridiction devait être effectuée dans le délai de trente jours à compter de la saisie, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Noorgate fait grief à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable de contrefaçon et de concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en s'abstenant de préciser si les sociétés Sloane et Modules, qui agissaient en contrefaçon à son encontre, étaient titulaires de droits sur les modèles prétendument contrefaits, droits d'auteur si ces modèles constituaient des oeuvres collectives ou droits résultant de cessions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 9, 35 et 66 de la loi du 11 mars 1957, devenus les articles L. 113-2, L. 131-4 et L. 332-1 du Code de la propriété intellectuelle;

alors, d'autre part, que seules des personnes physiques peuvent concourir à la création d'une oeuvre de collaboration;

qu'en affirmant, dès lors, qu'elle aurait contrefait les créations et productions des sociétés Sloane et Modules et en la condamnant à payer "solidairement" à ces deux sociétés une indemnité globale au titre de la contrefaçon, au motif que celles-ci auraient "conçu, fait fabriquer et commencé à commercialiser une ligne de vêtements de mode en jersey", la cour d'appel a violé l'article 9 de la loi du 11 mars 1957, devenu l'article L. 113-2 du Code de la propriété intellectuelle;

et alors, enfin, qu'en toute hypothèse, la cour d'appel constate que les modèles litigieux ont fait l'objet de trois collections de l'été 1990 à l'été 1992;

qu'en s'abstenant, dès lors, de rechercher si les modèles litigieux auraient présenté une certaine originalité en 1990, et s'ils ne l'avaient pas perdue ultérieurement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2 et 10 de la loi du 12 mars 1952, ainsi que de l'article 66 de la loi du 11 mars 1957, devenu l'article L. 332-1 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu, d'une part, qu'il n'apparaît pas des conclusions de la société Noorgate devant la cour d'appel qu'elle ait soutenu que les modèles litigieux étaient une oeuvre collective;

que la cour d appel n'avait donc pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ;

Attendu, d'autre part, qu'il n'apparaît pas des conclusions de la société Noorgate devant la cour d appel qu'elle ait soutenu le moyen tiré de ce que les sociétés Sloane et Modules ne pouvaient pas être les auteurs des modèles litigieux;

que le moyen mélangé de fait et de droit est nouveau ;

Et attendu, enfin, qu'après avoir décidé que les modèles litigieux présentaient une originalité certaine lors de leur création, la cour d'appel n'avait pas à procéder à la recherche inopérante invoquée par la troisième branche du moyen ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa deuxième branche, n'est pas fondé en ses première et troisième branches ;

Sur le troisième moyen pris en ses deux branches :

Attendu que la société Noorgate fait grief à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable d'actes de concurrence déloyale alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en s'abstenant de rechercher si les slogans publicitaires utilisés par les sociétés Sloane et Modules présentaient une certaine originalité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil;

et alors, d'autre part, qu'en s'abstenant, de la même façon, de préciser si la présentation des produits litigieux par les sociétés Sloane et Modules avait un aspect original et suffisamment caractéristique, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir retenu que les pratiques utilisées par la société Noorgate qui s'adressait à la même clientèle que celle des sociétés Sloane et Modules avaient pour but de la détourner en créant une confusion dans l'esprit des consommateurs, la cour d appel n'avait pas à procéder aux recherches inopérantes prétendument omises;

d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Noorgate fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée au paiement de certaines sommes à titre de réparation du préjudice alors, selon le pourvoi, d'une part, que l ' indemnité nécessaire pour compenser le dommage subi doit être calculée en fonction de la valeur du dommage, sans que la gravité de la faute puisse avoir aucune influence sur le montant de l'indemnité;

que dès lors, en fixant la réparation du préjudice qu'auraient subi les sociétés Sloane et Modules, "eu égard à la gravité des fautes commises par la société Noorgate jeunes", la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil;

et alors, d'autre part, qu'en tenant compte, pour évaluer le préjudice qu'auraient subi les sociétés Sloane et Modules, de la marge brute attendue de la vente des 1000 pièces "contrefaites, commandées et reçues par la société Noorgate jeunes", et que l'huissier instrumentaire avait saisies, la cour d'appel a indemnisé un préjudice inexistant, en violation de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que c'est en tenant compte de la gravité des pratiques de contrefaçon et de concurrence déloyale qui avaient un effet sur le montant du dommage causé, et dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que la cour d'appel a fixé le montant du préjudice subi par les sociétés Sloane et Modules;

d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Noorgate jeunes aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Modules et de la société Sloane and co ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre février mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-20264
Date de la décision : 24/02/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Faute - Confusion créée - Absence d'originalité - Volonté d'induire la clientèle en erreur.

CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Préjudice - Evaluation - Gravité des pratiques.

DESSINS ET MODELES - Contrefaçon - Saisie-contrefaçon - Validité du procès-verbal.


Références :

Code civil 1382
Loi du 12 mars 1952

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre civile), 18 juillet 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 fév. 1998, pourvoi n°95-20264


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.20264
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