AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Slibailautos, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 16 février 1995 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), au profit de M. Jean-Luc X..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de Mlle Y... Outre, demeurant ..., défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 janvier 1998, où étaient présents : M. Vigneron, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Gomez, conseiller rapporteur, MM. Leclercq, Dumas, Léonnet, Poullain, Métivet, conseillers, M. Huglo, Mme Mouillard, M. Ponsot, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Gomez, conseiller, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de la société Slibailautos, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Toulouse, 16 février 1995), que la société Slibailautos, au cours de la procédure collective concernant Mme Z..., a revendiqué la propriété d'un véhicule automobile ayant fait l'objet d'un contrat de location avec promesse de vente le 22 octobre 1992 ;
Attendu que la société Slibailautos fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que le contrat de location avec promesse de vente qui a pour objet un bien destiné à un usage personnel n'est pas soumis à la loi du 2 juillet 1966 relative à la publicité du contrat de crédit-bail, mais relève de la loi du 10 janvier 1978 ;
que la circonstance que Mme Z... ait exercé la profession de commerçante et que le contrat de location avec promesse de vente ait prévu le cas de l'inscription d'un nantissement sur fonds de commerce à la requête d'un créancier, la cessation ou l'apport du fonds de commerce ainsi que la résiliation de plein droit en cas de liquidation ou redressement judiciaire ne pouvait caractériser l'utilisation professionnelle du véhicule Mazda par Mme Z...;
qu'en rejetant sa demande en restitution du véhicule en l'état de ces considérations inopérantes sans rechercher si Mme Z... avait réellement utilisé le véhicule à des fins professionnelles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 10 janvier 1978, de l'article 1-3 de la loi du 21 juillet 1966 et de l'article 8 du décret du 4 juillet 1972;
alors, d'autre part, que Mme Z... avait déclaré que le véhicule serait à usage personnel et que l'offre préalable de location avec promesse de vente versé aux débats mentionnait expressément que le véhicule Mazda était destiné à l'usage personnel de Mme Z...;
que dès lors qu'elle contestait cet usage personnel, il lui appartenait d'apporter la preuve de l'utilisation à des fins professionnelles du véhicule;
qu'en retenant qu'elle "n'apportait pas la preuve de l'utilisation du véhicule avec un usage strictement personnel", bien qu'il appartînt à Mme Z... de justifier de la destination à usage professionnel du véhicule, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil;
et alors, enfin, que le contrat de location avec promesse de vente faisait référence, dans ses articles 4-6, 6-2 et 7, à la loi du 10 janvier 1978;
qu'en affirmant que le contrat la liant à Mme Z... était "soumis à la législation sur le crédit-bail" et que "faute pour elle d'avoir procédé à sa publicité", elle encourait les sanctions prévues par l'article 8 du décret du 4 juillet 1972 et par l'article 3 de la loi du 2 juillet 1966, la cour d'appel a dénaturé par omission les conditions générales de l'offre préalable et du contrat en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que le contrat litigieux n'envisageait pas une utilisation exclusivement personnelle du bien donné en location puisque, d'abord la qualité de commerçant de Mme Z... y était expressément mentionnée ensuite il y était prévu le cas de l'inscription d'un nantissement sur fonds de commerce, la cession ou l'apport d'un fonds de commerce, enfin la résiliation intervenait de plein droit en cas de liquidation ou de redressement judiciaires;
que c'est donc hors toute dénaturation, sans inverser la charge de la preuve et sans avoir à procéder à la recherche prétendument omise, que la cour d'appel a retenu, que faute par la société Slibailautos de rapporter la preuve d'une utilisation strictement personnelle du véhicule donné en location, le contrat était soumis à la législation sur le crédit-bail exigeant sa publicité;
d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Slibailautos aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., ès qualités ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en son audience publique du vingt-quatre février mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.