AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Gérard X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 décembre 1994 par la cour d'appel de Versailles (13e Chambre), au profit de la société Yrel electronics, société anonyme dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 janvier 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Poullain, conseiller rapporteur, MM. Vigneron, Leclercq, Dumas, Gomez, Léonnet, Métivet, conseillers, M. Huglo, Mme Mouillard, M. Ponsot, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Poullain, conseiller, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de M. X..., de Me Choucroy, avocat de la société Yrel electronics, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le conseil d'administration de la société Yrel Electronics a, au début du mois d'octobre 1992, élu son président, nommé un vice-président directeur général et , en la personne de M. X..., ancien président du conseil d'administration de la société dont elle avait repris l'activité à la suite d'un plan de cession, un second directeur général;
que, le 18 février 1993, le conseil d'administration a mis fin aux fonctions de M. X..., ce dont le vice-président l'a avisé le lendemain ;
que M. X... a assigné la société Yrel electronics pour qu'elle soit condamnée à lui payer des dommages-intérêts et que soit ordonnée la publication du jugement ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 116 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Attendu que la révocation du directeur général d'une société anonyme peut intervenir à tout moment et n'est abusive que si elle a été accompagnée de circonstances qui portent atteinte à la réputation ou à l'honneur du dirigeant révoqué ou si elle a été décidée brutalement sans respecter le principe de la contradiction ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. X..., l'arrêt énonce que le conseil d'administration dispose d'un droit de révocation des mandataires sociaux qui peut être exercé à tout moment sans qu'il soit nécessaire d'en avertir au préalable l'intéressé et retient que les formes de la révocation de M. X..., décidée le 18 février 1993 par le conseil d'administration auquel il n'avait pas vocation à participer et dont il a été avisé le 19 février, n'ont pas été abusives ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il résulte de ses propres constatations que la révocation de M. X..., décidée sans qu'il ait été mis en mesure de présenter préalablement ses observations, était irrégulière, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne la société Yrel electronics aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre février mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.