Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 13 juin 1995), qu'à la suite de la mise en redressement judiciaire des sociétés faisant partie du groupe Bonmort, la société Poussard, fournisseur de travaux publics, a fait opposition au paiement des sommes restant dues à ces sociétés pour des marchés de travaux publics et a été admise au passif de ce redressement judiciaire pour le montant de 1 447 841,73 francs, cette créance bénéficiant du privilège prévu par la loi du 26 pluviôse An II et repris par les articles L. 143-6 du Code du travail et 193 du Code des marchés publics ; que le jugement du 30 juin 1992 a arrêté le plan de continuation des sociétés du groupe Bonmort ; que la société Poussard a assigné, le 4 février 1993, la société Bonmort promotion immobilier et l'administrateur judiciaire en vue d'obtenir le paiement de sa créance ;
Attendu que la société Poussard fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'arrêt confirmatif attaqué a violé l'autorité de la chose jugée acquise par l'ordonnance du juge-commissaire du 30 janvier 1992, devenue définitive, admettant la créance de la société Poussard à titre privilégié pour la somme de 1 447 841,73 francs au titre du privilège de la loi du 26 pluviôse An II repris aux articles L. 143-6 du Code du travail et 193 du Code des marchés publics, en ce qu'il a rejeté sa demande tendant au paiement de ladite somme dès lors que celle-ci avait été réglée par les maîtres d'ouvrage publics ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble l'article 78 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, d'autre part, qu'en refusant de sanctionner le privilège susvisé, le jugement attaqué a violé ces textes ; et alors, enfin, que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que le créancier admis au titre du privilège précité ne renonce pas à son droit en autorisant le paiement des sommes dues par les maîtres d'ouvrages publics entre les mains de l'administrateur du redressement judiciaire avec demande de règlement de ce dernier ; qu'ainsi, l'arrêt a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement énoncé que le bénéficiaire du privilège spécial mobilier prévu par l'article L. 143-6 du Code du travail auquel ne s'appliquent pas les dérogations énumérées à l'article 76 de la loi du 25 janvier 1985, était soumis, comme les autres créanciers privilégiés, aux modalités d'apurement du passif décidées par le jugement arrêtant le plan de continuation ; que, sans porter atteinte à l'autorité de la chose jugée par la décision d'admission au passif de la société Poussard à titre privilégié et sans se fonder sur une renonciation de la société Poussard à son droit de paiement préférentiel, elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.