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10/02/1998 | FRANCE | N°95-16504

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 février 1998, 95-16504


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Republic National Bank of New-York, société anonyme, dont le siège est ..., en casation d'un arrêt rendu le 14 avril 1995 par la cour d'appel de Paris (5e chambre, section B), au profit :

1°/ de la société Z et A Conseil, dont le siège est ...,

2°/ de M. Jacques Y..., mandataire-liquidateur, demeurant ..., Place de l'Hôtel de Ville, 92000 Nanterre, pris en sa qualité de mandataire-liquidateur de l

a liquidation judiciaire du groupe Henri de X... et associés,

3°/ de la société Shop ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Republic National Bank of New-York, société anonyme, dont le siège est ..., en casation d'un arrêt rendu le 14 avril 1995 par la cour d'appel de Paris (5e chambre, section B), au profit :

1°/ de la société Z et A Conseil, dont le siège est ...,

2°/ de M. Jacques Y..., mandataire-liquidateur, demeurant ..., Place de l'Hôtel de Ville, 92000 Nanterre, pris en sa qualité de mandataire-liquidateur de la liquidation judiciaire du groupe Henri de X... et associés,

3°/ de la société Shop Vag France, dont le siège est ..., défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 décembre 1997, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Leclercq, conseiller rapporteur, MM. Vigneron, Dumas, Gomez, Léonnet, Poullain, Métivet, conseillers, M. Huglo, Mme Mouillard, M. Ponsot, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Leclercq, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Republic national Bank of New-York, de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Shop Vag France, de la SCP Gatineau, avocat de la société Z et A Conseil, de Me Le Prado, avocat de M. Y..., ès qualités, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur les deux moyens réunis, le premier étant pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 avril 1995), que la Republic National Bank of New York (banque RNB) a escompté trois lettres de change, qui avaient été acceptées par la société Z et A Conseil, à l'ordre de la société du groupe Henri de X...;

qu'invoquant la mauvaise foi de la banque, la société Z et A Conseil a prétendu pouvoir lui opposer l'absence de provision des effets, la société de X... n'ayant pas réglé, comme elle s'y était engagée, les frais afférents à la diffusion télévisée de films publicitaires et ceux-ci ayant été, en raison de sa carence, réglés directement par un tiers, l'annonceur ayant commandé les prestations de ces sociétés;

que la cour d'appel a, à la fois, admis l'exigibilté du montant des effets au profit de la banque RNB, et la responsabilité de celle-ci envers la société Z et A Conseil pour avoir soutenu par ses crédits la société de X..., alors qu'elle était alertée sur sa situation irrémédiablement compromise;

qu'elle a, en conséquence, prononcé la compensation entre le montant des effets et celui de l'indemnisation accordée à la société Z et A Conseil ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'une telle compensation, alors, selon le pourvoi, d'une part, que seule la mauvaise foi du porteur, qui en acquérant la lettre de change aurait agi sciemment au détriment du débiteur, est de nature à permettre à ce dernier d'opposer une exception fondée sur ses rapports personnels avec le tireur;

qu'en se contentant, sous couvert d'un "préjudice" et d'une "compensation" entre la créance de la banque et des dommages-intérêts destinés en réalité à dispenser le débiteur de payer les lettres de change, d'une simple "négligence fautive" du porteur, la cour d'appel a permis à la société Z et A Conseil d'opposer, au porteur de bonne foi, une exception tirée de ses rapports personnels avec le tireur, en violation de l'article 121 du Code de commerce;

alors, d'autre part, que le préjudice de la société Z et A Conseil, débiteur du groupe Henri de X..., ne réside pas dans l'acceptation d'effets de commerce en exécution d'un contrat, mais dans le refus de l'annonceur, la société Shop Vag, son autre cocontractant, de lui rembourser comme convenu ses annonces, en raison d'une convention de ducroire l'obligeant à régler directement les contrats d'espaces publicitaires aux chaînes de télévision impayées;

que ce préjudice n'a pas de lien de causalité direct et certain avec le prétendu maintien artificiel du crédit du groupe Henri de X... par la RNB;

qu'ainsi l'arrêt attaqué a violé l'article 1382 du Code civil;

alors, en outre, que si la société Z et A Conseil n'avait pas pris le risque de faire l'avance pour son client, la société Shop Vag, des sommes dues par elle aux chaînes de télévision, en chargeant, de surcroît, un tiers de les payer, elle ne se trouverait pas confrontée au refus de la société Shop Vag de lui rembourser ces sommes;

que ce préjudice a donc pour cause exclusive la propre légèreté professionnelle de la société Z et A Conseil;

qu'ainsi l'arrêt attaqué a violé l'article 1382 du Code civil :

et alors, enfin, qu'il n'était pas contesté que le groupe Henri de X... avait procédé à l'achat des espaces publicitaires pour le compte de la société Shop Vag et que les messages prévus avaient effectivement été diffusés;

que la seule "inexécution" reprochée au groupe Henri de X... concernait le non-règlement par celui-ci des chaînes de télévision;

que, dès lors, la part de rémunération de la prestation de la société groupe Henri de X... comprise dans la somme réglée au moyen des effets litigieux ne pouvait être constitutive d'un "préjudice" pour la société Z et A Conseil, mais était contractuellement due à la société groupe Henri de X... par Z et A Conseil qui n'a pas manqué de se faire elle-même rémunérer par la société Shop Vag au titre des messages diffusés;

qu'en estimant que le préjudice de Z et A Conseil serait équivalent au montant total des effets impayés, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que dès lors qu'elle a retenu que la banque RNB n'était pas de bonne foi, pour avoir soutenu abusivement par ses crédits la société de X..., bien qu'elle ait été alertée sur sa situation irrémédiablement compromise, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait en retenant au profit de la société acceptatrice non pas une exception découlant de ses rapports personnels avec le tireur, mais une exception contre la banque elle-même ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'en faisant apparaître que la société Z et A ne pouvait laisser à son client, l'annonceur des films publicitaires, la charge d'avoir à payer deux fois les frais afférents à leur diffusion, l'arrêt a pu, dès lors, retenir qu'elle-même pouvait prétendre répercuter sur la banque responsable de l'octroi abusif de crédits d'escompte leur montant, de façon à ne pas avoir à les supporter elle-même, et à ne pas être privée de son profit à l'occasion de telles prestations;

que la cour d'appel a apprécié souverainement le montant des sommes litigieuses à cet égard ;

Attendu, enfin, qu'il ne résulte pas des conclusions soutenues en instance d'appel par la banque, qu'elle ait alors prétendu imputer à la société Z et A ait agi avec une légèreté fautive;

que le grief formulé à cet égard, qui est mélangé de fait et de droit, est nouveau ;

D'où il suit que le grief de la troisième branche du premier moyen est irrecevable et que les autres griefs ne sont pas fondés ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Republic National Bank of New-York aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande présentée à ce titre par la société Z et A, ainsi que par M. Y..., ès qualités ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix février mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-16504
Date de la décision : 10/02/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (5e chambre, section B), 14 mai 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 fév. 1998, pourvoi n°95-16504


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.16504
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