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11/12/1997 | FRANCE | N°96-14050

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 décembre 1997, 96-14050


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé la société Comptoirs modernes économiques, société en nom collectif, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 février 1996 par la cour d'appel d'Angers (3e chambre), au profit de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Sarthe, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience pub

lique du 30 octobre 1997, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Thav...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé la société Comptoirs modernes économiques, société en nom collectif, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 février 1996 par la cour d'appel d'Angers (3e chambre), au profit de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Sarthe, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 1997, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Thavaud, conseiller rapporteur, MM. Favard, Gougé, Ollier, Mme Ramoff, M. Dupuis, conseillers, M. Petit, Mme Guilguet-Pauthe, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Thavaud, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Comptoirs modernes économiques, de Me Delvolvé, avocat de la CPAM de la Sarthe, les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que Pierre X..., chauffeur-livreur au service de la société Comptoirs modernes économiques, est décédé le 8 février 1989, victime d'un malaise cardiaque au cours du travail;

que la Caisse primaire d'assurance maladie a pris en charge l'accident au titre de la législation professionnelle;

que la cour d'appel (Angers, 15 février 1996) a débouté l'employeur de son recours ;

Sur le premier moyen pris en ses quatre branches :

Attendu que la société Comptoirs modernes économiques fait grief à l'arrêt d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen, d'une part, que lorsque la victime est décédée, la Caisse doit faire procéder dans les 24 heures à une enquête qui doit être close dans les 15 jours de la réception par la Caisse de la déclaration d'accident mortel;

que la cour d'appel a constaté que l'employeur avait effectué la déclaration d'accident du travail le 17 février 1989, tandis que l'enquête n'avait été effectuée et close que le 30 mars 1989;

qu' en considérant que cette enquête avait été normalement diligentée, la cour d'appel a violé les articles L. 442-1 et R. 442-14 du Code de la sécurité sociale;

alors, d'autre part, que l'enquête à laquelle doit faire procéder la Caisse en cas de décès de la victime a pour but de rechercher notamment la cause, la nature et les circonstances de l'accident, ainsi que les éléments permettant de statuer sur le caractère professionnel de cet accident;

que la Caisse doit notamment solliciter une autopsie si une telle mesure peut être utile à la manifestation de la vérité et ne peut statuer que lorsqu'elle est en possession de tous les éléments d'appréciation sur le caractère professionnel de la lésion;

qu'en retenant seulement que le décès de Pierre X... bénéficiait de la présomption posée par l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale et qu'il appartenait, en conséquence, à l'employeur de rapporter la preuve de la cause étrangère qu'il allègue, sans rechercher si la Caisse avait effectivement réuni tous les éléments nécessaires pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident, la cour d'appel a violé les articles L. 442-2, L. 442-4 et R. 441-14 du Code de la sécurité sociale;

alors, en outre, que la Caisse doit informer l'employeur, préalablement à sa décision, sur la procédure et sur les points susceptibles de lui faire grief, afin d'assurer le caractère contradictoire de la décision de prise en charge;

que la société Comptoirs modernes faisait valoir qu'elle n'avait pas été informée de la décision de la Caisse de ne pas solliciter d'autopsie, malgré les antécédents d'artérite de Pierre X... qu'elle ignorait également;

que cette abstention, dans ces conditions, lui faisait incontestablement grief en la plaçant dans l'impossibilité de rapporter la preuve du caractère non professionnel de l'accident dont était décédé son salarié;

qu'en se bornant à constater, pour dire que l'employeur ne rapportait pas la preuve de la cause étrangère invoquée, qu'il avait été avisé de l'existence de l'enquête et de la décision qui en avait été la conséquence et qu'il n'avait pas sollicité d'autopsie, quoique cette faculté ne soit pas reconnue à l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 442-4 et R. 441-11 du Code de la sécurité sociale;

alors, enfin, que " le principe de l'égalité des armes", résultant de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté fondamentales, implique l'obligation d'offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire;

que la société Comptoirs modernes faisait valoir que la décision de la Caisse était prise de façon non contradictoire, au vu de mesures d'instruction qu'elle avait seule la possibilité de décider;

que le fait de mettre à sa charge, dans de telles conditions, la preuve du caractère non professionnel de l'accident dont était décédé son salarié constituait une violation de ce principe et du droit à un procès équitable, s'agissant d'une preuve impossible à rapporter en cas de décès par arrêt cardiaque, seule une autopsie laissée à l'appréciation arbitraire de la Caisse étant susceptible d'établir la cause de cet arrêt cardiaque;

qu'en confirmant la décision de la Caisse, faute pour l'employeur de rapporter la preuve de la cause étrangère alléguée, la cour d'appel a violé le texte précité ;

Mais attendu, sur la première branche, que le délai fixé pour la clôture de l'enquête ouverte en vertu de l'article L. 442-1 du Code de la sécurité sociale n'est pas prescrit à peine de nullité ;

Et attendu, sur les autres branches, qu'ayant énoncé à bon droit qu'en l'absence de demande des ayants droit de la victime, la Caisse n'était pas tenue de mettre en oeuvre une autopsie, dès lors qu'elle s'estimait suffisamment informée par l'enquête, l'arrêt retient que l'employeur, qui avait été entendu au cours de cette mesure d'instruction et n'avait alors émis aucune réserve, ni demandé communication du dossier de la Caisse, a été avisé de la prise en charge de l'accident à titre professionnel;

qu'ayant ainsi fait ressortir que la société Comptoirs modernes économiques avait été mise en mesure de présenter des observations au cours de la procédure préliminaire et d' exercer un recours contre la décision de la Caisse, en faisant valoir ses moyens de manière contradictoire, devant les juridictions chargées des affaires de sécurité sociale, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Comptoirs modernes économiques fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen, que les contestations d'ordre médical relatives à l'état de la victime ne peuvent être tranchées par le juge qui doit ordonner une expertise;

que le point de savoir si les conditions du travail ont pu provoquer le malaise cardiaque dont est décédée la victime ou si une autopsie aurait permis de déterminer les causes du décès constitue un problème d'ordre purement médical;

qu'en se prononçant cependant sur une telle question, la cour d'appel a violé l'article L. 141-1 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que Pierre X... étant décédé, aucune expertise médicale technique ne pouvait être ordonnée;

que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Comptoirs modernes économiques aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la CPAM de la Sarthe ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-14050
Date de la décision : 11/12/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Enquête - Autopsie - Caractère contradictoire - Absence de réserve de l'employeur, ou de recours contre la décision de la Caisse - Délai fixé pour la clôture non à peine de nullité.


Références :

Code de la sécurité sociale L442-1

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers (3e chambre), 15 février 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 déc. 1997, pourvoi n°96-14050


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GELINEAU-LARRIVET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:96.14050
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