La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/1997 | FRANCE | N°96-84470

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 novembre 1997, 96-84470


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller GRAPINET, les observations de Me F..., la société civile professionnelle VINCENT et OHL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par : - Z... Fernand, contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 12 septembre 1996, qui

, pour pollutions de cours d'eau, l'a condamné à 20 000 francs d'amende, ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller GRAPINET, les observations de Me F..., la société civile professionnelle VINCENT et OHL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par : - Z... Fernand, contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 12 septembre 1996, qui, pour pollutions de cours d'eau, l'a condamné à 20 000 francs d'amende, dont 5 000 francs avec sursis, a ordonné une mesure de publication de la décision et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 231-3, L. 231-6, L. 231-7, L. 232-2 du Code rural, 121-3 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, défaut de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif a déclaré Fernand Z... coupable du délit de pollution et l'a condamné à la peine de 20 000 francs d'amende dont 5 000 francs avec sursis et a ordonné la publication de la décision ;

"aux motifs que les prélèvements ont été effectués en périodes de sécheresse extrême dans la région considérée, de sorte que le fossé était à la date des faits exclusivement alimenté par les effluents de choucrouterie, et non par les eaux de pluie ou d'éventuels débordements de la nappe phréatique susceptibles de drainer des résidus d'engrais agricoles;

que la comparaison des résultats des analyses des prélèvements effectués en amont du rejet, là où la Brévonne est, elle aussi, bordée de parcelles agricoles donnant lieu à l'utilisation d'engrais, et de ceux effectués dans l'effluent lui-même démontre que celui-ci présentait une pollution d'une nature différente, laquelle était directement imputable aux eaux résiduaires de choucrouterie;

que le débit de l'effluent constaté par les agents verbalisateurs dans leurs procès-verbaux à l'endroit du rejet dans la Brévonne démontre, en outre, que l'absence d'entretien du fossé, dont le dernier curage remontait à 10 ans, n'avait pas eu pour effet d'empêcher ou de retarder l'écoulement des effluents de la conserverie;

que la pollution de la Brévonne en aval du rejet trouve son origine dans les substances provenant des effluents de la choucrouterie dirigée par l'intéressé;

que ces substances ont pour effet de nuire à la nutrition du poisson et même de détruire celui-ci ; qu'il est constant que la station d'épuration est ancienne et que, en l'absence de dispositif d'épandage notamment, elle est fonctionnellement insuffisante pendant la période de fabrication de conserves de choucrouterie;

qu'ayant été verbalisé à plusieurs reprises, avant 1993, Fernand Z... avait connaissance des effets polluants pour la faune aquatique du rejet dans la Brévonne des eaux résiduaires de choucrouterie nonobstant le recours à un système d'épuration ;

"alors, d'une part, que le délit réprimé par l'article L. 232-2 du Code rural suppose que le prévenu ait jeté, déversé ou laissé écouler dans les eaux protégées directement ou indirectement des substances dont l'action ou les réactions ont détruit le poisson ou nuit à sa nutrition, à sa reproduction ou à sa valeur alimentaire;

que Fernand Z... soulignait dans un chef péremptoire de ses conclusions auquel la cour d'appel a omis de répondre que les prélèvements évoqués au soutien de la poursuite n'avaient pas été réalisés au droit de rejet des établissements Gillot, dans la mesure où ceux-ci n'ont aucun accès direct sur la rivière Brévonne et que la station d'épuration dont est dotée cette société rejette les eaux qui ont été traitées dans un fossé dont la plus grande partie est sous la responsabilité d'une association foncière de remembrement;

qu'ainsi la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés par le moyen ;

"alors, d'autre part, que la force majeure exonère le prévenu de toute responsabilité;

que Fernand Z... faisait valoir dans un chef péremptoire de ses conclusions d'appel resté sans réponse que la faiblesse du débit de la Brévonne et la teneur en oxygène de l'eau amoindrie par le phénomène de sécheresse extrême existant à l'époque des constatations, constituaient des événements imprévisibles et irrésistibles de nature à exonérer le prévenu de sa responsabilité pénale;

que, dès lors, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés par le moyen ;

"alors, enfin, que l'entrée en vigueur du nouveau Code pénal, le 1er mars 1994, marque la disparition des délits matériels;

que toute infraction suppose désormais une intention coupable;

que, par suite, il appartenait à l'accusation d'établir une mise en danger délibérée des eaux par le prévenu;

que, faute d'avoir caractérisé cette intention coupable, la cour d'appel n'a pas, derechef, légalement justifié sa décision portant condamnation de Fernand Z..., ès qualité de dirigeant légal de la société Gillot, au titre du délit de pollution" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif a condamné Fernand Z... à payer à la Fédération départementale des associations agréées de pêche la somme de 30 000 francs à titre de dommages-intérêts ;

"aux motifs que, par sa faute, et par deux fois à un an d'intervalle, Fernand Z... a porté atteinte aux intérêts que la partie civile a en charge de défendre;

les préjudices successivement causés par le prévenu ont été d'autant plus conséquents que la seconde fois, la pollution constatée concernait 4 kilomètres de longueur du cours d'eau ;

"alors que l'atteinte à l'environnement ne justifie pas à elle seule le préjudice subi par les fédérations de pêche et la réparation de celui-ci mais il faut que soit constaté que les substances déversées ou qui se sont écoulées ont détruit le poisson ou nuit à sa nutrition ;

"qu'en outre, seul un préjudice personnel direct et certain peut donner lieu à réparation;

qu'en l'espèce, la cour d'appel, en l'absence de tout préjudice personnel direct de la Fédération concerné causé par l'infraction, ne pouvait lui attribuer la réparation qu'elle sollicitait ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, les délits de pollution de cours d'eau dont elle a déclaré le prévenu coupable et ainsi justifié les dommages et intérêts alloués à la Fédération départementale des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique, laquelle tient de l'article L. 238-9 du Code rural le pouvoir d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constitutifs d'infraction à la police de la pêche et portant un préjudice, direct ou indirect, aux intérêts collectifs qu'elle a pour objet de défendre ;

D'où il suit que le moyen, qui remet en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que de la valeur et de la portée des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Culié président, M. Grapinet conseiller rapporteur, MM. X..., C..., Y..., D...
B..., MM. E..., G..., F... conseillers de la chambre, Mmes A..., Verdun conseillers référendaires ;

Avocat général : M. le Foyer de Costil ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le conseiller le plus ancien, en remplacement du président empêché, par le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-84470
Date de la décision : 12/11/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

POLLUTION - Pollution de cours d'eau - Reversement de substances nuisibles aux poissons - Eléments constitutifs.

ACTION CIVILE - Préjudice - Préjudice direct - Association - Fédération départementale des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique - Pollution de cours d'eau.


Références :

Code de procédure pénale 2, 3
Code rural L232-2

Décision attaquée : Cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, 12 septembre 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 nov. 1997, pourvoi n°96-84470


Composition du Tribunal
Président : Président : M. CULIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:96.84470
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award