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21/10/1997 | FRANCE | N°95-11189

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 octobre 1997, 95-11189


Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 8 décembre 1994), que, par acte sous seing privé du 4 mai 1990, la société civile immobilière Genevoise, les époux Michel Y... et la société Saint-Pierre ont vendu sous condition suspensive d'absence de préemption aux sociétés Biessy Promotion, aux droits de laquelle se trouve la société Prisme et Spiref, un groupe des biens immobiliers à Marseille ; que les acquéreurs ont affecté la somme de un million de francs à titre de dépôt de garantie ; qu'appelés à signer l'acte authent

ique de vente le 16 juillet 1990, les acquéreurs s'y sont refusés ; que les ...

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 8 décembre 1994), que, par acte sous seing privé du 4 mai 1990, la société civile immobilière Genevoise, les époux Michel Y... et la société Saint-Pierre ont vendu sous condition suspensive d'absence de préemption aux sociétés Biessy Promotion, aux droits de laquelle se trouve la société Prisme et Spiref, un groupe des biens immobiliers à Marseille ; que les acquéreurs ont affecté la somme de un million de francs à titre de dépôt de garantie ; qu'appelés à signer l'acte authentique de vente le 16 juillet 1990, les acquéreurs s'y sont refusés ; que les vendeurs ont entendu dès lors conserver le dépôt de garantie en invoquant la réalisation de la condition suspensive ; que l'action en restitution de ce dépôt intenté par les acquéreurs a été rejetée par le tribunal de grande instance de Lyon ; que, par arrêt du 22 septembre 1994 (X...), la Cour européenne des droits de l'homme a statué sur l'application du droit de préemption fiscal institué à l'article L. 18 du Livre des procédures fiscales ;

Attendu que la société Saint-Pierre et les époux Y... font grief à l'arrêt d'avoir infirmé ce jugement et de les avoir condamnés à la restitution du dépôt de garantie, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les dispositions de l'actuel article L. 18 du Livre des procédures fiscales, anciennement article 668 du Code général des impôts, relatives au droit de préemption de l'administration des Impôts sont contraires à l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, concernant le droit au respect des biens et de la propriété, en ce qu'elles permettent l'exercice discrétionnaire du droit et en ce qu'elles ne protègent pas le contribuable contre l'arbitraire en sorte qu'elles ne peuvent plus être appliquées ; qu'en l'espèce, l'administration des Impôts ne pouvait donc pas exercer son droit de préemption et qu'ainsi la condition suspensive était réalisée (violation de l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article L. 18 du Livre des procédures fiscales, des articles 1168, 1177, 1583 et 1584 du Code civil) ; et alors, d'autre part, que les clauses relatives à la condition suspensive stipulaient, d'une part, " la présente vente est soumise à la réalisation de la condition suspensive ci-après exprimée savoir :

la renonciation de tout titulaire d'un droit de préemption à l'exercice dudit droit, la déclaration d'intention d'aliéner devra être déposée dans le délai de 15 jours de la signature des présentes ", d'autre part, " la condition suspensive stipulée devra être réalisée au plus tard le 15 juillet 1990, par la renonciation expresse de l'autorité titulaire du droit de préemption ou l'expiration du délai de 2 mois à compter de l'accusé de réception de la déclaration d'intention d'aliéner ", que ces stipulations claires et précises indiquaient bien que seul le droit de préemption urbain de la commune était visé par la condition (violation des articles 1168, 1177, 1583 et 1584 du Code civil) ; et alors, enfin, que la déclaration unilatérale des acquéreurs lors de l'établissement du procès-verbal de difficultés, selon laquelle ils voulaient obtenir " production d'une caution bancaire garantissant le non-exercice par le Trésor public de son droit de préemption en suite de l'acquisition du vendeur ", ne pouvait modifier les stipulations de l'acte de vente du 4 mai 1990 qui ne prévoyaient ni une telle caution, ni l'exercice du droit de préemption fiscal (violation des articles 1168, 1177, 1583 et 1584 du Code civil) ;

Mais attendu, d'une part, que la Cour européenne des droits de l'homme, dans son arrêt du 22 septembre 1994, n'a pas jugé que le principe même du droit de préemption fiscal était contraire à l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, concernant le droit au respect des biens et de la propriété mais que les conditions dans lesquelles ce droit avait été exercé à l'encontre de Mme X... étaient contraires à cette disposition ; qu'il en résulte que le droit de préemption fiscale n'était pas au 16 juillet 1990 radicalement inapplicable ; que, par ce motif de pur droit, l'arrêt se trouve justifié ;

Attendu, d'autre part, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain, que la cour d'appel a interprété les termes ambigus du contrat du 4 mai 1990 relatifs à la condition suspensive ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel n'a pas énoncé que les déclarations des acquéreurs dans le procès-verbal de difficultés du 16 juillet 1990 avaient modifié les stipulations contractuelles mais seulement que ces déclarations ne contredisaient pas l'interprétation qu'elle donnait à la clause litigieuse ;

Que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-11189
Date de la décision : 21/10/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Préemption - Exercice - Compatibilité avec l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne des droits de l'homme (non) - Différence avec le principe de préemption .

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Premier protocole additionnel - Article 1er - Interprétation - Droit au respect des biens - Impôts et taxes - Préemption

La Cour européenne des droits de l'homme, dans son arrêt du 22 septembre 1994 (Hentrich), n'a pas jugé que le principe même du droit de préemption fiscale était contraire à l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, concernant le droit au respect des biens et de la propriété, mais que les conditions dans lesquelles ce droit avait été exercé à l'encontre de Mme Hentrich étaient contraires à cette disposition.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 1 Protocole n° 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 08 décembre 1994


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 oct. 1997, pourvoi n°95-11189, Bull. civ. 1997 IV N° 276 p. 239
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 IV N° 276 p. 239

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : Mme Piniot.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Huglo.
Avocat(s) : Avocats : M. Blanc, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.11189
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