AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Z... Degomme, demeurant 74540 Cusy, en cassation d'un arrêt rendu le 19 octobre 1994 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), au profit :
1°/ de Mme Louise X..., épouse B..., demeurant ...,
2°/ de M. Patrick B..., demeurant La Couchonnière, ...,
3°/ de Mme Annick B..., née Rudy, demeurant La Couchonnière, ...,
4°/ de M. Georges A..., demeurant 58, Cours Becquart Castelbon, 38500 Voiron, défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 8 juillet 1997, où étaient présents : M. Nicot, conseiller doyen, faisant fonctions de président, M. Métivet, conseiller rapporteur, M. Vigneron, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Métivet, conseiller, les observations de Me Guinard, avocat de M. Y..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. A..., les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 19 octobre 1994), que, le 26 juin 1987, MM. A... et Y... ont cédé à M. B... et à Mme X... la totalité des parts de la société à responsabilité limitée Bièvre Chartreuse construction (la société) dont M. A... était le gérant; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire le 6 novembre 1987, les cessionnaires ont assigné MM. A... et Y...; que le Tribunal, après avoir sursis à statuer, dans l'attente de la décision définitive sur l'action pénale mise en mouvement, par M. B..., contre le gérant pour escroquerie, a prononcé la nullité des cessions de parts, sur le fondement du dol, en ce qui concerne la cession intervenue entre M. A... et M. B..., et sur le fondement de l'erreur, en ce qui concerne celle intervenue entre M. Y... et Mme X..., et a condamné les cédants à remboursement ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir annulé la cession de 150 parts sociales de la société, que simple associé, il avait consentie à Mme X..., alors, selon le pourvoi, que l'erreur qui porte seulement sur la valeur de la chose vendue n'est pas une cause de nullité; que, dans une cession de parts sociales, l'erreur, qui ne porte pas sur les droits et prérogatives attachés à ces parts ou sur la possibilité de la société de réaliser son objet social, mais seulement sur la situation financière de la société et la valeur économique et financière des parts, ne constitue pas une erreur sur la substance de la chose; que la cour d'appel ne pouvait donc prononcer la nullité de ladite cession sur un tel fondement, sans méconnaître l'article 1110 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que les cédants avaient fourni à l'expert-comptable, pour l'établissement du bilan, présenté aux cessionnaires préalablement à leur acquisition des parts sociales, des éléments incomplets et des faux renseignements, l'arrêt retient, qu'entre la date du bilan et la date de cession des parts sociales, un passif important était apparu, dû à des agissements du gérant retenus sous la qualification d'escroquerie par la chambre des appels correctionnels et que la société avait été mise en liquidation judiciaire quatre mois après la cession des parts sociales; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu déduire que l'erreur affectait non seulement la valeur des parts mais bien leurs qualités substantielles, ne permettant pas à leurs titulaires de poursuivre l'activité économique constituant l'objet social et entraînait la nullité de la convention ;
d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. A... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du vingt et un octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.