REJET des pourvois formés par :
- X... Daniel,
- Y... Jean-Pierre,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 13e chambre, en date du 14 décembre 1995, qui, pour usurpation de titre et publicité de nature à induire en erreur, les a condamnés à 3 000 francs d'amende, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la Fédération de karaté traditionnel a annoncé, par voie d'affiche ou de prospectus, l'organisation d'un stage payant encadré par Jean-Pierre Y... et Daniel X..., présentés comme titulaires du " 6e dan ITKF " ; que ces derniers ont été cités devant la juridiction correctionnelle par la Fédération française du karaté et arts martiaux affinitaires (FFKAMA), notamment pour publicité trompeuse ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-5 du nouveau Code pénal, 386 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la cour d'appel a déclaré irrecevable l'exception d'illégalité du décret du 2 août 1993 ;
" aux motifs que l'exception d'illégalité doit être soulevée avant toute défense au fond ; que, devant les premiers juges, Daniel X..., Jean-Pierre Y... et René Z... et la Fédération de karaté traditionnel se sont bornés à demander au premier juge de surseoir à statuer en attendant l'issue du recours formé devant le juge administratif à l'encontre du décret susvisé ;
" alors, d'une part, que l'exception d'illégalité d'un texte réglementaire servant de base aux poursuites n'a pas le caractère d'une exception préjudicielle dont l'admission serait soumise aux conditions prévues par l'article 386 du Code de procédure pénale dès lors qu'il appartient au juge répressif lui-même de se prononcer sur la légalité du texte litigieux ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
" alors, en tout état de cause, qu'il résulte des constatations de l'arrêt que, devant les premiers juges, les prévenus avaient soulevé in limine litis une demande de sursis à statuer ; que, dès lors, en application des dispositions de l'article 111-5 du nouveau Code pénal, il appartenait aux juges du fond de statuer, au besoin même d'office et sans attendre l'issue du procès administratif en cours, sur la question de l'illégalité de l'acte administratif réglementaire dont dépendait l'application de la loi et de la solution du procès " ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'exception d'illégalité du décret du 2 août 1993, base des poursuites, la juridiction du second degré relève qu'elle n'a pas été soulevée avant toute défense au fond ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que l'exception était présentée pour la première fois devant elle, la cour d'appel, qui n'avait pas à s'expliquer d'office sur la légalité de l'acte réglementaire qui en était l'objet, a fait l'exacte application de l'article 386 du Code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1 du Code de la consommation et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Daniel X... et Jean-Pierre Y... coupables de publicité de nature à induire en erreur ;
" aux motifs que la mention ITKF ne permettait pas à l'amateur normalement attentif et au fait de cette discipline sportive de savoir que le titre n'avait pas été délivré conformément aux dispositions légales applicables ; que le destinataire du message publicitaire pouvait être trompé et qu'ainsi l'infraction est caractérisée en tous ses éléments ;
" alors que l'appréciation du caractère mensonger ou de nature à induire en erreur d'une publicité doit être faite à partir du sens littéral de ces termes, et non d'une interprétation subjective que ces termes ne comportent pas en eux-mêmes ; qu'en retenant de façon tout à fait arbitraire que l'amateur initié et normalement attentif pouvait être trompé sur les conditions de délivrance du titre de 6e dan, cependant que le message indiquait expressément et sans ambiguïté que le 6e dan dont se prévalaient Daniel X... et Jean-Pierre Y... leur avait été délivré par l'ITKF, la cour d'appel n'a pas légalement justifié la déclaration de culpabilité " ;
Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de publicité trompeuse, les juges d'appel retiennent qu'en application des dispositions combinées de l'article 16 de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, et du décret du 2 août 1993, pris pour son application, le " dan " est un titre fédéral qui ne peut être délivré que par une fédération sportive agréée ; qu'ils ajoutent que, tel n'étant pas le cas de l'association privée " ITKF ", la mention dans la publicité du " 6e dan " délivré par cette organisation était de nature à induire le public en erreur sur le niveau de compétence des professeurs et la qualité de l'enseignement qu'ils dispensent ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son appréciation souveraine du caractère trompeur de la publicité, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ;
Que le moyen ne saurait, dès lors être accueilli ;
Attendu que, la peine et les condamnations civiles étant justifiées par la seule déclaration de culpabilité du chef de publicité de nature à induire en erreur, il n'y a pas lieu, en application de l'article 598 du Code de procédure pénale, d'examiner le deuxième moyen de cassation, relatif à l'usurpation de titre ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.