Attendu, selon l'arrêt critiqué (Paris, 10 février 1995), que la société le Crédit industriel et commercial de Paris (le CIC de Paris) a émis une garantie au profit de la société Banque industrielle et mobilière privée (la BIMP), qui avait avalisé des billets à ordre souscrits par la société PVO en règlement de l'acquisition d'un fonds de commerce ; qu'après la mise en redressement judiciaire de cette société, la BIMP a payé des billets à un porteur de ceux-ci, puis, pour le montant ainsi versé, a appelé la garantie du CIC de Paris ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que le CIC de Paris reproche à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la BIMP la somme de 312 000 francs à titre de provision, alors, selon le pourvoi, d'une part, que seul l'engagement totalement indépendant du contrat de base, tant au plan de sa souscription que de son exécution, constitue une garantie à première demande ; qu'en l'espèce, l'acte précisait qu'il garantissait à la BIMP le remboursement de toutes sommes qui pourraient lui être dues en raison de l'engagement ci-dessus décrit, ce dont il résultait que ledit engagement n'était pas autonome ; que la cour d'appel, en qualifiant néanmoins l'engagement litigieux de garantie à première demande, a violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, que la banque qui accorde une sûreté personnelle autre qu'une garantie à première demande est en droit d'opposer au bénéficiaire de cette garantie toutes les exceptions et griefs tirés des conditions d'exécution du contrat de base ; qu'en refusant cette possibilité au CIC, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que, dès lors qu'elle avait constaté que le CIC de Paris s'était engagé à payer à la BIMP, à la première demande de celle-ci, le montant de ce qu'elle affirmait avoir réglé, à concurrence de 2 500 000 francs, ce qui était l'objet de son obligation, et ce, sans élever d'objections ni d'exceptions, c'est à bon droit que la cour d'appel a qualifié d'autonome l'engagement litigieux, peu important qu'il soit fait référence à l'opération juridique à l'occasion de laquelle celui-ci avait été souscrit ; qu'ayant ainsi exactement qualifié l'engagement du CIC, elle n'avait pas à statuer sur les exceptions soulevées par le CIC de Paris et relatives à l'exécution du contrat de base ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que le CIC de Paris fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en matière de garantie à première demande, l'interdiction d'opposer des exceptions cède en cas d'abus manifeste, lequel ne se confond pas avec la fraude ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui écarte ces exceptions aux motifs erronés que le caractère abusif de l'appel en garantie ne peut être retenu qu'en présence d'une fraude ou d'une collusion frauduleuse, a violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, que constitue un appel abusif de la garantie le fait pour la banque bénéficiaire d'appeler la banque garante tout en prétendant, dans le cadre d'une procédure pendante devant les juges du fond, ne rien devoir en sa qualité d'avaliste et en concluant à l'absence de cause des engagements souscrits ; que la cour d'appel, qui le condamne sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le comportement de la BIMP devant les juges du fond ne témoignait pas d'une attitude manifestement abusive dans l'appel de la garantie, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel n'avait pas à répondre à des conclusions qui étaient inopérantes en ce que le CIC de Paris, qui d'ailleurs ne se prévalait même pas du caractère manifeste de l'abus qu'il invoquait, fondait celui-ci sur le fait que la BIMP prétendait devant un juge que son engagement d'avaliste ne devrait pas être mis en jeu, et non sur la certitude, judiciairement constatée, que cette prétention était fondée, et qu'en conséquence elle n'était tenue d'aucune dette au moment de l'appel de la garantie ; que dès lors, abstraction faite du motif erroné, mais surabondant, critiqué dans la première branche du moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision d'admettre le bien-fondé de l'appel de la garantie ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.