AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Groupement d'intérêt économique Atolis, agissant en la personne de M. Henri Y..., dont le siège est ..., en cassation d'un jugement rendu le 3 février 1994 par la cour d'appel de Montpellier (Chambre sociale), au profit de M. Thierry X..., demeurant 12, Lou Planas, 34540 Balaruc les Bains défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 juin 1997, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Desjardins, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, MM. Brissier, Finance, Lanquetin, conseillers, M. Boinot, Mmes Bourgeot, Trassoudaine-Verger, MM. Richard de la Tour, Soury, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Desjardins, conseiller, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 3 février 1994), que M. X... a été engagé en qualité d'architecte par le GIE Atolis par un contrat de travail conclu le 24 juin 1991 pour une durée déterminée de six mois; que l'employeur a mis fin au contrat pour faute lourde par une lettre du 25 octobre 1991 lui reprochant d'avoir été absent le 24 octobre 1991 à une réunion, dont il avait lui-même fixé la date, et ayant pour objet la réception des travaux d'un chantier dont la responsabilité lui avait été confiée; que le conseil de prud'hommes saisi de la demande de M. X... lui a alloué une somme à titre d'indemnité de précarité mais l'a débouté de ses autres demandes et l'a condamné, sous peine d'une astreinte de 300 francs par jour de retard à compter de la signification du jugement, au remboursement de la provision qui lui avait été allouée par le bureau de conciliation; qu'il a interjeté appel ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le GIE Atolis fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré l'appel recevable, alors, selon le moyen, que M. X... a réglé les causes du jugement du 22 mai 1992 par un chèque du 26 mai 1992, qu'à cette date le jugement, susceptible d'appel, n'était pas exécutoire, même s'il était assorti d'une astreinte, celle-ci ne devant commencer à courir qu'à partir du 15ème jour suivant la notification du jugement, que le paiement fait par M. X..., qui n'a formulé aucune réserve emportait acquiescement au jugement; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 410 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a énoncé à juste titre que M. X... était contraint d'exécuter la condamnation prononcée contre lui, celle-ci étant assortie d'une astreinte et que cette exécution ne pouvait valoir acquiescement; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens réunis :
Attendu que le GIE Atolis fait aussi grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié diverses sommes à titre de dommages-intérêts, alors, selon les moyens, d'une part, que l'intéressé, qui occupait un poste de haute responsabilité, avait de son propre chef fixé la date de réception des travaux au 24 octobre et convoqué les différents corps de métiers par lettre du 18 octobre, alors qu'il savait pertinemment que, convoqué devant un tribunal d'instance, il serait dans l'impossibilité de s'occuper de cette réunion; que son intention de nuire était manifeste, comme l'avait relevé à juste titre le conseil de prud'hommes; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale; et alors, d'autre part, qu'en considérant qu'il suffisait que M. X... ait averti son employeur par écrit le 23 octobre pour que soit écartée son intention de nuire, alors que la question posée était de savoir pourquoi il avait fixé la réunion à une date à laquelle il savait ne pouvoir être présent et qu'étant en charge du dossier, il était le seul à pouvoir diriger cette réunion, la cour d'appel, procédant par voie d'affirmation et selon un raisonnement spécieux, a dénaturé les documents très clairs soumis à son appréciation ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé, hors toute dénaturation, que, si le salarié avait mal organisé son emploi du temps en convoquant les entrepreneurs concernés pour une date à laquelle il ne pouvait ignorer devoir lui-même se présenter devant un tribunal, il avait toutefois averti son employeur par écrit la veille après l'avoir fait oralement, que la réunion avait pu se tenir, un autre architecte ayant pu le remplacer et que le GIE n'avait donc subi aucun préjudice au-delà de la gêne inhérente au remplacement inopiné d'un collaborateur empêché; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu décider que l'erreur commise par le salarié dans la gestion de son emploi du temps n'était pas constitutive d'une faute grave, encore moins d'une faute lourde; que les moyens ne peuvent être accueillis ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Groupement d'intérêt économique Atolis aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.