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01/07/1997 | FRANCE | N°96-82932

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 juillet 1997, 96-82932


REJET des pourvois formés par :
- X... Gérard,
- Y... Denis,
- Z... Riccardo,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rennes, en date du 27 juin 1996, qui les a renvoyés devant le tribunal correctionnel, le premier pour abus de biens sociaux, escroquerie, faux et usage et les deuxième et troisième pour complicité de ces délits.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu l'article 574 du Code de procédure pénale ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, propos

é pour Gérard X... par Me Choucroy et pris de la violation des articles 197, 574, 593 e...

REJET des pourvois formés par :
- X... Gérard,
- Y... Denis,
- Z... Riccardo,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rennes, en date du 27 juin 1996, qui les a renvoyés devant le tribunal correctionnel, le premier pour abus de biens sociaux, escroquerie, faux et usage et les deuxième et troisième pour complicité de ces délits.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu l'article 574 du Code de procédure pénale ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé pour Gérard X... par Me Choucroy et pris de la violation des articles 197, 574, 593 et 802 du Code de procédure pénale, 6-3, a et b, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué, qui a renvoyé Gérard X... devant la juridiction de jugement sous la prévention d'abus de biens sociaux, de faux et usage et d'escroquerie, a décidé que le réquisitoire du ministère public avait été régulièrement déposé au greffe la veille de l'audience ;
" aux motifs que le ministère public n'est pas tenu de verser ses réquisitions au dossier régulièrement déposé au greffe durant le délai édicté par l'article 197, alinéa 2, du Code de procédure pénale (...) ; que les mis en examen ont eu connaissance des faits qui leur sont reprochés tant par leur mise en examen que par l'accès par leurs avocats à l'ensemble des éléments de l'information ; que les droits de la défense et les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme ont été respectés ; que chacun des mis en examen s'est expliqué devant le magistrat instructeur, tant lors des interrogatoires que par le dépôt de nombreuses notes et mémoires, sur les faits qui leur sont reprochés ;
" alors qu'il résulte des dispositions de l'article 197, alinéa 3, du Code de procédure pénale, complété par la circulaire générale C 197 du 1er mars 1993, que, pendant le délai minimum de cinq jours qui doit s'écouler entre la date d'envoi de la lettre recommandée avisant les parties de la date de l'audience de la chambre d'accusation, le dossier, comprenant les réquisitions écrites du procureur général, est déposé au greffe de cette juridiction et tenu à la disposition des avocats des personnes mises en examen ; que dès lors, en l'espèce, où il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le réquisitoire définitif n'a été déposé que la veille de l'audience, la chambre d'accusation a violé les textes précités en admettant la régularité d'un tel procédé, qui a nécessairement porté atteinte aux droits de la défense en interdisant aux personnes mises en examen de connaître avec précision les éléments retenus par l'accusation pour demander leur renvoi devant la juridiction de jugement, les interrogatoires et mises en examen auxquels a procédé le magistrat instructeur ne leur permettant de connaître que l'existence à leur encontre d'indices graves et concordants de participation à des faits constitutifs d'infractions sans que cette connaissance soit suffisamment précise et détaillée pour leur permettre de préparer utilement leur défense, conformément aux dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour Riccardo Z... et Denis Y... par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et pris de la violation des articles 197 et 593 du Code de procédure pénale, 6-3 b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé le renvoi devant le tribunal correctionnel de Riccardo Z... et Denis Y... ;
" aux motifs que le réquisitoire du ministère public a été régulièrement déposé la veille de l'audience ; qu'il n'est en effet pas tenu de verser ses réquisitions au dossier déposé au greffe durant les délais édictés par l'article 197, alinéa 2, du Code de procédure pénale ; que les mis en examen ont eu connaissance des faits qui leur sont reprochés tant par leur mise en examen que par l'accès par leurs avocats à l'ensemble des éléments de l'information ; que chacun des mis en examen s'est expliqué devant le magistrat instructeur, tant lors des interrogatoires que par le dépôt de nombreuses notes et mémoires, sur les faits qui leur sont reprochés ;
" alors, d'une part, que l'article 6-3 b de la Convention européenne des droits de l'homme impose d'informer la personne poursuivie de manière détaillée de la nature et de la cause de l'accusation dont elle est l'objet et de lui donner le temps et les facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; que devant la chambre d'accusation le débat est contradictoire ; que le dépôt la veille de l'audience à 16 heures 10 d'un réquisitoire de 35 pages, qui non seulement fait la synthèse des éléments recueillis au cours de l'information mais les interprète et les apprécie pour conclure qu'il existe des charges suffisantes justifiant du renvoi des personnes mises en examen devant la juridiction de jugement ne permet pas à celles-ci de disposer d'un délai suffisant pour préparer leur défense sur les conclusions en vue de l'audience devant la chambre d'accusation qui, ayant évoqué en cours d'instruction, est appelée à se prononcer directement sur le règlement de la procédure ; qu'ainsi l'arrêt attaqué, rendu à l'issue d'une procédure irrégulière et attentatoire aux droits de la défense, ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
" alors, d'autre part, que, dans un mémoire régulièrement déposé le 4 juin 1996, Riccardo Z... faisait valoir qu'il ne pouvait se défendre utilement, le dossier déposé au greffe ne comportant toujours pas, deux jours avant l'audience, les réquisitions du ministère public ; que dès lors la chambre d'accusation ne pouvait s'abstenir de rechercher si les réquisitions, déposées la veille de l'audience, ne comportaient pas des appréciations et interprétations des éléments recueillis au cours de l'information auxquelles les personnes mises en examen devaient pouvoir répondre dès lors qu'elles fondaient les conclusions tendant au renvoi devant la juridiction de jugement ; qu'ainsi, privé de motif, l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
" alors, enfin, que l'arrêt attaqué ne pouvait, sans méconnaître l'égalité des armes et les droits de la défense, reproduire littéralement les 35 pages du réquisitoire définitif dont les mis en examen n'avaient pu avoir au plus tôt connaissance que la veille de l'audience à 16 heures 10, soit dans un délai qui manifestement ne leur permettait pas de disposer du temps nécessaire pour analyser et critiquer les réquisitions ; qu'à cet égard encore l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité pris de ce que les réquisitions du procureur général avaient été déposées au greffe de la chambre d'accusation la veille de l'audience, les juges se prononcent par les motifs repris aux moyens ;
Attendu que en se déterminant ainsi, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet l'article 197, alinéa 3, du Code de procédure pénale n'impose pas au procureur général de verser ses réquisitions au dossier lors de son dépôt au greffe de la chambre d'accusation pour y être tenu à la disposition des parties dans le délai prévu par ce même texte ; qu'il suffit, comme en l'espèce, que ces réquisitions aient été jointes au dossier la veille de l'audience ;
Que, par ailleurs, les demandeurs ne sauraient invoquer la violation des dispositions de l'article 6, paragraphe 3, a et b, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'ils ont été informés, lors de leur mise en examen, de la nature et de la cause des accusations portées contre eux, au sens de l'article précité, et que les réquisitions du ministère public, fondées sur la seule analyse du dossier de l'information, auquel ils ont eu régulièrement accès, n'avaient d'autre objet que de demander à la chambre d'accusation d'écarter les demandes d'actes d'instruction présentées par eux et d'ordonner leur renvoi devant le tribunal correctionnel pour certains des chefs d'accusation qui leur avaient été notifiés ;
Que, enfin, la circonstance que les motifs de l'arrêt attaqué reproduisent les réquisitions du ministère public ne peut donner ouverture à cassation dès lors qu'il n'est pas établi, ni même allégué, qu'en procédant ainsi la chambre d'accusation ait omis de répondre aux chefs péremptoires des mémoires qui lui étaient soumis ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Riccardo Z... et Denis Y... par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et pris de la violation des articles 213, 574, 593, 689 du Code de procédure pénale, 147, 150, 151 de l'ancien Code pénal, 441-1 du Code pénal, 437-3° de la loi du 24 juillet 1966 :
" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Riccardo Z... et Denis Y... devant le tribunal correctionnel des chefs de complicité de faux, usage de faux et abus de confiance au préjudice de la société Simo commis par Gérard X... ;
" aux motifs que, au lieu de facturer de manière distincte à la société Le Talin ses interventions et le crédit qu'elle accordait, la Société financière privée se faisait adresser directement des factures, libellées au nom de la société Le Talin, émises par l'exportateur, et que de nouvelles factures, au nom toujours de l'exportateur mais majorées de 16 à 30 % et rédigées soit sur des documents originaux soit sur des photocopies, étaient établies au siège de la Société financière privée, et adressées à la société Le Talin pour servir de document contractuel pour la lettre de crédit tirée sur la banque française de cette société ; que Gérard X... a reconnu que la majoration n'était pas constituée de la seule commission de la SFP mais représentait également des sommes partagées avec le fournisseur et servant pour la part lui revenant à verser des commissions occultes ; que Gérard X... venait toutes les trois semaines au siège de la Société financière privée à Genève, utilisait un bureau mis à sa disposition pour vérifier la facturation et donnait ses instructions pour établir les fausses factures à une secrétaire de la Société financière privée ; la relation faite par Denis Y... des circonstances dans lesquelles Gérard X... avait rédigé les fausses factures dans les locaux de la Société financière privée, avec l'aide notamment d'un employé, exclut que Riccardo Z... ait pu en être tenu dans l'ignorance, ce type de pratiques nécessitant l'accord de Riccardo Z... et donc sa complicité ; en tant que responsable de la SFP, sa responsabilité pénale résulte de l'assistance apportée à ses collaborateurs et de l'accord, si ce n'est l'encouragement, donné à l'utilisation de pratiques condamnables au regard du droit français ;
" alors, d'une part, qu'il résulte des constatations de l'arrêt que les factures prétendument fausses ont été fabriquées en Suisse et émanaient de sociétés étrangères ; que, dès lors, l'arrêt ne pouvait renvoyer les personnes mises en examen, et notamment Riccardo Z..., résident Suisse, devant des juridictions françaises sans constater que les faits reprochés étaient également condamnables au regard de la loi Suisse ;
" alors, d'autre part, qu'il n'y a de complicité qu'autant qu'il existe un fait principal punissable ; que l'arrêt attaqué ne relève nulle part quelles sont les charges retenues contre Gérard X... susceptibles de caractériser des abus de biens sociaux au préjudice des sociétés Simo et X... Industrie, pour lesquels la complicité de Riccardo Z... et Denis Y... est retenue ; qu'ainsi privé de motif l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
" alors, enfin, que la complicité par aide et assistance suppose l'accomplissement d'actes positifs et ne peut s'induire d'une simple abstention ou de la seule connaissance des faits délictueux ; qu'en outre la chambre d'accusation n'a pas d'autre pouvoir que d'examiner si les faits retenus à la charge des personnes mises en examen sont susceptibles d'une qualification pénale ; que, dès lors, l'arrêt attaqué, qui se borne à affirmer que Riccardo Z... n'a pu " être tenu dans l'ignorance de ces pratiques qui nécessitent l'accord de Riccardo Z... et donc sa complicité sans relever aucun fait positif que l'information aurait permis de retenir à sa charge, est privé de motif et excède la compétence de la chambre d'accusation en se prononçant déjà sur la culpabilité " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour Riccardo Z... et Denis Y... par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et pris de la violation des articles 213, 514 et 543 du Code de procédure pénale, 405 de l'ancien Code pénal, 313 du nouveau Code pénal :
" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Riccardo Z... et Denis Y... devant le tribunal correctionnel du chef de complicité de l'escroquerie commise par Gérard X... ;
" alors, d'une part, que la complicité n'existe que si l'aide est apportée sciemment à l'auteur principal, c'est-à-dire en connaissance du caractère délictueux de ses agissements ; que l'arrêt attaqué ne relève nulle part que Riccardo Z... et Denis Y... aient su ou aient pu savoir que Gérard X... dissimulait aux acquéreurs des parts de la société X... Industrie la véritable situation du groupe, et tentait ainsi de les escroquer ; qu'ainsi dépourvu de motifs l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
" et alors, d'autre part, que l'arrêt attaqué ne retient l'existence d'aucun fait personnellement imputable à Riccardo Z..., en sorte que le renvoi de celui-ci du chef de complicité d'escroquerie n'est donc pas motivé et l'arrêt à cet égard encore ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les moyens se bornent à critiquer les énonciations de l'arrêt attaqué relatives aux charges que la chambre d'accusation a retenues contre les prévenus et à la qualification qu'elle a donnée aux faits poursuivis ; que, ces énonciations ne contenant aucune disposition définitive que le tribunal n'aurait pas le pouvoir de modifier, les moyens sont irrecevables en application de l'article 574 susvisé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-82932
Date de la décision : 01/07/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CHAMBRE D'ACCUSATION - Procédure - Audience - Dossier de la procédure - Dépôt préalable du dossier au greffe - Délai - Réquisitions du procureur général (non).

1° L'article 197, alinéa 3, du Code de procédure pénale n'impose pas au procureur général de verser ses réquisitions au dossier lors de son dépôt au greffe de la chambre d'accusation pour y être tenu à la disposition des parties dans le délai prévu par ce même texte. Il suffit que ces réquisitions aient été jointes au dossier la veille de l'audience.

2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Procédure - Convention européenne des droits de l'homme - Article 6 - paragraphe 3 - a et b - Dépôt des réquisitions du procureur général la veille de l'audience.

2° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - 3 a et b - Chambre d'accusation - Procédure - Audience - Dépôt des réquisitions du procureur général la veille de l'audience.

2° Le versement au dossier des réquisitions du procureur général la veille de l'audience de la chambre d'accusation ne porte pas atteinte aux dispositions de l'article 6, paragraphe 3, a et b, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que les personnes poursuivies ont été informées, lors de leurs mises en examen, de la nature et de la cause des accusations portées contre elles, au sens de l'article précité, et que les réquisitions du ministère public, fondées sur la seule analyse du dossier de l'information, auquel ces personnes ont eu constamment accès, n'avaient d'autre objet que de demander à la chambre d'accusation d'écarter les demandes d'actes d'instruction présentées par elles et d'ordonner leur renvoi devant le tribunal correctionnel pour certains des chefs d'accusation qui leur avaient été notifiés.


Références :

2° :
1° :
Code de procédure pénale 197 al. 3
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950, art. 6, paragraphe 3, a et b

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (chambre d'accusation), 27 juin 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 jui. 1997, pourvoi n°96-82932, Bull. crim. criminel 1997 N° 260 p. 886
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 260 p. 886

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Guerder, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Desportes.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan, MM. Choucroy, Copper-Royer.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:96.82932
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