AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jean-Jacques X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 29 mars 1994 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale), au profit :
1°) de Mme Françoise Z..., demeurant ..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Bois industriels,
2°) l'ASSEDIC-AGS, du Sud-Ouest, dont le siège est ..., défenderesses à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 mars 1997, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen, faisant fonctions de président, M. Chagny, conseiller rapporteur, M. Carmet, conseiller, Mmes Pams-Tatu, Lebée, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Chagny, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de M. X..., de la SCP Boré et Xavier, avocat de Mme Z..., ès qualités, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'ASSEDIC-AGS du Sud-Ouest, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 29 mars 1994 ), qu'à la suite de la reprise de la société X... et fils par la société Bois industriels, M. X... est devenu actionnaire minoritaire de cette dernière société qui l'a engagé en qualité de directeur technique le 2 avril 1988; qu'il a été nommé président du conseil d'administration le 21 mars 1989 et a démissionné le 29 décembre suivant; que la liquidation judiciaire de la société Bois industriels ayant été prononcée le 18 juin 1991, il a été licencié par le liquidateur ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes en paiement d'un solde de salaires et d'indemnités résultant de la rupture de son contrat de travail alors que, premièrement, c'est au mandataire liquidateur qui refuse d'admettre les créances salariales d'un directeur technique au passif de la liquidation judiciaire d'une société de rapporter la preuve que le salarié n'exerçait pas ses fonctions sous un lien de subordination; qu'en déboutant M. X... de ses demandes de salaires et d'indemnités en raison de ce que celui-ci ne justifiait pas de l'existence d'un quelconque lien de subordination, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil; alors que, deuxièmement, la qualité de dirigeant de fait d'une société n'est pas incompatible avec celle de salarié et que celui-ci peut, dans l'exercice effectif de tâches distinctes de la direction générale de la société, rester sous la subordination de la société, même si en fait, il ne reçoit pas d'ordres; qu'en l'espèce, il est constant que M. X..., associé minoritaire, remplissait en exécution de son contrat de travail, des tâches techniques distinctes de celles de la direction générale de la société Bois industriels et était rémunéré pour l'exécution de ces tâches; qu'en se fondant sur sa seule qualité de dirigeant de fait de la société Bois industriels et sur l'absence prétendue d'ordres reçus du conseil d'administration pour écarter tout lien de subordination de M. X... à l'égard de cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-1 du Code du travail ; alors que, troisièmement, en déniant l'existence d'un lien de subordination entre M. X... et la société anonyme Bois indutriels du seul fait que l'intéressé avait, le 5 février 1991, signé un chèque dont le montant excédait sa délégation de signature et sollicité la désignation d'un administrateur "ad hoc" chargé de déposer le bilan de l'entreprise sans s'expliquer sur les conclusions de M. X... qui avait fait valoir que le P.D.G. M. Y... avait démissionné de ses fonctions et que c'était à la demande des associés majoritaires, résidant en Suède, qu'il avait entrepris des démarches pour obtenir la désignation d'un administrateur ad hoc chargé de déposer le bilan de l'entreprise sans s'expliquer sur les conclusions de M. X... qui avait fait valoir que le P.D.G.
M. Y... avait démissionné de ses fonctions et que c'était à la demande des associés majoritaires, résidant en Suède, qu'il avait entrepris des démarches pour obtenir la désignation d'un administrateur ad hoc de sorte qu'il n'avait agi que sous la contrainte des circonstances et afin de sauvegarder ses intérêts d'associé minoritaire, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-1 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, sans inverser la charge de la preuve, a relevé, d'une part, que M. X... n' avait reçu aucun ordre et n'avait été soumis à aucun contrôle dans l'exercice de ses fonctions techniques et, d'autre part, qu'après la démission du président directeur général, il s'était comporté en dirigeant de fait; qu'elle a pu en déduire l'absence de tout lien de subordination et, par conséquent, l'inexistence du contrat de travail; que le moyen ne saurait être accueilli dans aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale , et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.