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13/05/1997 | FRANCE | N°95-14035

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 mai 1997, 95-14035


Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 1er février 1995) que la société Parfumerie Jerbo (société Jerbo) exploite un fonds de commerce de vente au détail de parfums à Aulnay-sous-Bois, dans lequel elle commercialise les produits de 70 marques les plus représentatives du marché, couvrant ainsi plus de 95 % de l'offre disponible en matière de parfumerie de luxe ; que, dans le cadre de ses activités, elle a conclu avec la société Estée Lauder un contrat de distribution sélective, renouvelable chaque année ; que, par lettre du 8 juillet 1991, cette en

treprise lui a fait connaître qu'elle avait décidé " de cesser tout...

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 1er février 1995) que la société Parfumerie Jerbo (société Jerbo) exploite un fonds de commerce de vente au détail de parfums à Aulnay-sous-Bois, dans lequel elle commercialise les produits de 70 marques les plus représentatives du marché, couvrant ainsi plus de 95 % de l'offre disponible en matière de parfumerie de luxe ; que, dans le cadre de ses activités, elle a conclu avec la société Estée Lauder un contrat de distribution sélective, renouvelable chaque année ; que, par lettre du 8 juillet 1991, cette entreprise lui a fait connaître qu'elle avait décidé " de cesser toutes relations commerciales avec elle ", au motif qu'elle n'avait pas rempli, en 1990-1991, les conditions de la clause d'approvisionnement lui imposant de maintenir en permanence un assortiment représentant 80 % des produits de la marque, d'une valeur de 92 500 francs hors taxe, le distributeur s'engageant, en outre, à acheter chaque année au concédant deux fois au moins la valeur de ce stock ; qu'estimant que la résiliation du contrat était due à l'impossibilité pour elle de remplir les conditions prévues par la clause d'approvisionnement, la société Jerbo a assigné la société Estée Lauder devant le tribunal de commerce pour que cette entreprise soit déclarée responsable de cette rupture, condamnée à lui verser des dommages et intérêts, et l'obliger à satisfaire les commandes qu'elle lui avait faites depuis le mois de juillet 1991 ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Estée Lauder fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré illicite la clause de chiffre d'achats minimum figurant dans les conditions générales de vente annexées au contrat de distribution sélective, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'une clause fixant un minimum d'achat a nécessairement pour objet d'écarter d'un réseau de distribution sélective dans un but de rationalité économique des distributeurs les plus petits et de réserver l'accès au réseau à ceux susceptibles par définition de réserver à la marque considérée une part de leur chiffre d'affaires supérieure à sa part de marché ; que la cour d'appel, qui relève qu'en l'espèce la clause litigieuse tend à améliorer la distribution des produits et le service rendu aux consommateurs en évitant l'accroissement des coûts de distribution et la détérioration de l'image de marque des produits, ce dont il résultait qu'elle échappait à l'interdiction de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, a méconnu ses propres énonciations et violé les articles 7 et 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; alors, d'autre part, qu'en ne justifiant pas en quoi la clause litigieuse ne serait pas nécessaire à la réalisation desdits objectifs ou entraînerait la suppression de la concurrence sur une partie substantielle du marché en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 7, 10 et 36 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; et alors, enfin, que la cour d'appel, qui constate que le montant minimum d'achats était déterminé par référence au stock minimum que le distributeur était tenu de détenir et à sa rotation, ne pouvait tenir cette clause pour illicite sans rechercher, comme l'y invitaient les écritures d'appel de la société Estée Lauder, si cette obligation d'achat n'était pas nécessaire pour garantir au consommateur une offre constante de produits de qualité ; que, faute d'avoir procédé à cette recherche, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées ;

Mais attendu que la cour d'appel, après avoir constaté que la clause litigieuse imposait à la société Jerbo d'acheter chaque année au concédant " au moins deux fois la valeur du stock minimum " d'une valeur de 92 500 francs hors taxe, le montant de ces achats ayant été fixé par la société Estée Lauder, et, après avoir relevé que l'obligation ainsi imposée était disproportionnée par rapport au pourcentage des ventes de la société Estée Lauder sur l'ensemble du marché, a énoncé que ce chiffre minimal d'achats limitait la concurrence tant à l'intérieur de la marque Estée Lauder qu'entre celle-ci et d'autres marques concurrentes, dans la mesure où elle avait pour effet, d'un côté, de réserver l'accès au réseau de distribution au seul revendeur qui était en mesure de souscrire à un tel engagement et, de l'autre, de contraindre les distributeurs agréés à consacrer une part significative de leurs efforts à la vente des produits contractuels ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations la cour d'appel, qui a pu estimer que cette clause litigieuse ne présentait pas le " caractère raisonnable " devant s'attacher à une clause d'approvisionnement minimum prévue dans un contrat de distribution sélective et qu'elle était, par conséquent, illicite au regard des dispositions des articles 7 et 9 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, n'a pas encouru, sans avoir à effectuer d'autres recherches, les griefs du moyen ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen, pris en ses trois branches : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-14035
Date de la décision : 13/05/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE (ordonnance du 1er décembre 1986) - Pratique anticoncurrentielle - Entente - Conditions - Entrave à la concurrence - Appréciation - Pratique illicite - Accords de distribution - Clause d'approvisionnement minimum - Caractère déraisonnable .

Justifie sa décision la cour d'appel qui, pour décider qu'une clause d'approvisionnement minimum contenue dans un contrat de distribution sélective ne présentait pas le " caractère raisonnable " devant s'attacher à un contrat d'approvisionnement et était par conséquent illicite au regard des dispositions des articles 7 et 9 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, retient que l'obligation d'approvisionnement ainsi imposée était disproportionnée par rapport au pourcentage des ventes du fournisseur sur l'ensemble du marché et qu'elle avait pour effet, d'un côté, de réserver l'accès aux seuls revendeurs qui étaient en mesure de souscrire à un tel engagement et, de l'autre, de contraindre les distributeurs agréés à consacrer une part significative de leurs efforts à la vente des produits contractuels.


Références :

ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 7, art. 9

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 février 1995

A RAPPROCHER : Chambre commerciale, 1994-01-04, Bulletin 1994, IV, n° 4, p. 4 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 mai. 1997, pourvoi n°95-14035, Bull. civ. 1997 IV N° 131 p. 113
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 IV N° 131 p. 113

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Mourier.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Léonnet.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.14035
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