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19/03/1997 | FRANCE | N°95-13364

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 19 mars 1997, 95-13364


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Microsoft France, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 décembre 1994 par la cour d'appel de Paris (16e chambre, section B), au profit de la société Les Fjords, SCI, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 février 1997, o

ù étaient présents : M. Beauvois, président, M. Peyrat, conseiller rapporteur, Mlle Fosser...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Microsoft France, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 15 décembre 1994 par la cour d'appel de Paris (16e chambre, section B), au profit de la société Les Fjords, SCI, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 février 1997, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Peyrat, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Boscheron, Toitot, Mme Di Marino, M. Bourrelly, Mme Stéphan, MM. Guerrini, Dupertuys, Philippot, conseillers, M. Pronier, Mme Fossaert-Sabatier, conseillers référendaires, M. Weber, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Peyrat, conseiller, les observations de Me Cossa, avocat de la société Microsoft France, de la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat de la SCI Les Fjords, les conclusions de M. Weber, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 1994), que la société civile immobilière Les Fjords (SCI) a, le 15 avril 1990, donné à bail à la société Microsoft France, des locaux à usage de bureaux dont elle est propriétaire, le contrat stipulant que la société Microsoft bénéficierait pendant la première période biennale d'une faculté de résiliation pour le 15 avril 1991 et le 15 octobre 1991; que la société Microsoft a donné congé par lettre du 3 juin 1991; que la SCI a adressé un commandement de payer le loyer et les charges du quatrième trimestre 1991 à la société Microsoft qui a fait opposition au commandement; que la bailleresse l'a alors assignée en nullité du congé et en paiement des loyers échus ;

Attendu que la société Microsoft France fait grief à l'arrêt de dire que le congé délivré n'était pas conforme au décret du 30 septembre 1953, que le bail a continué de recevoir effet et de la condamner au paiement du loyer et des charges échus au troisième trimestre 1994, alors, selon le moyen, "1°) que, s'il résulte de l'article 5 du décret du 30 septembre 1953 que la notification du congé par un acte extrajudiciaire est une formalité substantielle, cette règle ne peut régir de plein droit que les congés visés par ce texte; que, dès lors, en considérant que les dispositions dudit décret relatives à la forme des congés devaient trouver nécessairement application en l'espèce au congé délivré à fin de résiliation anticipée, après avoir constaté qu'en prévoyant cette faculté de résiliation, les parties avaient bien dérogé aux dispositions du statut légal, la cour d'appel n'a pas tiré, de ses propres constatations, les conséquences qui s'en évinçaient nécessairement au regard de l'article 1134 du Code civil qu'elle a ainsi violé; 2°) qu'en déduisant le caractère substantiel de la formalité d'un acte extrajudiciaire prévu par la clause litigieuse, du seul fait que ladite clause est claire lorsqu'elle prévoit cette formalité, la cour d'appel s'est déterminée par une considération inopérante, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil; 3°) que la vocation d'un acte extrajudiciaire étant d'être signifié et celle d'une lettre d'être adressée, la clause litigieuse relative à la résiliation anticipée fait naître une ambiguïté en stipulant que le preneur "devra adresser par acte extrajudiciaire un congé"; qu'en affirmant, néanmoins, pour se refuser à toute interprétation, que cette clause conférait un caractère substantiel à la formalité d'un acte extrajudiciaire, dès lors que la référence à un tel acte est claire et que l'emploi simultané du verbe "adresser" est une impropriété n'altérant pas la clarté de la clause, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient, nécessairement quant à l'ambiguïté de cette clause et à la nécessité de l'interpréter sur le point de savoir si l'acte extrajudiciaire était une formalité substantielle ou une formalité exigée seulement ad probationem, et a ainsi de nouveau violé l'article 1134 du Code civil" ;

Mais attendu qu'ayant retenu que si les parties ont bien dérogé aux dispositions du décret du 30 septembre 1953, en instituant pour le preneur une faculté de résiliation anticipée, toutes les autres dispositions de ce texte et notamment celles relatives à la forme des congés restant applicables, que le préambule du bail mentionnait sans équivoque que la location était consentie conformément aux dispositions du décret du 30 septembre 1953, et que l'impropriété du terme "être adressée" ne pouvait amoindrir la portée de la stipulation ayant trait à l'obligation d'un congé donné par acte extrajudiciaire, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Microsoft fait grief à l'arrêt de dire que le congé délivré n'était pas conforme au décret du 30 septembre 1953, que le bail a continué à recevoir effet et de la condamner au paiement du loyer et des charges échus au troisième trimestre 1994, alors, selon le moyen, "qu'il résulte tant des dispositions de l'article 3-1 du décret du 30 septembre 1953 que des stipulations du bail litigieux que la validité du congé donné par le locataire pour l'expiration d'un période triennale n'est soumise à aucune autre condition de forme que sa délivrance par acte extrajudiciaire neuf mois au moins avant l'expiration de cette période, et qu'il suffit donc que cet acte extrajudiciaire manifeste clairement l'intention du locataire de mettre fin au bail, la résiliation de celui-ci intervenant alors à la première date pour laquelle il pouvait valablement être résilié; qu'en l'espèce, la société Microsoft, qui avait libéré les lieux depuis le mois de juillet 1991, avait adressé à la bailleresse le 24 octobre 1991 un constat d'huissier en date du 11 octobre 1991 attestant de cette libération et lui avait rendu les clés des locaux le 26 novembre 1991, avait fait délivrer à la SCI le 3 décembre 1991, un acte extrajudiciaire portant opposition à commandement, dans lequel elle faisait valoir qu'elle considérait que le bail était résilié depuis le 15 octobre 1991; que, dès lors, en s'en tenant aux seules énonciations de cet acte extrajudiciaire relatives à son objet immédiat, à savoir l'opposition à commandement, sans rechercher si les circonstances dans lesquelles il avait été délivré (libération des lieux, remise des clés) et le fait que la société Microsoft y soutenait que le bail était résilié depuis le 15 octobre 1991, n'impliquaient pas nécessairement que, pour le cas où le bail ne serait pas regardé comme résilié à cette dernière date, ledit acte extrajudiciaire ne valait pas congé pour la première échéance suivante à laquelle le bail pouvait contractuellement être résilié, c'est à dire pour la fin de la période triennale s'achevant le 15 avril 1993, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3-1 et 5 du décret du 30 septembre 1953, ensemble au regard de l'article 1134 du Code civil" ;

Mais attendu qu'ayant relevé que si aucune forme particulière ne s'impose pour la rédaction d'un congé, sauf reproduction des mentions prévues par la loi, encore faut-il qu'il se présente comme un acte ayant pour but de prévenir d'une façon non équivoque le cocontractant de la volonté de mettre fin au bail pour la date et les conditions précisées, la cour d'appel qui a souverainement retenu que tel n'était pas le cas, l'opposition à commandement ne contenant aucune mention de cette nature et ne pouvant donc avoir l'effet d'un congé pour le 15 octobre 1991, date contractuelle, ni même pour la fin de la période biennale qui n'y était pas visée, a, sans avoir à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Microsoft France aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Microsoft France à payer à la SCI Les Fjords la somme de 9 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile , et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 95-13364
Date de la décision : 19/03/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

(sur le 1er moyen) BAIL COMMERCIAL - Congé - Bail comportant une faculté de résiliation anticipée - Forme du congé - Acte extrajudiciaire - Non-respect - Effet - Dette des loyers.


Références :

Décret 53-960 du 30 septembre 1953 art. 5

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (16e chambre, section B), 15 décembre 1994


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 19 mar. 1997, pourvoi n°95-13364


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEAUVOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.13364
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