AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Courriers de l'Aube, dont le siège est ... de Champagne, 10000 Troyes, en cassation d'un jugement rendu le 29 décembre 1995 par le tribunal d'instance de Troyes, au profit du syndicat CFDT des Transports Aube, dont le siège est ..., défendeur à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 22 janvier 1997, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Pams-Tatu, conseiller référendaire rapporteur, MM. Carmet, Ransac, conseillers, M. Frouin, conseiller référendaire, M. Chauvy, avocat général, Mlle Barault, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Pams-Tatu, conseiller référendaire, les observations de Me Ricard, avocat de la société Courriers de l'Aube, les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 431-1-1 du Code du travail, ensemble les articles L. 132-4, L. 426-1 et L. 438-10 du même Code ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison des textes susvisés que, si dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à deux cents salariés, le chef d'entreprise a la faculté, après avoir consulté les délégués du personnel et, s'il existe, le comité d'entreprise, de décider que les délégués du personnel constituent la délégation du personnel au comité d'entreprise (délégation unique), le nombre de ces délégués peut être augmenté par des conventions ou accords collectifs ;
Attendu que pour juger que le chef d'entreprise de la société Les Courriers de l'Aube n'avait pas la faculté de décider que les délégués du personnel constituaient la délégation du personnel au comité d'entreprise, et le condamner à organiser des élections de délégués du personnel et membres du comité d'entreprise sur le fondement de la convention collective des transports, le jugement attaqué a retenu qu'aucune des dispositions de la loi du 20 décembre 1993 ne conférait à l'article L. 431-1-1 un caractère d'ordre public, et que les dispositions conventionnelles en prévoyant une élection propre à la désignation des représentants du personnel au comité d'entreprise et deux scrutins distincts, apparaissaient plus favorables que les dispositions légales ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions de la convention collective ne faisaient pas obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 431-1-1 du Code du travail et alors que pour déterminer le nombre des délégués du personnel de la délégation unique, le juge du fond doit comparer le nombre de ces délégués, tel qu'il figure à l'article R. 423-1-1 du Code du travail, avec celui des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise conventionnels, et retenir le nombre le plus élevé des trois, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 29 décembre 1995, entre les parties, par le tribunal d'instance de Troyes; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Nogent-sur-Seine ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.