La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/02/1997 | FRANCE | N°96-82504

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 février 1997, 96-82504


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq février mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller FARGE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- MESSINA Joseph, contre l'arrêt de la cour d'assises de la SAVOIE, en date du 13 octobre 1995, qui, pour assassinats

et vols avec arme, l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, en port...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq février mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller FARGE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- MESSINA Joseph, contre l'arrêt de la cour d'assises de la SAVOIE, en date du 13 octobre 1995, qui, pour assassinats et vols avec arme, l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, en portant à 18 ans la durée de la période de sûreté, ainsi qu'à l'interdiction pendant 10 ans des droits civiques, civils et de famille ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 6-3b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 343 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et violation de l'article 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que par arrêt incident (procès-verbal page 3), la Cour a dit n'y avoir lieu à ordonner le renvoi de l'affaire et a ordonné la continuation de l'audience ;

"aux motifs que le défenseur de l'accusé a eu, depuis le 21 septembre 1995, le temps d'assurer la défense de son client pour l'affaire devant commencer à la cour d'assises le 9 octobre 1995 ;

"alors, d'une part, qu'en se fondant, pour déclarer suffisamment raisonnable le délai accordé à la défense pour se préparer, sur le fait que le défenseur connaissait les dossiers d'instruction à une date antérieure à la date à laquelle il avait reçu la convocation devant la cour d'assises, la Cour a statué par des motifs inopérants, le délai devant être apprécié au regard de la nécessité d'organiser la défense entre la décision de renvoi et l'audiencement devant la juridiction du jugement ;

"alors, d'autre part, qu'en s'abstenant de répondre au moyen articulé dans les conclusions, et tiré de ce que le calendrier du défenseur était déjà extrêmement chargé entre la date à laquelle l'audience devant la cour d'assises lui a été notifiée et la date d'ouverture des débats devant cette Cour, et donc en s'abstenant de rechercher si la défense avait pu matériellement s'organiser dans le bref délai qui lui avait été imparti, la Cour n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Attendu que, pour rejeter les conclusions tendant au renvoi de l'affaire à une session ultérieure, la Cour retient que l'avocat de l'accusé, qui avait été avisé le 21 septembre 1995 de la date d'audience du 9 octobre 1995, a eu connaissance de l'intégralité de la procédure depuis le 8 juin 1995 ;

Qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que cet avocat a disposé du temps nécessaire à l'organisation de la défense de son client, la décision attaquée n'encourt pas les griefs allégués ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 349 du Code de procédure pénale et du principe de l'oralité des débats ;

"en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats (pages 11 à 14) que, s'agissant des faits de vols à main armée commis à Chambéry le 7 juin 1989, l'instruction à l'audience a consisté dans l'audition d'un témoin unique, Didier Y..., sans audition d'autres témoins, et en la lecture de pièces de la procédure, sans même que le procès-verbal des débats mentionne que les accusés auraient été entendus sur ces faits; qu'ainsi, les débats ont consisté dans la reproduction quasi littérale du dossier d'instruction, en méconnaissance du principe de l'oralité des débats et des droits de la défense" ;

Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats que, pour les faits visés au moyen, un témoin cité et signifié a été entendu et que, après cette déposition, les accusés ont pu lui poser des questions ;

Attendu qu'ainsi, il a été satisfait au principe de l'oralité des débats ;

Qu'en effet, les dispositions de l'article 328, alinéa 1er, du Code de procédure pénale ne sont pas prescrites à peine de nullité, la loi exigeant seulement que l'accusé ait pu librement se défendre ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 310, 316 du Code de procédure pénale, 593 du même Code, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que par arrêt incident, la Cour a décidé de reporter "après la déposition du témoin Lardancher, la lecture de la lettre de Joseph B... au procureur de la République, ainsi que les observations éventuelles de l'accusé et de son conseil sur les pièces dont le président de la Cour vient de donner lecture" ;

"alors, d'une part, que, saisi d'une demande de lecture d'une pièce adressée par l'accusé au procureur de la République, le président devait statuer sur cette demande en vertu de ses pouvoirs propres, sans pouvoir les déférer à la Cour; qu'ainsi, en statuant sur cette demande, la Cour a excédé ses pouvoirs ;

"alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse le pouvoir de direction des débats et le principe de continuité de ceux-ci ne peuvent être opposés à la défense, si celle-ci considère qu'il est utile à ses intérêts de lire une pièce en réponse directe à d'autres pièces qui viennent d'être lues par le président; qu'en l'absence de toute constatation d'un trouble quelconque qu'aurait pu causer la lecture immédiate de cette pièce, le président ne pouvait que faire droit à la demande de lecture formulée par la défense dont les droits ont été ainsi violés" ;

Attendu qu'en décidant que la lecture sollicitée aurait lieu mais serait différée afin de ne pas rompre la continuité des débats, la Cour a fait un usage régulier du pouvoir discrétionnaire dont le président l'avait expressément saisie en application de l'article 310, alinéa 1, du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le cinquième moyen de cassation pris de la violation des articles 310, 349, 328 et suivants du Code de procédure pénale, 593 du même Code, violation du principe de l'oralité des débats ;

"en ce que, par arrêt incident, la Cour a rejeté la demande de renvoi formée par la défense aux fins d'audition d'un témoin défaillant, Anita X..., et a constaté que le président de la Cour avait fait connaître aux parties son intention de procéder à la lecture des dépositions effectuées par Anita X... au cours de la procédure d'instruction ;

"aux motifs que l'audition des témoins déjà entendus a permis une connaissance complète de la personnalité des victimes et de leurs rapports avec l'accusé, étant relevé qu'Anita X... n'a pas été témoin des faits faisant l'objet de l'accusation et qu'elle a été entendue à trois reprises de manière très précise et complète au cours de la procédure, audition dont il sera donné lecture par le président de la Cour ;

"alors, d'une part, que la procédure doit être orale; que les témoins doivent donc être entendus personnellement par la cour d'assises, sauf impossibilité dûment constatée par celle-ci de les faire comparaître et de les entendre; que, faute de constater la moindre impossibilité d'entendre Anita X... et de la faire comparaître, fût-ce à une audience ultérieure, la Cour n'a pas légalement justifié sa décision de recourir exclusivement à la lecture des dépositions d'Anita X... au cours de l'instruction ;

"alors, d'autre part, que la Cour ne pouvait sans contradiction considérer que la procédure était complète et qu'il y avait lieu néanmoins de lire les témoignages d'Anita X..., dont elle révélait ainsi que l'audition aurait été utile à la manifestation de la vérité ;

"alors, enfin, que, si la Cour considère qu'un témoignage n'est pas utile à la manifestation de la vérité, le président perd alors tout pouvoir de lire les dépositions du témoin défaillant, faites au cours de l'instruction; qu'ainsi le président a, en toute hypothèse, excédé ses pouvoirs" ;

Attendu que le procès-verbal des débats mentionne qu'Anita X..., témoin régulièrement cité et dénoncé mais absent de France, n'a pas répondu à l'appel de son nom; que, saisie de conclusions de la défense tendant au renvoi de l'affaire aux fins d'audition de ce témoin, la Cour, par arrêt du 10 octobre 1995, a sursis à statuer, puis, après l'audition d'autres témoins, a, par arrêt du 11 octobre 1995, rejeté la demande par les motifs repris au moyen et a constaté que le président avait fait connaître aux parties son intention de donner lecture des déclarations du témoin; que le président a ensuite, en vertu de son pouvoir discritionnaire et à titre de simples renseignements, donné lecture desdites déclarations; qu'aucune observation n'a été faite par les parties ;

Attendu qu'en procédant ainsi, la Cour et le président n'encourent pas les griefs allégués au moyen; que, d'une part, la Cour a souverainement apprécié que la comparution du témoin n'était pas indispensable à la manifestation de la vérité; que, d'autre part, rien n'interdisait au président de donner lecture des déclarations dudit témoin, l'exercice de son pouvoir discrétionnaire dépendant exclusivement de sa libre décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 349 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que Joseph B... a été déclaré coupable d'assassinat sur les personnes de Thierry A... et de Magalie Z... ;

"alors que la réponse affirmative aux questions numéros 6 et 8 interrogeant la Cour et le jury sur le point de savoir si les meurtres spécifiés aux questions numéros 5 et 7 avaient été commis avec préméditation, ne caractérise pas la culpabilité personnelle de Joseph B... au regard de cette circonstance aggravante personnelle que constitue la préméditation; qu'en effet, le rapprochement d'une réponse affirmative aux questions numéros 5 et 7 relatives au point de savoir si Joseph B... était coupable des meurtres de Thierry A... et Magalie Z..., et d'une réponse affirmative aux questions numéros 6 et 8 interrogeant la Cour et le jury sur le point de savoir si ces meurtres avaient été commis avec préméditation ne suffit pas à déterminer si la préméditation a été le fait de Joseph B... lui-même; que, dans ces conditions, la condamnation du chef d'assassinat n'est pas légalement caractérisée" ;

Attendu que Joseph B... a été renvoyé sous l'accusation notamment d'assassinat sur les personnes de Thierry A... et Magalie Z... ;

Que la Cour et le jury ont été successivement interrogés par les questions suivantes :

n°5 : L'accusé Joseph B... est-il coupable d'avoir à Apremont (Savoie), le 10 septembre 1993, volontairement donné la mort à Thierry A... ?

n°6 : Le meurtre spécifié à la question n°5 a-t-il été commis avec préméditation ?

n°7 : L'accusé Joseph B... est-il coupable d'avoir à Le Val (Savoie), le 12 septembre 1993, volontairement donner la mort à Magalie Z... ?

n°8 : Le meurtre spécifié à la question n°7 a-t-il été commis avec préméditation ?

Attendu qu'en cet état, dès lors que chacune des questions relatives à la circonstance aggravante de préméditation se réfère à chacun des meurtres imputés à l'accusé, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Farge conseiller rapporteur, M. Fabre, Mme Baillot, M. Le Gall, Mme Anzani conseillers de la chambre, Mme Batut, M. Poisot conseillers référendaires,

Avocat général : M. le Foyer de Costil ;

Greffier de chambre : Mme Mazard ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award