AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Mitchell et Cie, société en commandite simple, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 13 janvier 1994 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre civile), au profit :
1°/ de M. Pierre, Louis Y..., administrateur judiciaire au redressement de la société Mitchell et Cie, demeurant ...,
2°/ de M. X..., mandataire liquidateur, pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Mitchell et Cie, demeurant ...,
3°/ de M. le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié en son Parquet sis au Palais de Justice, 13100 Aix-en-Provence,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 novembre 1996, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Tricot, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. Tricot, conseiller, les observations de Me Choucroy, avocat de la société Mitchell et Cie, de Me Blanc, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu, selon l'arrêt déféré (Aix-en-Provence, 13 janvier 1994), qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Mitchell, le tribunal a rejeté le plan de continuation et prononcé la liquidation judiciaire de la société;
Sur la seconde branche du moyen unique, qui est préalable :
Attendu que la société Mitchell reproche à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement, alors, selon le pourvoi, qu'en accueillant les conclusions des organes de la procédure déposées seulement le jour de l'audience, ce qui privait la société de toute possibilité de contradiction, l'arrêt a violé les droits de la défense et l'article 16 du nouveau Code de procédure civile;
Mais attendu que la société Mitchell n'est pas recevable à reprocher à l'arrêt d'avoir tenu compte des conclusions déposées dans les conditions précitées, dès lors qu'elle ne justifie pas avoir usé de la faculté qui lui était ouverte par l'article 784 du nouveau Code de procédure civile de demander la révocation de l'ordonnance de clôture afin d'organiser sa défense;
Et sur la première branche du moyen :
Attendu que la société Mitchell reproche encore à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le pourvoi, que le tribunal décide de la continuation de l'entreprise lorsqu'il existe "des possibilités sérieuses de redressement et de règlement du passif"; que la décision de continuation de l'entreprise demande que soient constatées les possibilités sérieuses de règlement du passif sans qu'il soit nécessaire que soit établie, au jour de la décision, la certitude du paiement des créances; qu'en rejetant le plan de continuation en raison de l'incertitude au jour de sa décision, du prix d'adjudication de l'immeuble affecté hypothécairement à une créance bien que l'affectation de cet immeuble -ou des ses loyers- offerte par le gérant de la société au paiement de la créance, fasse apparaître la possibilité de règlement des créances, l'arrêt a subordonné l'adoption du plan de continuation à une exigence que le texte ne comporte pas et partant, a violé l'article 69 de la loi du 25 janvier 1985;
Mais attendu qu'après avoir relevé que les contestations de créances formées par la société Mitchell n'apparaissent pas sérieuses et retenu que la vente de l'immeuble du gérant, affecté à la garantie d'un créancier de la société, ne peut être envisagée dans l'immédiat en raison des incidents de la procédure de saisie immobilière en cours, et se réalisera à un prix incertain, l'arrêt constate que la rentabilité de l'entreprise, non susceptible d'accroissement notable, demeure insuffisante pour apurer le passif dans des délais raisonnables et compatibles avec l'intérêt des créanciers; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié l'incidence de l'affectation de l'immeuble du gérant sur le règlement des dettes de la société, a légalement justifié sa décision d'écarter le plan de continuation proposé; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Mitchell et Cie aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., liquidateur judiciaire de la société Mitchell;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.