AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Daniel Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 12 janvier 1994 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre, 1re section), au profit de Mme Françoise X..., ès qualités de mandataire-liquidateur de la société à responsabilité limitée Espace auto et de représentant des créanciers au redressement judiciaire de M. Daniel Y..., domiciliée ...,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 novembre 1996, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Tricot, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. Tricot, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Y..., de la SCP Vier et Barthélemy, avocat de Mme X..., ès qualités, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Rennes, 12 janvier 1994), qu'après la mise en redressement puis en liquidation judiciaires de la société Espace auto, le Tribunal a ouvert le redressement judiciaire de son gérant, M. Y..., et a prononcé la faillite personnelle de ce dirigeant pour une durée de cinq ans;
Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les deux procédures en déclaration de redressement judiciaire et de faillite personnelle avaient été engagées contre M. Y... par Mme X..., en sa qualité de liquidateur de la société Espace auto, dans le seul cadre du redressement et de la liquidation judiciaires de cette personne morale; que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait, pour décider que M. Y..., en sa qualité de gérant de la société Espace auto, avait poursuivi abusivement une exploitation déficitaire ne pouvant conduire qu'à la cessation des paiements de cette personne morale, se fonder sur la gestion et retenir le passif d'une autre personne morale dont M. Y... avait été le gérant, soit celui de la société CACN, étrangère à la procédure; qu'ainsi la cour d'appel a violé les articles 182 et 188 de la loi du 25 janvier 1985; alors, d'autre part, que la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire ne peut être sanctionnée que si elle a lieu dans un intérêt personnel; qu'en se bornant à affirmer qu'il résultait de "ces éléments", lesquels ne caractérisent que la poursuite d'une exploitation déficitaire, que M. Y... avait abusivement, dans un intérêt
personnel, poursuivi l'exploitation déficitaire de la société Espace auto, sans préciser par aucun motif en quoi aurait consisté l'intérêt personnel du dirigeant, la cour d'appel a violé les articles 182.4° et 188 de la loi du 25 janvier 1985; et alors, enfin, que la tenue d'une comptabilité incomplète ne figure pas parmi les faits pouvant être sanctionnés par l'article 182.5° de la loi du 25 janvier 1985, ce texte visant le dirigeant qui s'est abstenu de tenir toute comptabilité conforme aux règles légales; que le jugement correctionnel condamnant M. Y... à une peine de principe pour omission de tenue de comptabilité n'a autorité de chose jugée qu'en ce qu'il a jugé, par un motif nécessaire au soutien du dispositif, que les livres obligatoires n'avaient pas été tenus jusqu'à la fin d'activité et que le bilan 1989 n'avait pas été établi; qu'en sanctionnant néanmoins M. Y... pour une comptabilité tenue conformément aux règles légales, mais incomplète, la cour d'appel a violé les articles 182.5° et 188 de la loi du 25 janvier 1985 et méconnu l'étendue exacte de l'autorité de la chose jugée au pénal;
Mais attendu qu'ayant constaté que, par un jugement correctionnel ayant force de chose jugée, M. Y... avait été déclaré coupable d'abstention de tenue de comptabilité, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision de prononcer la liquidation judiciaire et la faillite personnelle de M. Y... par application des articles 182.5° et 188 de la loi du 25 janvier 1985; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme X..., ès qualités;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.